France
This article was added by the user . TheWorldNews is not responsible for the content of the platform.

Crise énergétique : ce que contient le plan de sobriété du gouvernement

Logement, entreprises, commerces... Des dizaines de mesures d'économie d'énergie touchent de nombreux domaines. Le Figaro fait le point sur les principales.

«Mobilisation générale» : le mot est lancé. Face à un hiver qui s’annonce difficile sur le plan énergétique, le gouvernement a enfin levé le voile sur son fameux plan de sobriété énergétique, ce jeudi. Massif, celui-ci comprend des dizaines de mesures, qui relèvent du bon sens pour la plupart et qui touchent de nombreux aspects de la société comme de l’économie, du logement aux transports, en passant par l’industrie, les entreprises, l’État, le numérique, la culture et les collectivités territoriales.

Tous les acteurs sont impliqués dans ce «défi» de la sobriété, que la première ministre résume en une formule simple : «des économies choisies plutôt que des coupures subies». Un changement de mentalité qui doit s’appliquer cet hiver, mais qui devra aussi s’inscrire dans le temps long, pour «baisser de 10 % notre consommation d’ici 2024», selon Élisabeth Borne. Le Figaro fait le point sur les principales mesures contenues dans le plan, qui a mobilisé neuf ministères et représente «un potentiel de réduction de consommation de l’ordre de 50 TWh».

À VOIR AUSSI - Sobriété énergétique: «Si on se mobilise tous», «on passe l'hiver», assure Emmanuel Macron

Les engagements communs

Le plan comprend tout d’abord une série d’engagements que tous les acteurs ont accepté. Le chauffage des «locaux à usage d’habitation, d’enseignement, de bureaux ou recevant du public» doit être établi à 19 degrés, et la climatisation à 26 degrés. Lorsqu’ils sont inoccupés, ces espaces doivent baisser le chauffage à 16 degrés, voire 8 degrés, lorsqu’ils sont laissés vides plus de deux jours. Le gouvernement veut également lancer une concertation pour accélérer la généralisation de l’obligation d’installer un système d’automatisation et de contrôle des bâtiments (BACS) à «tous les bâtiments tertiaires équipés de chauffage ou de refroidissement d’une puissance supérieure à 70kW» pour éviter le gaspillage énergétique. De même, il est suggéré d’arrêter les systèmes de ventilation dans les locaux d’entreprise inoccupés, par exemple le soir ou les week-ends, d’entretenir le matériel et d’isoler les réseaux d’eau.

Le gouvernement souhaite à nouveau mettre l’accent sur le télétravail, «un gisement d’économies d’énergie sur les transports et pour les bâtiments lorsqu’il est bien organisé», notamment car il permet des économies de carburant et de chauffage dans les bâtiments d’entreprise. «Certains services de l’État expérimenteront le télétravail en fermant les bâtiments pour mesurer précisément les économies réelles de chauffage», précise le document de synthèse du plan de sobriété. Ces bâtiments mèneront l’expérimentation pendant quatre jours, du 29 octobre au 1er novembre inclus. Par ailleurs, en cas de tension particulière sur le réseau, c’est-à-dire en cas de signal ÉcoWatt rouge, l’État entend préparer avec les partenaires sociaux un renforcement du télétravail, avec fermeture des bâtiments concernés.

À lire aussiUn hiver sous le signe de la sobriété énergétique : à quoi va ressembler la vie de bureau ?

Parallèlement, les employeurs doivent participer au déploiement des modes de transport alternatifs à la voiture, en participant à l’extension du forfait mobilités durables. L'employeur pourra aussi prendre en charge plus largement le forfait de transport en commun ou de service public de vélo : jusqu’à la fin d’année prochaine, la prise en charge «jusqu’à 75% sera exonérée d’impôt sur le revenu et de cotisations pour les salariés».

Le covoiturage sera aussi encouragé, avec un «soutien spécifique» aux opérateurs pour «chaque nouveau client», en échange de moyens incitatifs pour les Français qui souhaiteraient s’y essayer. «Une aide renforcée au covoiturage sera mise en place à partir du 1er janvier 2023», apprend-on également. Enfin, pour les déplacements professionnels, les employeurs devront privilégier le train plutôt que la voiture ou l'avion, recourir à la visioconférence et préférer les déplacements «regroupés par zones».

