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«De la peinture sur un tableau suscite plus de réactions qu’un rapport du Giec»

Le centre Pompidou a organisé la semaine dernière trois jours de débats pour s’interroger sur les liens entre transition écologique et transition culturelle. Retrouvez tribunes, interviews et enquêtes dans le dossier thématique dédié à l’événement. Ainsi que les articles des étudiants journalistes de l’IPJ Dauphine venus couvrir le forum pour Libération.

Quelle place pour l’art à l’heure du réchauffement ? Comment vivre la culture dans un monde qui se dérègle sous nos yeux ? Pour Emmanuel Tibloux, directeur de l’Ecole nationale supérieure des arts décoratifs, les musées ont un rôle essentiel : «Le musée incarne notre rapport à l’esthétique, à la valeur, nos représentations, ce qui doit donner lieu à notre plus grande transformation : notre culture.» Face à lui pour ce débat, sous les néons roses de la grande salle du centre Pompidou, Elen, une jeune «bifurqueuse», militante du mouvement Dernière Rénovation, a quitté son travail d’architecte pour être du côté de l’action. L’un, représentant d’une institution, appelle à une transformation des esprits : «Nous formons des artistes, des designers, des concepteurs de notre environnement.» L’autre, activiste, alerte sur l’impératif d’agir vite.

Libé des auteur·es jeunesse

Tous deux sont d’accord, la question climatique est une question politique. Pour Emmanuel Tibloux, l’école est le berceau du changement, c’est le lieu où les générations anciennes sont façonnées par les générations futures, interpellées par les revendications nouvelles. Il comprend les actes de Dernière Rénovation mais nuance : «Il ne faut pas détruire les œuvres, c’est une ligne rouge à ne pas franchir.» Pour Elen, l’urgence prime, «il faut que je puisse me regarder dans la glace et me dire que je ne me suis pas laissée crever en silence». La salle reste muette quelques secondes… Applaudissements.

Jets de soupe, blocage des routes… les récentes actions des militants écologistes, jugées radicales, interrogent notre rapport à l’art et à la temporalité. «J’ai très peu de chance de mourir de vieillesse», clame Elen. Face aux accusations d’écoterrorisme, elle rappelle que «la radicalité est du côté du gouvernement», condamné deux fois pour inaction climatique. «De la peinture sur un tableau suscite plus de réactions qu’un rapport du Giec.» Emmanuel Tibloux préfère, lui, «embarquer la société sans la brusquer». Interrogé sur la possibilité d’introduire une alternative radicale au sein de son école, il répond que ses élèves travaillent avec le secteur de la mode et des multinationales comme Decathlon : «Il faut porter la transformation partout, il n’y a aucun endroit que nous devons exclure, sauf les grands groupes pétroliers.» Si le consensus de l’urgence climatique est évident, les modes d’actions sont différents. Faut-il détruire pour reconstruire ?