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Agriculture bio : la consommation est en baisse pour la deuxième année consécutive

Le bio recule dans les paniers et les chariots de supermarché français. Dans son «panorama du bio 2022» révélé ce jeudi 1er juin, l’Agence bio constate que la consommation de produits issus de l’agriculture biologique diminue pour la deuxième année consécutive. En 2022, 6 % du panier de courses alimentaires des Français était bio contre 6,44 % en 2021. Une chute pressentie par l’agence de promotion du bio qui prévenait déjà l’an dernier que «la demande risque de continuer à ralentir». Mais elle tient à rassurer le secteur : la chute est moins rude que prévu.

«Tout le monde annonçait un recul global du bio, mais il est finalement plus nuancé que cela», tempère auprès de Libération Laure Verdau, directrice de l’agence. Si la vente de produits bio baisse dans la grande distribution (- 4,6 %) et dans les magasins bios spécialisés (- 8,6 %), la défenseuse du bio préfère s’attarder sur le positif : les ventes à la ferme ont augmenté (+ 3,9 %). «Le bio local est plébiscité par les Français : 26 000 fermes bio, c’est plus de points de vente que la grande distribution [l’Agence en dénombre 18 000, ndlr]», se réjouit-elle. Elle oublie de préciser que la vente directe est avant tout portée par le vin bio.

Les Français mangent moins

Pour ce qui est de trouver la cause du déclin du bio, l’inflation fait figure de coupable idéale. Dans son rapport, l’Agence bio justifie cette réduction de l’achat bio par une baisse de la consommation tout court. Entre 2021 et 2022, la consommation mensuelle alimentaire des Français est passée de 16,2 millions d’euros à 14,3 millions d’euros. Du côté du bio, «le prix reste un frein, mais il est stable», veut croire Laure Verdau. Pourtant cette année, ils ont été eux aussi touchés par l’inflation et ont augmenté de 4 % (contre 6,7 % pour le conventionnel). De manière générale, ils restent en moyenne 30 % plus chers que les autres. Au moment de l’arbitrage, devant les étals, le choix est vite fait pour un Français en perte de pouvoir d’achat.

Le besoin de rassurer le secteur est donc palpable. En 2022, selon le panorama de l’Agence bio, un quart des boulangers et bouchers diversifiés ont renoncé au bio. Des dizaines de magasins spécialisés ont fermé (3 086 recensés contre 3 258 fin 2021). «Dans les champs, les agriculteurs veulent passer en bio et se débarrasser des pesticides», tente Laure Verdau. Les chiffres la contrediront : le nombre de nouveaux producteurs bio est en baisse, ils sont moins nombreux à oser sauter le pas. Avec, en parallèle, 3 290 arrêts de certifications biologique en 2022, que l’Agence justifie par de nombreux départs à la retraite (et non d’un changement dans le choix de la production). En résumé, ça ne va pas fort.

«Nous sommes tous des illettrés des casseroles»

Pour s’en sortir, la filière bio possède des champs d’action conséquents. Si 92 % du bio est lié à la consommation à domicile, et repose sur le porte-monnaie des Français, les 8 % restants gagneraient à être fructifiés. Ce pourcentage représente les restaurants et les cantines, où il reste de larges pans à conquérir. «On perd un énorme business, rappelle Laure Verdau. Les 170 000 restaurants en France n’achètent qu’à hauteur de 1 % en bio.» Quant aux cantines, soumises depuis la loi Egalim en 2018 à une part de 20 % de produits issus de l’agriculture biologique, elles sont à la traine. Les denrées bio ne représentent que 7 % de leurs achats.

Après que le gouvernement se sera attelé à faire respecter ses propres lois, la défenseuse du bio veut aller beaucoup plus loin. «Nous avons besoin de véritables politiques publiques et de campagnes d’information massive du citoyen», soutient Laure Verdau. Elle en veut pour preuve de leur efficacité les campagnes de communication sur les produits laitiers : «on mange beaucoup plus de yaourts que la moyenne européenne. Il est temps que le bio parle». L’Agence réclame pour la filière bio des fonds plus importants que «l’enveloppe de crise» de 60 millions d’euros annoncés par le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau en mai. Et des fonds qui s’étaleraient sur plusieurs années, pas uniquement une aide ponctuelle.

Autre approche, plus étonnante cette fois-ci : étudier l’agriculture biologique à l’école. «On pourrait imaginer une épreuve au baccalauréat, des cours sur les différents modèles d’agriculture, comment cuisiner bio…», suggère Laure Verdau. Et d’ajouter «Nous sommes tous des illettrés des casseroles. Beaucoup de jeunes, après le bac, partent du domicile parental et ne savent pas cuisiner. Mais si on ne leur apprend pas, comment se tourneront-ils vers le bio ?», lance-t-elle sans attendre de réponse. Car du côté de nos voisins, la France fait pâle figure, le bio représentant 13 % des achats alimentaires au Danemark et 11 % en Autriche. Dommage pour l’Hexagone, pourtant champion européen en termes de surfaces bio. Les denrées sont là, il ne reste plus qu’à les manger.