Pour les commerces et les établissements recevant du public

La chasse aux dépenses énergétiques superflues va fortement concerner les commerces et leurs pratiques publicitaires. Les cafés et restaurants à la fin du service ou encore les hôtels devront s’engager à éteindre leurs enseignes entre minuit et 6h du matin.

Plus largement, les publicités lumineuses seront désormais interdites entre 1h et 6h du matin en France, exception faire des aéroports, gares ou stations de métro, conformément à un arrêté paru ce jeudi matin au Journal officiel.

Sur le plan du chauffage, les salles de restaurant, les chambres et salles inoccupées, les couloirs et réceptions et les salles de sport devront baisser la température à 17 degrés lorsque les clients ne sont pas présents. Les piscines aussi seront mises à contribution, avec une baisse demandée de 1 degré pour les piscines intérieures et extérieures, les saunas et les hammams. Concrètement, la limite sera de 31 degrés pour la température des piscines ludiques et baisse de 33 degrés pour les bassins de soins.

Logement : limiter le chauffage

Le gouvernement va étendre l’obligation d’installer un programmateur de chaudière intelligent à tous les bâtiments : si les nouveaux bâtiments résidentiels étaient concernés d’ici 2025, ce sera bientôt aussi le cas pour tout le résidentiel ou tertiaire existant. Les immeubles chauffés collectivement, et dont la période de chauffe s’étend traditionnellement du 15 octobre au 15 avril sont aussi encouragés à décaler celle-ci de quinze jours. Un moyen de réduire la période totale d’un mois, de quoi «générer un gain d’environ 12% sur la consommation de chauffage».

Comme Le Figaro l’expliquait mercredi, la période de chauffe des ballons d’eau chaude est aussi décalée, via Enedis, hors de la période entre 8h et 13h, afin de privilégier une mise en route la nuit. Les consommateurs sont invités à réduire leur consommation d’eau chaude sanitaire.

Autre mesure, l’exécutif invite à individualiser les frais de chauffage, dans les immeubles chauffés collectivement. Une mesure d’équité, justifie-t-on : «Les syndicats de copropriété seront sensibilisés à l’intérêt de programmer l’individualisation des frais de chauffage à l’occasion de l’élaboration des plans pluriannuels de travaux (PPT), dont l’élaboration sera obligatoire dans toutes les copropriétés entre 2023 et 2025». Le gouvernement veut aussi accélérer le changement des chaudières à fioul chez les particuliers, en prolongeant les aides accordées jusqu’au 31 mars 2023.

Une quinzaine d'engagements pour les entreprises

Les entreprises seront pour leur part encouragées à travailler sur une quinzaine de mesures d'économie d'énergie différentes, à l’issue d'un travail réalisé par les partenaires sociaux et dont le Medef a rendu les conclusions. Parmi elles, éteindre l'éclairage intérieur «des bâtiments dès l'inoccupation, réduire l'éclairage extérieur, notamment publicitaire, et l'éteindre au plus tard à 1h, piloter chauffage, climatisation et ventilation ou encore regrouper les déplacements et supprimer ceux inutiles».

Les entreprises qui s'engagent à mettre en œuvre ces mesures seront référencées sur un site internet dédié. Selon le gouvernement, «plus de 30 entreprises» du CAC40 s'y sont d'ores et déjà engagées.

À lire aussiSobriété énergétique : qui contrôle le chauffage dans les bureaux ?

Transport : «écoconduite» et «verdissement»

Outre des mesures visant à moins consommer en gares via l’installation d’éclairages peu énergivores, de minuteurs et de détecteurs de mouvement, les opérateurs ferroviaires sont invités à consommer moins, notamment via «l’écoconduite des trains». De même, la consommation énergétique dans les aéroports doit être limitée, en optimisant les «besoins en chauffage et climatisation», et les avions doivent réduire leur consommation de kérosène, au sol comme en vol, par exemple en optimisant les trajets ou en ayant recours «à l’énergie électrique lorsque l’avion est au sol».

Les acteurs du secteur des transports doivent aussi accélérer le «verdissement» des flottes de véhicules, en particulier dans le domaine aérien, où les gains espérés sont substantiels : «Avec certaines ruptures technologiques, la prochaine génération d’appareils pourrait livrer des gains d’efficacité [...] de l’ordre de 25 à 30 %», chiffre l’exécutif.

