Collectif Initiatives Capitalexit Médicaments Santé
Depuis le 19 janvier, la mobilisation citoyenne est forte, large, solidaire ; et le 16 mars au soir, des rassemblements spontanés ont eu lieu contre le coup de force de l’exécutif. Ce recul sociétal est rejeté très majoritairement par les Français. Au soir du lundi 20 mars, à la motion de censure transpartisane il a manqué 9 voix à l’Assemblée nationale. Un référendum ? Des recours au Conseil constitutionnel ? Quid de l’exigence des citoyens d’abandonner cette réforme ?
L’invention du régime général de Sécurité sociale a été le produit d’une histoire longue et conflictuelle. En 1946, le rapport de forces avait contraint les classes dominantes à concéder la création du régime général de la Sécu. Or il a toujours paru scandaleux aux élites politiques, administratives et économiques que le monde du travail dirige une institution d’une telle ampleur. Depuis sa création les attaques contre la protection sociale n’arrêtent pas. Les gouvernements n’ont de cesse de discréditer, dénaturer, abîmer cette grande idée et réalisation humaine solidaire qu’est la Sécurité sociale. Ils ont un objectif : mettre à disposition son budget pour la capitalisation et l’individualisation. La Commission européenne, dont la feuille de route est de tout marchandiser, est en appui des coups portés par l’exécutif français, comme elle a œuvré à la mise à genoux de toute la protection sociale grecque. Le parti pris du patronat s’exprime dans la substitution de charges en lieu et place de cotisations. Cette tromperie organisée, pendant des décennies, sert de prétexte au pillage de la source de financement de la Sécurité sociale, les cotisations – constituant l’essentiel du salaire socialisé (santé, retraite, famille…). Au nom de la défense de l’emploi, le consensus politique néolibéral a impunément détourné les fonds du monde du travail sans résultat (mais aussi sans objectif, ni contrainte) et les services publics de santé, le niveau des retraites, etc. ont été considérablement altérés.
Souvenons-nous. Après des semaines de grèves, alors que deux millions de personnes avaient manifesté le 12 novembre 1995, c’est le retrait du « plan Juppé », le 15 décembre de la même année. Mais de lois en ordonnances, les gouvernements successifs ont fait aboutir le processus d’étatisation de la protection sociale à l’œuvre depuis des décennies. Chaque année, désormais, le vote des lois de financement confère au Parlement le pouvoir de déterminer les objectifs de recettes et de dépenses de la Sécu. Chaque année, leur préparation relève de la direction de la Sécurité sociale (DSS) et de la direction du budget (DB). N’ayant plus aucun poids au sein du régime général, le mouvement social n’a, pour exprimer son opposition, que la rue…
Aujourd’hui l’attaque monte en violence, le gouvernement, pour « faire passer » sa réforme des retraites, a raccourci les débats des élus des deux chambres et, le 16 mars, a dégainé le 49.3. Prendra-t-il le risque de passer en force quel qu’en soit le coût ?
L’argent de toute la protection sociale, c’est le salaire socialisé, fruit des richesses créées par le travail de millions de femmes et d’hommes. Reprendre le gouvernement de la Sécu est incontournable pour éviter le désastre de la capitalisation, visée de la finance et du pouvoir depuis Matignon. Tout comme en 1946, les salariés ont la capacité de reprendre la main sur la protection sociale, d’en définir les contenus, de les améliorer, de la rendre enfin universelle. Nous sommes capables, comme ce fut le cas à la sortie de la guerre, de partager, débattre, organiser et mettre en œuvre nos envies, nos désirs. Et de nous donner les moyens d’en faire une réalité.
Pour que la retraite et toute la protection sociale soit notre affaire, pour reprendre les rênes de sa gestion, nous avons l’obligation d’ouvrir le débat des idées et d’une construction ambitieuse. C’est de nos vies qu’il s’agit, de la vie de chacun, du devenir des nouvelles générations, alors c’est à nous tous de construire pied à pied ce que nous voulons, ce dont nous avons besoin pour vivre.