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De l’aérien à l’espace, Sophie Adenot la nouvelle astronaute française qui garde les pieds sur terre

"Cela demande du rêve, beaucoup de travail et un peu de chance !" Humble, Sophie Adenot, 40 ans, a douté jusqu'au bout. Après un an et demi de sélection, elle a finalement été retenue par l'Agence spatiale européenne (ESA) pour devenir astronaute de carrière. Cinq titulaires ont été choisis ainsi que onze réservistes, sur plus de 23.000 candidatures reçues. "C'est complètement dingue !", reconnaissait-elle encore ce lundi 5 décembre sur la base aérienne de Cazaux en Gironde.

Ce rêve de l'exploration spatiale, elle ne sait pas d'où il vient. Mais alors que son grand-père était mécanicien dans l'armée de l'air, plusieurs déclics ont ensuite jalonné sa vie. "Je me suis nourrie de Marie Curie. C'est mon premier déclic. J'ai toujours été fascinée par les explorateurs de l'espace et des fonds marins", assure Sophie Adenot. Puis il y a eu le déclic d'une figure féminine : Claudie Haigneré, première femme européenne à être allée dans l'espace en 1996. "C'est un marqueur majeur dans ma vie. J'ai eu envie de cheminer vers cela, et brique par brique, cela s'est fait", témoigne Sophie Adenot.

"Je suis en bas de l'Everest"

Mais elle n'a ni la tête dans la lune ni les pieds sur Mars. Elle garde les pieds sur Terre :

"Je suis en bas de l'Everest et je ne connais, à ce stade, qu'une seule date : le 3 avril quand débuteront les cours à Cologne, en Allemagne. Je vais repartir à l'école avec mes cahier et mes classeurs", annonce-t-elle.

Au programme : une formation de trois ans, dont une année au cours de laquelle elle va apprendre la mécanique spatiale, les systèmes orbitaux, tout le socle de connaissances de bases pour pouvoir opérer dans la station spatiale internationale (ISS). Suivra l'entrainement avant l'assignation à une mission, puis le travail sur les expériences confiées. Pour le reste, pas de date. Le première mission à bord de l'ISS pourrait intervenir en 2026 ou plus tard. "Thomas Pesquet n'est parti que sept ans après sa sélection", rappelle Sophie Adenot.

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La soif d'apprendre

Car elle doit tout apprendre de son nouveau métier d'astronaute. Mais ça tombe bien : apprendre, elle adore ça, les défis aussi. Diplômée de l'école d'ingénieur Isae-Supaero de Toulouse, la même que Thomas Pesquet, où elle se spécialise dans la dynamique de vol des engins spatiaux et des avions, Sophie Adenot complète ses études par un master au MIT de Boston. Puis elle entre chez Airbus Helicopters où elle travaille, pendant un an, à la conception de cockpits d'hélicoptères. Mais elle quitte très vite les bureaux d'études pour rejoindre le terrain.

Sophie Adenot intègre ainsi l'armée de l'air en 2005 et se forme au pilotage. En 2019, elle devient la première femme pilote d'essai d'hélicoptères, au Centre d'essai en vol de la base aérienne de Cazaux, en Gironde. Celle qui a désormais le grade de lieutenant-colonel totalise 3.000 heures de vol. "Il y a ici des gens passionnés et des pointures de l'aéronautique", assure Sophie Adenot qui aura finalement passé huit ans à Cazaux, en deux étapes.

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"Nous sommes là pour emmener l'Europe"

Aujourd'hui, cette sélection provoque "un grand boom" dans sa vie, mais elle s'y prépare. "À la direction générale de l'armement (DGA), nous avons appris à faire face à l'inconnue et aux crises", assure Sophie Adenot. Parmi les autres qualités requises, figure l'indispensable esprit d'équipe. "Il a été regardé de très près pendant la sélection. Nous avons été poussés dans nos retranchements." Ainsi quand un astronaute partira en mission, peu importe qu'il s'agisse d'elle ou d'un autre. "Il y a un esprit de corps. Nous sommes là pour emmener l'Europe", déclare-t-elle.

L'adaptabilité et la pluridisciplinarité font également partie des pré-requis. "Dans l'équipe, les profils sont très différents. Il y a une astrophysicienne, un ingénieur biomédical mais aussi un médecin urgentiste." Sa touche à elle ? Outre la pratique de la plongée en bouteille ou en apnée qui nécessite une certaine préparation mentale, elle est aussi professeure de yoga. "Je ne sais pas ce qui sera transposable dans l'espace", s'amuse-t-elle.

Ambassadrice

En attendant, celle qui parle quatre langues -français, anglais, espagnol, russe- se plie aisément au jeu médiatique "qui fait partie du job" et s'apprête à endosser son rôle d'ambassadrice. "Ambassadrice de la science et de la technique auprès des jeunes et des moins jeunes", se réjouit-elle. Et de citer quelques chiffres auxquels elle tient en tant que scientifique :

"Dans l'ISS, un astronaute utilise cinq litres d'eau par jour, contre 100 litres pour un habitant sur Terre. Tout est recyclé, même l'urine. Demain, ces technologies seront peut-être dans nos maisons."

Déjà marraine d'un dispositif d'égalité des chances créé par l'Institut supérieur de l'air et de l'espace, elle se réjouit aussi que le voyage spatial de l'Italienne Samantha Cristoforetti, devenue récemment la première Européenne à prendre les commandes de l'ISS, ait entraîné une hausse de 15% des inscriptions dans les filières scientifiques et techniques. "Derrière ce rôle d'ambassadrice, il y a du concret", insiste Sophie Adenot.

Son style ? Elle ne le connait pas encore, mais cela passera nécessairement pas les émotions. "Qu'il s'agisse de belles images, de musique, de poésie ou d'expériences scientifiques, la transmission se fait par les émotions." Et elle prévient d'ores et déjà : "La dune du Pilat, vous pouvez vous attendre à ce que je la photographie !"

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