Des objectifs pour l'État

L'État employeur s'engage à limiter ses températures, y compris le chauffage, qui pourra passer à 18 degrés les jours Ecowatt rouge, lorsque la tension sera extrême sur le réseau. Sur le terrain, il sera aussi possible de supprimer l'eau chaude sanitaire, si les conditions sont réunies. Cette mesure ne concernera pas toutefois «les usages pour lesquels l'eau chaude est indispensable». Ce mois-ci, l'exécutif lancera également un «nouveau programme» doté de 150 millions d'euros pour financer des travaux à gains rapides sur les bâtiments. Autre mesure phare, le télétravail sera encouragé pour les agents, «avec une approche très décentralisée» : les travailleurs vont ainsi bénéficier «d'une augmentation de l'indemnité forfaitaire de 15%», afin de couvrir la hausse des prix de l'énergie, début 2023.

Une «task force opérationnelle» d'énergéticiens et de techniciens va aussi être déployée pour «améliorer la gestion énergétique des sites et bâtiments de l'État». Objectif : accompagner les opérateurs et baisser la consommation. L'État mobilisera aussi des “ambassadeurs sobriété”, dans chaque bâtiment.

D'autres mesures touchent les déplacements professionnels des agents : la vitesse sera limitée à 110km/h sur l'autoroute et à 100km/h sur les voies rapides, l'utilisation du vélo sera encouragée par des «stationnements sécurisés» près des bâtiments publics, et l'avion devra être évité «pour les trajets allers inférieurs à 4 h par voie ferroviaire (ou inférieur à six heures de trajet aller-retour si le déplacement se fait dans la même journée)».

Des efforts pour le secteur du sport et de la culture

Les compétitions sportives devront être plus sobres, avec une réduction demandée de 50% du temps d’éclairage avant et après les matchs pour les compétitions qui ont lieu en journée, et de plus de 30% pour les matchs en soirée. Un dispositif concerté avec la Ligue de football professionnel, de la Ligue nationale de rugby, les clubs professionnels et les diffuseurs TV.

La Fédération française des cinémas a elle aussi présenté un plan de sobriété, qui prévoit l’extinction des enseignes des cinémas lorsqu’ils ne sont pas ouverts, l’extinction des salles lorsqu’elles ne sont pas occupées par des spectateurs, ou encore l’extinction des machines qui ne servent pas, comme les projecteurs ou les ventilations la nuit.

Les collectivités locales s'engagent

Un guide de «10 actions» a été publié par l'Association des maires de France (AMF). Parmi les mesures proposées, les édiles sont invités à éteindre l'éclairage public entre 23h et 5h30, à chauffer les bâtiments à 19 degrés maximum, à éteindre l'éclairage des monuments et à réduire la saison de chauffe des locaux. L'éclairage Led doit aussi être généralisé et les élus sont mis à profit pour faire respecter l'interdiction des publicités lumineuses et enseignes, la nuit. L'État va aussi accompagner financièrement les acteurs publics locaux pour rénover les bâtiments.

Les data centers et opérateurs du numérique à la diete

Dans le domaine numérique, les data centers sont appelés à diminuer la climatisation, et les acteurs des télécoms devront définir «les critères d’un paramétrage des box internet et des décodeurs TV pour une mise en veille en cas de non-utilisation». De même, les calculs les plus poussés, fortement énergivores, devraient être réalisés en dehors des pics de consommation, estime l’exécutif, qui va échanger avec les acteurs concernés.

Une campagne de communication en vue

L'exécutif veut sensibiliser les Français, en lançant une campagne de communication dès le 10 octobre, autour d'un slogan simple : «je baisse, j'éteins, je décale». Cinq gestes seront mis en avant : réduire le chauffage à 19 degrés tout au plus, prendre des douches moins longues et moins chaudes, éteindre les appareils plutôt que de les laisser en veille, privilégier un thermostat programmable et décaler l'usage de certains appareils énergivores en dehors des plages horaires les plus tendues.

Cette campagne sera opérationnelle jusqu'en février prochain. Elle se déploiera avec un film générique et cinq autres, plus courts, focalisés sur les différents gestes à privilégier. Le gouvernement veut cibler large, en la diffusant dans la presse, sur les réseaux sociaux et à la radio. L'État invite également les Français à télécharger l'outil Ecowatt, afin d'adapter sa consommation électrique à l'état du réseau.