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Quels sont les facteurs ?conomiques et sociod?mographiques de la criminalit? en Ha?ti?

La mont?e inqui?tante de la criminalit? en Ha?ti s’accompagne d’une d?gradation de la gouvernance du syst?me judiciaire et de la Police nationale d’Ha?ti (PNH), d’une croissance d?mographique incontr?l?e ainsi que d’une d?t?rioration acc?l?r?e du climat politique et des conditions de vie de la population ha?tienne. Ces caract?ristiques ?conomiques, politiques et sociod?mographiques ont pu probablement faciliter la prolif?ration des gangs arm?s observ?e ces derni?res ann?es.

Pour mieux faire face ? la hausse de la criminalit? g?n?ralis?e d’aujourd’hui, il faut, entre autres, identifier les principaux facteurs ? la base de sa recrudescence. Cet exercice peut aider ? ?laborer une typologie de la violence, ? d?terminer son impact sur la vie ?conomique ? diff?rentes ?chelles et, plus important encore, ? envisager des politiques efficaces de lutte contre la criminalit? et la prolif?ration des gangs arm?s.

La r?flexion sur cette prolif?ration se situe dans le cadre d’une probl?matique beaucoup plus large qu’est l’?conomie criminelle. No?l Pons (2010) fait ressortir toute la complexit? de d?finir l’?conomie criminelle ? la base de la violence et de l’ins?curit?. Selon lui, l’?conomie criminelle <>

?videmment, aujourd’hui en Ha?ti, ce sont les enl?vements et les kidnappings qui occupent une place de choix. Cela ne veut nullement dire que le trafic de la drogue et la traite des ?tres humains ne jouent pas un r?le primordial dans la recrudescence de la criminalit?. Tr?s souvent, la criminalit? englobe les trois, voire plus.

La perception de certains secteurs ou groupes de la soci?t? ha?tienne par rapport ? la violence constitue ?galement un sujet important de recherche. Certaines formes de violence semblent ?tre tol?r?es m?me par les victimes. C’est le cas par exemple de la violence conjugale.

Perception des femmes par rapport ? la violence conjugale

Les donn?es d’enqu?tes disponibles permettent de constater que la pr?carit? des conditions socio?conomiques peut faire bouger la fronti?re <>. L’enqu?te Mortalit?, morbidit? et utilisation des services (EMMUS-VI), qui a ?t? r?alis?e en Ha?ti de novembre 2016 ? avril 2017 pour le minist?re de la Sant? publique et de la Population (MSPP) par l’Institut ha?tien de l’enfance (IHE) en collaboration avec l’Institut ha?tien de statistique et d’informatique (IHSI), a abord? certaines formes de violences observ?es en Ha?ti. Le rapport final de l’enqu?te, publi? en juillet 2018, reporte les opinions des r?pondants concernant le fait de battre sa femme.

On a demand? aux enqu?t?(e)s s’ils/elles pensaient qu’il est justifi? qu’un mari/partenaire batte ou frappe son ?pouse/partenaire pour chacune des cinq raisons suivantes : elle br?le la nourriture, elle argumente avec lui, elle sort sans le lui dire, elle n?glige les enfants, et elle refuse d’avoir des rapports sexuels avec lui. Si les enqu?t?(e)s r?pondent <> pour, au moins, une raison, l’on consid?re qu’ils/elles justifient le fait de battre une ?pouse/partenaire.

L’EMMUS-VI r?v?le que <> Battre sa femme dans les soci?t?s occidentales est interdit quelle que soit la raison ?voqu?e. Mais pour certaines raisons et dans certaines circonstances, les r?sultats de l’EMMUS-VI indiquent que des femmes peuvent accepter d’?tre battues en Ha?ti et trouvent que ce type de violence pourrait ?tre tout-?-fait justifi?.

Cette perception des femmes sur la violence conjugale soul?ve de nombreuses pr?occupations. Mentionnons seulement trois d’entre-elles. D’abord, est-ce que ce type de violence peut conduire ? d’autres formes de violences encore plus graves? Ensuite, ? part les violences conjugales, quels autres types de violences peuvent ?tre tol?r?s par la population et par les victimes? Et enfin, quels sont les principaux facteurs qui peuvent influencer cette perception favorable ? la violence?

