Dans un entretien au « Monde », le cinéaste allemand Christian Petzold raconte comment il a fabriqué « Le Ciel rouge », conte rohmérien très contemporain, en laissant toute leur place à de jeunes acteurs.
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A quoi voit-on qu’un cinéaste « vieillit » bien, sur un plan esthétique ? On n’a pas posé cette question à Christian Petzold, né en 1960, figure de proue du cinéma d’auteur allemand, mais il a lui-même fourni une réponse, en évoquant le quatuor de jeunes acteurs qui insuffle une énergie et une liberté rares dans son dixième long-métrage, Le Ciel rouge, deuxième volet de la trilogie ouverte avec Ondine (2020). Dans ce film d’été rohmérien, où il n’est jamais question d’amour dans les dialogues, alors que le désir circule de toutes parts, une prouesse se joue du côté des comédiens, et du lâcher-prise que le cinéaste a réussi à leur accorder.
« Le Ciel rouge » revisite les contes d’Eric Rohmer, tout en affrontant l’époque contemporaine, qui n’a plus la même légèreté. Comment le récit est-il venu ?
Quand j’ai commencé à écrire le scénario, j’étais dans un état de tristesse lié au confinement. J’avais la sensation que la vie nous était fermée, comme tous les lieux. J’avais aussi la fièvre due au Covid-19, je somnolais vingt-quatre heures sur vingt-quatre et, dans cet état, je me sentais très, très proche du cinéma. J’ai découvert pendant cette période l’œuvre d’Eric Rohmer [1920-2010], et j’y ai retrouvé la vie dont on était exclus. Les films d’été sont une sorte d’éducation sentimentale, où l’on apprend par nos erreurs, par nos lâchetés, mais tout cela est humain et beau. Le Ciel rouge célèbre l’été et, en même temps, pointe la tragédie des feux de forêt, avec l’idée que de tels étés ne vont peut-être plus exister longtemps.
J’avais une idée théorique : tous les films d’été se ressemblent, au fond, mais chacun est différent à sa manière. Les films d’été américains – il y en a des milliers – montrent souvent des jeunes qui partent en forêt en voiture, pour vivre dans une cabane, et trouvent en chemin l’horreur avec des monstres, des fous… Les films d’été français sont différents, avec des histoires de rencontres amoureuses. Tous ont en commun une profonde humanité.
On sent dans votre film des lignes de déplacement entre la maison, la forêt, la plage. Comment travaillez-vous cette chorégraphie ?
Dans les romans de Jules Verne, il y a souvent, en prologue, des cartes : la mer, une caverne, l’endroit où les cannibales mangent leurs victimes, etc. J’ai donc eu l’idée d’un monde imaginaire, avec une maison remplie de fenêtres et de portes, laissant la possibilité d’observer l’autre. Je construis le décor en amont, comme un terrain de jeu pour les acteurs. Puis, quand ils commencent à jouer et à trouver leurs cheminements, à ce moment-là, seulement, je peux fixer la position de la caméra.
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