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Fêtes de fin d’année : « Les chocolatiers réalisent 50 % de leurs ventes à cette période »

Pas moins de 3.000 entreprises artisanales existent en France autour de la chocolaterie, confiserie et biscuiterie. Près de 500 d’entre elles sont adhérentes à la confédération des chocolatiers et confiseurs de France qui défend le savoir-faire de ces filières sucrées. Pendant la période des fêtes de fin d’année, ces métiers connaissent une forte période d’activité pour laquelle ils n’ont aucun mal à recruter des renforts car la filière reste attractive. Le point avec Thierry Lalet, président de la confédération et gérant de la boutique bordelaise Saunion, sur cette filière à qui tout sourit.

Comment vous préparez-vous en amont au rush de fin d’année ?

C’est un très gros pic d’activité pour nous puisque en moyenne un artisan chocolatier réalise 50 % de son chiffre d’affaires entre le 10 décembre et le 10 janvier. C’est très important parce que cela va décider de la bonne santé de l’entreprise dans les mois futurs pour recommencer une nouvelle année.

Suivant le type de l’entreprise, des renforts peuvent intervenir pour la fabrication et la vente. Dans d’autres, comme la mienne, on n’a pas de renfort en fabrication car le staff est déjà important mais en vente, car les clients arrivent tous en même temps. Il faut savoir que quand le chocolat vient juste d’être fabriqué, ce n’est pas là qu’il est le meilleur, il lui faut deux à trois jours pour que tous les arômes se stabilisent, on peut donc anticiper un peu ses courses.

Comment la crise énergétique a-t-elle eu des conséquences sur votre activité et cela a-t-il déjà conduit à une hausse des prix ?

Dans l’artisanat, on est plutôt sur un positionnement milieu et haut de gamme. C’est beaucoup de main-d’œuvre le chocolat et beaucoup de patience, on ne sort pas un produit comme ça : il y a des temps de repos et beaucoup de phases. Chez un artisan chocolatier, le prix du kilo de chocolat se situe en moyenne entre 60 et 110 euros le kilo en Province et à Paris c’est plutôt 160 à 180 euros le kilo.

Il y a eu une petite augmentation en septembre sur les chocolats en général, mais ce n’est pas le cacao qui a augmenté mais plutôt toutes les autres matières premières et à cela, vient se greffer le problème de l’énergie. Nos machines fonctionnent la nuit où elles restent en position de chauffe. Si on les arrêtait et qu’on les relançait le matin, il faudrait qu’on attende quatre à cinq heures avant que le chocolat soit de nouveau fondu, ce qui n’est pas gérable pour notre activité commerciale.

Comment vos entreprises artisanales ont traversé la crise sanitaire en 2020 et 2021 ?

Nos produits ont été de bons antidépresseurs pour mieux passer cette crise puisqu’on a eu la chance d’être ouverts. Cela n’avait aucun intérêt pour le premier confinement mais pour le deuxième, il a été un produit réconfort. On a organisé un service de livraison et on a observé une reprise des habitudes de consommation locale.

Comment la confédération travaille avec l’Education Nationale sur la mise à jour du CAP chocolatier ?

On travaille à l’actualiser pour qu’il soit en cohérence avec nos métiers. Il y a des gestes qu’on ne fait plus, car on est équipés de machines, mais pour autant, il ne faut pas perdre le savoir-faire. Dans le déroulé de l’ancienne formule de l’examen, on leur demandait par exemple un gâteau au chocolat à faire or dans certaines entreprises, comme la mienne, on ne fait pas du tout de pâtisserie. Un jeune qui est resté deux ans dans ce type d’entreprise, se retrouve donc à en faire un pour valider son diplôme sans en avoir réalisé pendant son stage en entreprise. On pense qu’il vaut mieux se concentrer sur la base de notre métier, c’est-à-dire savoir créer les intérieurs et les maîtriser parfaitement plutôt que de vouloir mettre en place un diplôme multitiroirs.

La filière recrute-t-elle facilement ?

On n’est pas un métier en tension, on bénéficie d’une image plutôt positive par le produit et les conditions de travail. Une vie de famille est possible en étant chocolatier, ce n’est pas comme la pâtisserie, on travaille très peu le dimanche. On n’a pas non plus besoin de se lever à 4 h du matin car le chocolat n’est pas aussi périssable qu’un gâteau. Aujourd’hui une des évolutions les plus visibles sur les profils, c’est qu’on a 50 % voire plus de filles dans les écoles.

La confédération a engagé une démarche « chocolatiers engagés » pour améliorer la rémunération des producteurs de cacao. Pouvez-vous nous expliquer en quoi elle consiste ?

Nous, on vit de notre travail et on emploie du personnel mais en parallèle, ceux qui produisent notre matière première principale, le cacao, ne peuvent pas en vivre. 40 % des planteurs touchent moins d’un euro par jour dans le monde : on ne peut pas continuer comme ça. Il y a un fossé qui n’est pas logique donc on s’est demandé comment aider ces planteurs à vivre décemment de leur activité.

On a échangé avec une coopérative du Cameroun et on est arrivés à un accord. On a mis en place un cahier des charges, en échange d’une rémunération plus juste avec notamment 50 % de la récolte payée en amont. On espère développer cette démarche de « chocolatiers engagés » également au Togo, au Bénin et en Amérique du Sud.

Pour nous distinguer de l’industriel et il nous faut un cacao fin, avec des qualités organoleptiques autres que la tablette vendue à 1,50 euro. Les filières équitables qui existent déjà sont rarement sécurisées et on a voulu faire disparaître tous les intermédiaires. On se rend régulièrement nous-mêmes sur les plantations. L’industrie consomme 90 % du chocolat produit, mais avec ce projet on a mis un petit grain de sable dans l’engrenage.