Correspondance.
Une heure avant le lancement du cortège à hauteur du Parc des expositions de Blois (Loir-et-Cher), plusieurs manifestants se retrouvent dans un bistrot pour l’ultime café avant l’assaut des rues de la ville. Parmi eux, Isabelle et Joseph, tous deux salariés de l’industrie automobile et syndiqués CFDT. « Au-delà de la question des retraites, il faudrait repenser la manière de travailler, notamment à propos de la pénibilité dans des emplois comme ceux du bâtiment », avancent-ils. « Pour ces professions, envisager de travailler deux années de plus, c’est juste insupportable ». Les deux salariés dénoncent également ce qu’ils qualifient de « véritable projet de société » et fustigent les choix politiques du gouvernement Borne-Macron. « Quand ils veulent financer un projet, ils savent où trouver l’argent. Là, une fois de plus, on punit les gens du monde du travail qui se lèvent tôt et n’en peuvent plus », insistent-ils. « À ceci s’ajoutent la difficulté à trouver un médecin, les salaires trop bas… Bref, rien ne va ».
Un terreau fertile pour les luttes
Quand la manifestation s’élance, tout le monde a la forte participation du 19 janvier en tête. De 8 à 10 000 personnes avaient battu le pavé de la préfecture du Loir-et-Cher. Un record depuis le rassemblement de soutien à Charlie Hebdo, selon plusieurs observateurs. « S’il y a un mot d’ordre général sur la réforme des retraites, les revendications s’enrichissent en fonction des territoires », explique Sébastien Boulanger, de l’Union départementale CGT 41. « Ici, les agents hospitaliers, nombreux aujourd’hui, ont vu le plan blanc déclenché le jour des annonces de Borne sur la réforme. Les conditions de travail, les salaires… toutes ces difficultés de vie s’accumulent et créent un terreau fertile pour les luttes, c’est un fait ». Les premiers chiffres de participation des villes voisines sont déjà connus. Le matin, ils étaient 1 550 à Romorantin et 2 500 à Vendôme, soit en hausse notable par rapport au 19 janvier. « Les salariés savent qu’ils faut tenir et que l’outil de travail doit être bloqué, ce qui a manqué aux luttes de 2010 », insiste le syndicaliste.
Cette réforme est l’injustice de trop
Pascal et Alain, deux militants communistes locaux, pointent l’injustice de trop. « Le Covid, les fins de mois difficiles, les gens ont déjà trop donné. Cette nouvelle attaque, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase et cela touche désormais des couches de population jugées protégées ou privilégiées ». Plus bas, alors que le cortège grossit à vue d'œil, Norella arbore chasuble et tambourin. « Le manque de moyens dans le secteur de la santé vient aggraver la situation des gens. En fait, tout est lié », confirme cette soignante, par ailleurs secrétaire adjointe de l’union départementale CGT pour la Santé. « Cela fait des années que nous alertons sur les conditions de travail, notamment dans les EHPAD. Travailler plus longtemps, ce n’est plus possible! ».
REPORTAGES
Partout en France, les mobilisations ont battu des records
À Châteaudun, le privé était dans la rue
À Saint-Étienne, l’ambiance du Chaudron délocalisé en centre-ville
À Grenoble, les blouses blanches sont fatiguées mais debout
À Rouen, sur les ponts de Seine coule la colère
À Mayotte, union syndicale inédite contre une loi « qui insulte la classe ouvrière »