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Au Parlement européen, les ubérisés bientôt salariés ?

La lutte paie. Le Parlement européen doit voter, le 2 février, à Bruxelles, un projet de directive qui accordera davantage de droits aux travailleurs de plateforme. 28 millions de personnes sont concernées dans l’Union européenne (UE), recouvrant une palette très hétérogène de métiers : chauffeurs de VTC, livreurs, personnels de ménage, etc. Mais aussi une multiplicité de statuts : autoentrepreneur, artisan ou salarié précaire.

Sous la pression des syndicats et des députés de gauche, la Commission a présenté en décembre 2021 une proposition de directive. Principale avancée : la reconnaissance de la présomption légale de salariat. Celle-ci est établie, selon le texte de la Commission, dès lors que deux critères sont remplis : l’employeur fixe le niveau de rémunération, fixe des règles « en matière d’apparence », supervise « l’exécution du travail », limite l’organisation individuelle du travail ou la capacité du travailleur à « se constituer une clientèle ou à exécuter un travail pour un tiers ». Cela permettrait d’éviter le fléau des faux indépendants, salariés de fait car soumis à un lien de subordination avec la plateforme, mais sans les avantages afférents (Sécurité sociale, droit du travail, etc.).

Un projet qui contredit l’ambition de la Macronie

Le Parlement a amendé la proposition de la Commission. Mais son texte veut aller plus loin. « Nous souhaitons une présomption de base », explique Leïla Chaibi, députée européenne France insoumise. Dans la version que devrait voter l’Assemblée, ce ne serait plus au travailleur de demander d’être reconnu comme salarié ; il reviendrait aux plateformes de montrer qu’elles mettent effectivement en relation de véritables travailleurs indépendants et leurs clients. C’est le cas de certaines d’entre elles qui ne font que prendre des rendez-vous en ligne, comme Doctolib. Avec le texte du Parlement, un faux indépendant peut ainsi contester sa qualification et exiger d’être reconnu comme salarié. Un syndicat peut faire de même. Dès lors, « la présomption s’applique », selon l’amendement des députés. Charge à l’employeur de la réfuter.

Si le texte issu de la commission Emploi est bien voté en plénière ce jeudi, s’ensuivra un « trilogue » : des négociations pour aboutir à un texte commun entre la Commission, le Parlement et les États. Certains d’entre eux veulent amoindrir la portée du texte. C’est le cas de pays de l’Est, mais aussi de la France. Le gouvernement a freiné des quatre fers l’adoption de ce projet qui contredit l’ambition de généralisation des start-up, au cœur du projet macroniste.

« Dans la négociation, l’opposition est davantage venue des libéraux que de la droite », souligne Leïla Chaibi, qui reconnaît que « certains à droite sont contre la concurrence déloyale » et peuvent trouver un terrain d’entente avec la gauche. Il faut dire que certaines entreprises traditionnelles se trouvent en compétition avec les plateformes qui ne respectent pas le droit du travail. L’évolution législative est également appuyée par de nouvelles plateformes qui ont fait le choix du salariat et sont victimes du dumping de ces dernières, qui font mine d’embaucher des indépendants.