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Arthur Harari, cinéaste : « Le nerf de la guerre, ce sont les producteurs »

Dans un entretien au « Monde », le réalisateur porte son regard singulier sur la crise que traverse la filière cinématographique.

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« Faites des choix que les plates-formes ne font pas ! », invectivait Arthur Harari lors de la cérémonie des Césars, le 25 février. Auteur de deux longs-métrages déjouant contraintes et conventions, Diamant noir (sorti en 2016) et Onoda, 10 000 nuits dans la jungle (2021), le cinéaste de 41 ans a participé à l’appel à des Etats généraux du cinéma, jeudi 6 octobre, à l’Institut du monde arabe, à Paris.

« On ne va pas au supermarché pour avoir une émotion », avez-vous déclaré aux Césars. Les plates-formes sont-elles responsables de la désaffection des salles ?

Elles sont un symptôme actif de la ghettoïsation du cinéma, qui risque à terme de ressembler à l’opéra. Imaginer une cohabitation « gagnant-gagnant » entre les salles et les services de streaming, c’est s’illusionner. Les plates-formes obéissent à une logique purement industrielle et impérialiste : elles veulent toucher toutes les minorités et les sensibilités possibles, sans jamais les heurter. Elles reprennent l’idée des nababs hollywoodiens selon laquelle un succès ne peut naître que d’un succès précédent. D’où le recours aux remakes, aux adaptations littéraires, aux vedettes établies, aux sujets porteurs…

Qu’est-ce qui les différencie d’Hollywood ?

Les plates-formes veulent se débarrasser des producteurs. Des proches qui ont collaboré avec Netflix m’ont raconté à quel point les équipes internes imposent leurs vues, à l’approche du montage, en pondant des mémos de trente pages sur le moindre détail. Ça doit à tout prix devenir un produit Netflix.

L’audace, que vous appelez de vos vœux, doit-elle être le fer de lance ?

Le nerf de la guerre, ce sont les producteurs. Un cinéaste voudra toujours réaliser quelque chose de sincère, de valable. Ce sont les producteurs qui peuvent faire la différence, de sorte que notre industrie soit aussi un art. La filière doit les encourager à prendre des risques. Or la figure des grands producteurs disparaît. Durant l’âge d’or d’Hollywood, certains étaient tarés, voire sadiques, mais ils avaient une vision, une personnalité. Netflix leur substitue l’algorithme.

La France manquerait de grands producteurs ?

Le cinéma français s’est développé dans la conscience aiguë de résister à l’impérialisme américain. Il doit sa vitalité au principe même du CNC : ponctionner l’argent des films à succès pour le réinjecter dans d’autres qui ne sont pas tenus à la rentabilité. Le cinéma, ça a toujours été 90 % de reproduction et 10 % de production. La majorité de la filière capitalise sur le succès, en s’appuyant sur des recettes éprouvées. Nous ne devons pas courir derrière les mêmes invariants qu’Hollywood ou que Netflix, mais continuer de soutenir ceux qui, au contraire, créent des prototypes.

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