France
This article was added by the user . TheWorldNews is not responsible for the content of the platform.

Comptes de campagne : «On ne prétend pas en toute certitude que ce qu’on nous a répondu est vrai»

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) rend publiques ce vendredi ses décisions concernant les comptes des candidats à la présidentielle 2022. Aucun n’a été rejeté. Ils seront rendus consultables en mars. Pour Jean-Philippe Vachia, président de cette instance de contrôle, le législateur devrait réfléchir à un changement des règles de remboursement.

Sur le plan financier, la présidentielle de 2022 a-t-elle été une campagne propre ?

On peut déjà regarder la masse de la dépense électorale : 83 millions d’euros au total, c’est un peu plus qu’en 2017, mais on reste quand même dans des niveaux de dépenses qui n’ont rien d’exorbitant. Après le pic de 2012, franchi «toutes catégories» par Nicolas Sarkozy, nous sommes revenus à des niveaux de dépenses électorales qui restent, par rapport au plafond de dépenses autorisées, raisonnables. Une autre caractéristique de ce scrutin, c’est que, par l’effet du seuil des 5 %, deux candidats qui pensaient atteindre ce palier, à savoir Yannick Jadot et Valérie Pécresse, n’ont pas eu droit au remboursement de 8 millions d’euros [auquel ils auraient pu prétendre, ndlr]. Ils ont obtenu «seulement» 800 000 euros. Cela peut avoir un effet déstabilisant. C’est problématique. A l’origine, l’idée du législateur consistait à dire qu’il prenait en charge une partie significative des dépenses des candidats. On pourrait imaginer avoir un seuil dégressif. Ce serait beaucoup mieux.

Etes-vous pour un changement législatif ?

Nous pouvons avoir le débat. On peut très bien garder le système actuel, mais notre rôle est aussi d’attirer l’attention sur ces sujets. Il y a des «petits» candidats qui ne se font aucune illusion : Philippe Poutou, Nathalie Arthaud, Nicolas Dupont-Aignan, Jean Lassalle, dont le budget tourne autour des 800 000 euros [soit le plafond de remboursement minimum]. Mais, par exemple, pour Anne Hidalgo et Fabien Roussel, dont les budgets sont de 3,7 millions et 4 millions, on constate un changement radical dans leur campagne à partir du moment où le risque devient plus grand de ne pas dépasser les 5 %. Pour en revenir à Yannick Jadot et Valérie Pécresse, on se retrouve, à la fin, avec des appels aux dons des particuliers, soit encaissés par le parti, soit par le candidat, qui donnent droit à un avantage fiscal aux donateurs [donc payés en partie par l’Etat].

Dans vos décisions, après des réponses de certains candidats sur des questions de potentielles irrégularités, vous précisez que vous ne disposez pas d’«éléments de nature à remettre en cause» ces réponses. Manquez-vous de moyens dans vos investigations ?

Cela veut dire qu’on ne peut pas aller plus loin. Mais on ne prétend pas urbi et orbi et définitivement et en toute certitude que ce qu’on nous a répondu est vrai… Nous avons voulu être clairs vis-à-vis de l’opinion publique, sur ce que nous pouvons faire, et sur ce que nous ne pouvons pas faire. Dans le cas de certains, il faudrait des moyens – que nous n’avons pas – pour vérifier la véracité de certains faits.

Votre commission aura-t-elle un jour une équipe d’enquêteurs de terrain ?

Le sujet, ce n’est pas d’avoir des enquêteurs physiques. Il y a besoin de moyens juridiques. Vous mettriez 100 enquêteurs, s’ils n’ont pas de pouvoirs de police judiciaire, ils ne peuvent rien faire. Ces agents auraient besoin de pouvoirs d’investigation. Mais nous deviendrions un service d’enquête et cela changerait complètement la nature de ce que nous serions. N’oublions pas que nous, notre métier premier, c’est d’approuver les comptes, et d’octroyer le remboursement dans un délai de six mois. Après, il y a le temps des investigations judiciaires qui peut prendre des années. Pour vous donner un exemple : à la suite de l’élection présidentielle de 2017, nous avons saisi la justice du cas Mélenchon, et l’enquête est aujourd’hui toujours en cours.

Pour cette fois, avez-vous saisi ou prévu de saisir la justice pour un candidat en particulier ?

Je ne répondrai pas à cette question.