Selon l’EMMUS-VI, <>

Cet exemple montre l’importance d’examiner les caract?ristiques d?mographiques et socio?conomiques de la population ha?tienne pour mieux comprendre l’environnement et le contexte dans lesquels se d?veloppe la criminalit? en Ha?ti. En fait, si des proportions aussi importantes de la population admettent que dans certains cas, la violence conjugale est justifi?e, elles peuvent ?tre enclines ? accepter d’autres formes de criminalit?.

Les facteurs d?mographique et socio?conomique

Selon la r?partition de la population ha?tienne par sexe et r?gion g?ographique au mois de mars 2015 (la date la plus r?cente pour laquelle l’IHSI a publi? les estimations), la population ha?tienne s’?levait ? 10,9 millions d’habitants. L’aire m?tropolitaine de Port-au-Prince, ? elle seule, comptait en 2,6 millions d’habitants. La population du reste du d?partement de l’Ouest se chiffrait ? 1,4 million d’habitants, ce qui fait un total de 4 millions pour d?partement de l’Ouest.

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Lors du premier recensement g?n?ral de la population en 1950, 65 ans plus t?t, la taille de la population ha?tienne ?tait de 3,1 millions d’habitants, soit une augmentation de 252 % entre 1950 et 2015. Donc, en 2015, la population du d?partement de l’Ouest d?passait celle de tout le pays en 1950. Elle se rapprochait de la population totale du pays en 1971 lorsque le deuxi?me recensement de la population d?nombrait 4,3 millions d’habitants dans l’ensemble du pays. En 2015, l’aire m?tropolitaine de Port-au-Prince repr?sentait 24 % de la population totale versus 15,9 % pour le d?partement de l’Artibonite, 12,7 % pour le Reste-Ouest et 10,1 % pour le d?partement du Nord. Sur une plus petite ?chelle, la population de Martissant est pass?e de 2 402 habitants en 1968 ? 4 133 en 1982, selon les donn?es du recensement de 1982. 27 ans plus tard, soit en 2009, on allait franchir la barre de 267 510 habitants et 295 204 en 2015, selon les donn?es de l’IHSI.

Cette croissance vertigineuse de la population ne s’accompagnait pas que d’opportunit?s ?conomiques. Au contraire, ces opportunit?s devenaient de plus en plus rares pour une taille de population sans cesse croissante, ce qui constitue un terreau facile ? l’?mergence de la criminalit?. Celle-ci semble prendre de plus en plus de places dans les zones o? la densit? de la population est plus ?lev?e. Et pour mieux comprendre ce facteur, il importe de regarder de plus pr?s, les indicateurs d?mographiques et socio?conomiques au cours des 50 derni?res ann?es.

Pendant que la population a quasiment quadrupl? entre 1950 et 2021, le Produit int?rieur r?el n’a pas suivi ce m?me rythme, passant de 5,8 milliards de dollars am?ricains en 1960 (dollars constants de 2010) ? 13,5 milliards en 2015, soit une hausse de 132,8 %. La quantit? de richesse produite (produit int?rieur brut) au pays croit donc moins vite que la population entre 1950 et 2015. En cons?quence, le PIB par habitant, consid?r? comme un indicateur du niveau de vie de la population, a diminu? avec le temps. Il est pass? de 1 512 dollars en 1960 ? 1 261 dollars en 2015, soit une baisse de 17 % (dollars constants de 2010).

Cette diminution du niveau de vie a conduit ? un processus continu d’appauvrissement de la population au fil des ans. Au cours des 10 derni?res ann?es, le tremblement de terre, la prolif?ration des gangs arm?s et les ?pisodes de pays <> ont amplifi? davantage ce processus de paup?risation. Et de fait, en f?vrier 2020, 3,7 millions d’Ha?tiens faisaient face ? l’ins?curit? alimentaire et 4,6 millions de personnes avaient besoin d’une aide alimentaire d’urgence. En 2014, 60 % gagnaient moins d’un dollar par jour, le taux de ch?mage s’?levait ? 60 %, plus de 44 % de la population souffrait de malnutrition, 74 % des m?nages vivaient dans des taudis, 60 % de la population n’avait pas acc?s aux soins de sant? de base et seulement 2 % des gens en ?ge de scolarisation finissaient leurs ?tudes secondaires.

Thomas Lalime

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