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À Paris, cérémonie interreligieuse et action contre le projet de Total en Ouganda

Deux moines bouddhistes, un évêque émérite, une pasteure, un rabbin et un imam, assis en tailleur près d’un cercueil décoré : l’image est « improbable ». Ces six personnalités religieuses sont rassemblées, mardi 29 novembre, dans la crypte du Forum 104 à Paris pour protester contre le projet Eacop (East African Crude Oil Pipeline), la construction d’un oléoduc par TotalEnergies en Ouganda et en Tanzanie.

Prévu pour 2025, cet oléoduc de 1 443 km de long doit relier Hoima en Ouganda au port de Tanga, en Tanzanie. Un projet « mortifère », pour le protestant Martin Kopp. Ce docteur en écothéologie est aussi membre de Greenfaith, une ONG interreligieuse internationale, qui coorganise la matinée avec la branche spiritualité d’Extinction Rebellion.

Avant de se rendre devant une station-service pour interpeller le groupe pétrolier français et son actionnaire Crédit agricole, la trentaine de jeunes participants se retrouve en vue d’une cérémonie interconfessionnelle présidée par les six responsables religieux, « pour qu’il y ait un espace pour le religieux et le spirituel », précise Martin Kopp.

Chant bouddhiste, verset biblique et sourate

La cérémonie donne la parole à chaque religion : un chant bouddhiste de « gratitude » envers la nature, des versets de la Bible cités par Mgr Marc Stenger, évêque émérite de Troyes et la pasteure Caroline Ingrand-Hoffet. Et, pour finir, une sourate du Coran, récitée par l’ancien président du Conseil français du culte musulman (CFCM) Anouar Kbibech.

Un temps de recueillement rythmé par le déploiement d’un cercueil dépliable, peint et élaboré par le collectif d’artistes Minuit 12, pour « honorer la souffrance » des peuples touchés par le projet pétrolier. Ce cercueil laisse entrevoir une fresque où la nature du continent africain est dépeinte dans des tons vifs.

Les jeunes reprennent un chant de la communauté de Taizé : « Dans nos obscurités, allume le feu qui ne s’éteint jamais. » « Il y a une vraie vie spirituelle chez les jeunes, ça me décentre de mon christianisme, de mon protestantisme intellectuel », confie la pasteure Caroline Ingrand-Hoffet. Surnommée « la pasteure de la ZAD », elle a milité aux côtés de militants écologistes contre un projet d’autoroute aux abords de son village alsacien.

Des convictions écolos liées à la foi

Ensuite, la seconde partie de la matinée fait « place à l’action » vers un lieu gardé secret. « C’est la dimension spirituelle qui a fait que je suis venue », glisse Cécile, qui participe là à sa première action. « Elle permet d’aller au-delà des désaccords : toutes les religions sont d’accord pour dire qu’il faut protéger la Terre. » À ses côtés, Martin, catholique, est plus habitué aux actions de défense de la planète : « Mes convictions écolo sont intimement liées à ma foi. »

« Le Christ n’est pas mort pour qu’on reste assis sur nos bancs d’église », abonde Yaya, actif dans son diocèse et membre d’Extinction Rebellion. Devant une station-service Total, les jeunes déploient des affiches, adaptant l’Évangile : « Délivrez-nous de Total ! », « Réchauffez les cœurs, pas les oléoducs ». Les responsables religieux brandissent aussi des pancartes, après avoir porté le cercueil coloré. Yaya, lui, est à genoux et se recueille au son du bol chantant des bouddhistes, entre deux prises de parole.

« La religion est la plus grande ONG du monde », assure Anouar Kbibech, en marge de l’action. L’ancien président du CFCM regrette toutefois un « déficit de communication » entre les fidèles musulmans, ainsi qu’un « manque de mobilisation » sur les questions écologiques. De son côté, Laura Morosini, responsable Europe du mouvement Laudato si’, déplore, elle, l’« inaction des évêques » sur le sujet, malgré les sollicitations de son organisation.