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Au Pakistan, un groupe taliban suspecté d’un nouveau massacre

Le bilan n’était encore que provisoire ce lundi en début de soirée mais il était d’ores et déjà le plus lourd infligé à Peshawar (dans le Nord-Ouest pakistanais) depuis près d’un an. Au moins 41 personnes ont été tuées, et près de 150 blessées, par un kamikaze qui s’est infiltré ce lundi matin dans la mosquée du quartier général de la police, censément la zone la plus protégée de la ville, où sont installées différentes agences de sécurité et du gouvernement. Les victimes sont en grande majorité des policiers. Selon le ministre de la Défense, Khawaja Muhammad Asif, le kamikaze s’était placé au premier rang.

Dans l’attente d’une revendication officielle, deux groupes figurent parmi les principaux suspects. L’Etat islamique au Khorasan (EI-K), auteur d’un attentat contre une mosquée chiite en mars qui avait fait au moins 58 morts et 200 blessés, ou les talibans pakistanais (Tehreek-e-Taliban Pakistan, TTP), qui, après avoir négocié une brève trêve avec le gouvernement l’été dernier, ont relancé une campagne sanglante dans le Nord-Ouest et à Islamabad. D’après un tweet de revendication de l’un de leurs commandants, Sarbakaf Mohmand, ce serait le TTP qui serait le responsable de l’attaque de lundi à Peshawar.

Islamabad en porte-à-faux

Apparu en 2005 dans les zones tribales du Waziristan, le groupe est un agrégat de formations sunnites ultraradicales liées à Al-Qaeda, qui ont en commun de vouloir transformer le Pakistan en émirat. Il a commis depuis des milliers d’attaques, contre des policiers et des soldats, dont un massacre à l’école militaire de Peshawar le 16 décembre 2014 qui avait tué plus de 130 élèves, mais aussi contre des civils. A l’époque, lorsque le gouvernement pakistanais a lancé une vaste offensive, il a trouvé une base arrière de l’autre côté de la frontière, en Afghanistan.

Le retour au pouvoir des talibans afghans le 15 août 2021 à Kaboul lui a largement profité. Les deux organisations sont distinctes, mais liées. Les talibans pakistanais ont aidé leurs homologues afghans contre les forces américaines et de l’Otan. Des centaines de leurs hommes ont été libérés des prisons afghanes lors de l’offensive talibane du printemps et de l’été 2021. Renforcé, quasi libre de ses mouvements en Afghanistan, le TTP compterait aujourd’hui entre 3 000 et 4 000 combattants, selon le comité des sanctions de l’ONU.

Le Premier ministre pakistanais, Shahbaz Sharif (à droite), au chevet d'un blessé dans l'attaque de Peshawar, ce lundi. (Prime Minister's Office/Reuters)

Il n’a pas tardé à utiliser cette force contre le gouvernement pakistanais, multipliant assassinats et attentats. Islamabad est en réalité mis en porte-à-faux. Une partie de ses services de renseignement militaires a soutenu et protégé les talibans afghans lorsqu’ils combattaient l’Otan, permettant à leurs commandants de se retirer au Pakistan pour se cacher ou se faire soigner, et à leurs dirigeants de s’y baser. «Les autorités pakistanaises ont donné le bâton pour se faire battre. Elles ont aidé les talibans afghans en pensant qu’elles contrôleraient le pays. Mais maintenant, ce sont les talibans pakistanais qui les attaquent en profitant d’un sanctuaire en Afghanistan. Je ne vois pas comment on peut les plaindre», résume un diplomate occidental.

Demandes «provocantes et infondées»

Alors que les incidents à la frontière sont réguliers, le ministre de la Défense pakistanais a accusé publiquement début janvier les talibans afghans de laisser opérer le TTP et de lui permettre de lancer des attaques au Pakistan. Quelques jours plus tôt, dans une interview à la chaîne Express TV, le ministre de l’Intérieur, Rana Sanaullah, avait demandé aux autorités de Kaboul de démanteler les bases du TTP et de livrer leurs combattants au Pakistan, sous peine de représailles.

Dans un communiqué, le ministère afghan de la Défense avait vertement rejeté ces demandes qualifiées de «provocantes et infondées». «Comme toujours, nous sommes prêts à défendre l’intégrité territoriale et l’indépendance de notre pays, et l’on peut remarquer que nous avons une meilleure expérience que quiconque dans ces domaines.» Lundi, le Premier ministre pakistanais, Shahbaz Sharif, a promis «d’agir sévèrement» contre les responsables de l’attentat contre la mosquée à Peshawar. «Ceux qui combattent le Pakistan seront éliminés de la surface de la Terre.»