Les enquêteurs indonésiens travaillent à reconstituer ce qui a débouché sur l'une des pires catastrophes de l'histoire du football, voici le film des événements dans le stade de Malang, vérifié par l'AFP.
Un mouvement de foule survenu après que la police a voulu repousser des supporteurs avec du gaz lacrymogène a fait 131 morts samedi soir, dont 32 enfants.
À l’aide d'entretiens avec plusieurs responsables, de récits de témoins, de photos et des vidéos vérifiées prises pendant la soirée, l'AFP a reconstitué la succession d'événements qui a mené au chaos pendant une dizaine de minutes après la fin d'un match dans le stade Kanjuruhan à Malang (Est de Java).
21H47: portes fermées
Après le coup d'envoi à 20H00 locales, le match s'est déroulé sans incident pendant la première et la seconde mi-temps dans un stade rempli par 42.000 supporteurs de l'équipe locale Arema FC.
Le match s'est terminé à 21H57, selon les métadonnées des images étudiées. Mais 10 minutes avant, les portes du stade étaient toujours fermées, contrairement à l'usage. Ce dysfonctionnement a été imputé à «des instructions données tardivement» et des responsables «qui n'étaient pas encore arrivés», selon le porte-parole de la Fédération de football indonésien Ahmad Riyadh.
Plusieurs témoignages et des images confirment cette version. Mais la police conteste cela, affirmant que les portes de sortie étaient toutes ouvertes.
Après le coup de sifflet final, une succession d'événements a débouché sur le drame.
22H17: la pelouse envahie
Les joueurs avaient pris un temps de repos sur le terrain après le match et leur défaite 3 à 2 contre le Persebaya Surabaya, selon les métadonnées des vidéos. Ils ont ensuite traversé le terrain pour saluer des supporteurs qui les attendaient dans le gradin Est à 22H17, montrent les métadonnées des images et des vidéos.
Deux supporteurs sont entrés sur le terrain pour aller à la rencontre des joueurs. L'un d'entre eux semble leur faire des reproches mais ensuite il prend dans ses bras un joueur, selon des photos. Une vidéo montre plusieurs fans dans les tribunes faire des doigts d'honneur aux joueurs.
Un troisième supporteur entre sur le terrain et attire l'attention des stadiers qui essaient de l'attraper, révèlent des vidéos et des photos.
Un quatrième spectateur arrive aussi sur le terrain, d'après les images vidéo, vu par la sécurité qui ne parvient pas à l'attraper.
Des dizaines d'autres supporteurs entrent alors sur le terrain, selon les images et les vidéos. Les stadiers tentent de les empêcher et leur demandent de retourner dans les gradins.
22H19: arrivée de la police anti-émeutes
À 22H18, les stadiers commencent à escorter les joueurs vers les vestiaires alors que les fans continuent à envahir le terrain, selon les images vidéo.
À 22H19, des vidéos montrent les premiers fumigènes venus du gradin Ouest tomber dans la zone où les joueurs sont escortés. Des dizaines de supporteurs sont à présent sur le terrain.
Un autre fumigène est envoyé depuis le même gradin, selon des images vidéo.
La police antiémeute commence à se déployer avec des matraques et des boucliers depuis le nord du stade, montrent les images.
À 22H20, des fans battent retraite vers la tribune Est tandis que des policiers les poursuivent, certains à coups de matraque, selon des vidéos et des photos. Des projectiles sont envoyés par la foule vers la police.
À 22H22, des affrontements commencent entre la police et les supporteurs sur le terrain, d'après des images vidéo. On peut entendre sur des enregistrements des supporteurs demander à leurs amis de retourner vers les gradins.
Des images vidéo montrent des policiers s'avancer vers le nord pour repousser les supporteurs alors qu'ils sont en train de perdre le contrôle de la situation.
22H25: gaz lacrymogènes, bousculades
Selon les images vidéo, vers 22H25, la police commence à envoyer des gaz lacrymogènes dans les gradins Est et Ouest. Les supporteurs répondent avec des jets de projectiles vers les policiers et certains pénètrent sur le terrain pour les atteindre.
À 22H26, de nouveaux jets de gaz lacrymogènes sont visibles dans les vidéos.
De nombreux supporteurs se précipitent vers les portes fermées, montrent les images, dans l'espoir d'échapper aux gaz qui, selon des témoins, rendaient l'air irrespirable.
En fuyant, beaucoup d'entre eux ont été piétinés ou asphyxiés mortellement par un mouvement de foule devant plusieurs portes fermées ainsi que d'autres qui étaient ouvertes mais trop petites pour laisser passer un grand nombre de personnes, selon des survivants.
Des dizaines de personnes sont mortes dans une bousculade devant la porte 13, où les gradins Ouest et Sud se rejoignent, selon des témoins qui ont survécu. Les autorités n'ont pas précisé combien de personnes avaient trouvé la mort précisément à cet endroit.
À ce moment, les photographes et vidéastes ont arrêté de prendre des images pour venir en aide aux victimes, alors que des policiers restaient sur le côté, selon plusieurs témoins interrogés par l'AFP.
Quelques minutes plus tard, les images montrent que les policiers ont disparu du terrain au moment où les supporteurs essayent d'échapper au gaz lacrymogène.
La police a affirmé que quelque 3.000 supporteurs avaient envahi la pelouse.
Des photographes ont vu des supporteurs emmener des victimes dans une ambulance sur le terrain ou en dehors du stade.
En quelques minutes des dizaines de personnes ont perdu la vie et beaucoup d’autres par la suite dans les hôpitaux, au cours de la pire catastrophe survenue dans le pays lors d'un événement sportif.