L'heure a sans doute sonné pour la Brestoise Charlène Guignard, qui patine depuis 2010 avec Marco Fabbri pour l'Italie. Après deux médailles de bronze européennes et une 4e place mondiale l'hiver dernier, ils ont pris la tête au Championnat d'Europe ce vendredi à l'issue de la danse rythmique (85,53 pts), juste devant les Britanniques Lilah Fear et Lewis Gibson (84,12 pts). Le titre se jouera entre ces deux-là samedi dans une épreuve où l'absence des Russes, mais aussi de Gabriella Papadakis et Guillaume Cizeron, les champions olympiques et quintuples champions d'Europe et du monde, pèse particulièrement.
Pour compléter le podium, ils sont quatre couples à se tenir en à peine plus d'un point, entre les Finlandais Juulia Turkkila et Matthias Versluis, virtuels 3es (77,56 pts), et les Français Evguenia Lopareva et Geoffrey Brissaud, pour l'instant 6es (76,49 pts). Evidemment, alors que leurs aînés sont en retrait, sans savoir encore s'ils reviendront sur la glace, il serait facile d'oser un raccourci, d'imaginer déjà que Lopareva-Brissaud se glissent parmi les médaillés en oubliant qu'ils étaient 9es lors des Championnats d'Europe de 2022. Mais ces murmures, ces attentes, ils les évacuent dans un sourire.
« Ça pèse à partir du moment où on les écoute, insiste Brissaud. Je pense qu'on est assez réaliste pour savoir où on veut aller, et comment on y va. Oui, on a l'ambition de faire des médailles un jour. Mais on ne veut pas brûler les étapes. On est jeunes, on se construit. » Sa partenaire depuis 2018 ne dit pas autre chose : « Bien sûr, on parle beaucoup, on attend beaucoup de nous. On fait d'autant plus le lien que notre libre a été créé par Guillaume. Mais eux, c'est eux, un couple superbe. Nous, on doit continuer et dessiner notre propre chemin. On cherche à réussir une performance, sans s'arrêter à la place ou au nombre de points. »
Pour cela, le duo a choisi de s'exiler régulièrement à Montréal. Lors du dernier stage qu'ils y ont effectué après le titre national acquis à Rouen début décembre, ils étaient accompagnés de leur entraîneur à Lyon, Roxane Petetin. « Quand l'occasion s'est présentée d'aller au Canada, on s'est demandé pourquoi ? Parce qu'il y a là-bas beaucoup de couples de haut niveau, plus forts que nous, que patiner avec eux nous apporte beaucoup, rien qu'en regardant, en se laissant prendre par l'ambiance et l'énergie », répond Lopareva. « Ça nous apporte en termes d'émulation. Ils ont aussi beaucoup de spécialistes, des chorégraphes, ajoute Brissaud. Ça complète et perfectionne ce qu'on a à Lyon. Et on connaît bien Romain. Travailler avec lui est très naturel, dans la même veine que le travail que l'on fait tous les jours. »
« On essaie d'être moins des individus sur la glace et davantage un couple »
Les progrès sont sensibles, visibles. Ils se sont matérialisés avec un record personnel battu au Trophée de Budapest (2e), juste avant un premier podium lors du Grand Prix de France à Angers (3e). « Je ne pense pas que ce soit technique, souligne Lopareva. Mais on a évolué sur la connexion entre nous deux. Bien sûr c'est loin d'être parfait, mais on a beaucoup progressé dans cette direction. Et ce n'est pas facile, il faut une ouverture d'esprit. Pour moi, c'était vraiment difficile de m'ouvrir, de montrer les émotions que j'ai à l'intérieur de moi. » Et de les partager avec son partenaire. « On essaie d'être moins des individus sur la glace et davantage un couple, prolonge-t-il. À partir du moment où on travaille dans la même direction, qu'on a les mêmes envies, on a accepté d'en passer par là. On le fait de plus en plus, en forçant pour que ça devienne naturel. »
Cet aspect, les Belfortains Loicia Demougeot et Theo Le Mercier l'ont déjà apprivoisé. Dans la danse rythmique, les élèves de Karine Arribert à Villard-de-Lans ont pris la 7e place (72,55 pts). « Ce n'est pas la meilleure short qu'on ait faite, mais on a battu notre season best et on peut être satisfait », commente Le Mercier. « En gros, on a changé les deux premières parties du programme, et il y a eu quelques petits accrocs de placement l'un par rapport à l'autre », enchaîne Demougeot, qui signale une bêtise avant le porté. « Même dans l'engagement physique, ça aurait pu être mieux », relève son partenaire. « Peut-être qu'on a préféré ne pas en faire trop pour ne pas faire plus d'erreurs, justifie la jeune femme. Quand on ne se sent pas trop stable, on essaie de se calmer, se reconnecter à deux. »
publié le 27 janvier 2023 à 18h26