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Assises du Bas-Rhin. Jean-Christophe Karcher : « Je m’interdis de pleurer devant la cour »

Me Mootoosamy : « Il est en train de prendre conscience »

« C’est comme s’il était sidéré par tout ce qu’il a commis, décrypte son avocate, Me Gaëlle Mootoosamy. Il est en train de prendre conscience. Pour lui, c’est violent. » Vendredi après-midi, elle l’a interrogé sur son apparente absence d’émotion. « Je m’interdis de pleurer devant la cour parce que c’est pas mon cas qui est important ici, a indiqué l’accusé. J’ai pas envie qu’on s’apitoie sur mon sort. » « Vous êtes insensible ? », a poursuivi Me Mootoosamy. « Évidemment pas. Je suis effondré. Mais ça n’intéresse personne. Je suis là pour être jugé, condamné pour ce que j’ai fait. Ça s’arrête là. »

Une dizaine de victimes, dont les deux filles de Jean-Christophe Karcher, doivent encore être entendues en début de semaine prochaine. Trois parmi elles accusent l’ancien animateur scout de les avoir pénétrées digitalement, des viols qu’il a jusque-là toujours contestés.

Pendant les quatre ans qu’il a été incarcéré, Jean-Christophe Karcher n’a eu accès qu’aux procès-verbaux du dossier d’instruction. Il y a lu la manière dont ses 34 victimes ont décrit ses passages à l’acte , à son domicile de Niederroedern (« jeu du requin » dans la piscine, toilettes intimes sous la douche, massages dans la chambre parentale), ou en camp scout. Il a eu accès aux retranscriptions du traumatisme protéiforme que ressentent toutes ces jeunes filles agressées avant leur puberté, et qui les poursuit encore aujourd’hui.

Tout cela était de la matière froide, des mots couchés sur du papier. Dans la salle de la cour d’assises du Bas-Rhin, où il comparaît depuis le 3 octobre, Jean-Christophe Karcher expérimente une brutale confrontation au réel. Assis dans le box, la tête souvent baissée, il est le spectateur forcé d’un émouvant défilé, parsemé de larmes. Celui de ces jeunes femmes plus courageuses les unes que les autres , qui savent que la déposition à la barre participe au travail de reconstruction.

« Depuis une semaine, j’ai l’impression de vivre une descente aux enfers »

Le président Antoine Giessenhoffer, qui s’adresse à elles toujours avec bienveillance – « vous avez pu tout dire ? » –, les aide dans cette épreuve. Leurs avocats aussi. Et puis il y a Orphée, la chienne d’assistance judiciaire , jamais loin pour recevoir un câlin qu’elle rend instantanément au centuple.

L’accusé doit encore écouter « l’onde de choc » qu’ont vécue les dizaines de parents – ce sont principalement les mamans qui viennent témoigner à l’audience – en apprenant que leur fille était « passée entre ses mains ». « Depuis une semaine, j’ai l’impression de vivre une descente aux enfers, résume une mère. Je vois ici des petites que j’ai vu grandir depuis l’âge de 4 ans, que j’ai vu s’épanouir, parfois se détruire. Entendre leur souffrance, la souffrance des parents… C’est dur. »

Après avoir formulé des excuses mal perçues par les parties civiles, l’ex-enseignant du collège de Seltz a voulu dire ses regrets autrement. « Je suis dévasté de toute la douleur que j’ai provoquée », a-t-il soupiré, sans cacher un certain abattement. Me Michaël Plançon n’a pas laissé passer : « Monsieur Karcher, ce sont les victimes qui sont dévastées. »