France
This article was added by the user . TheWorldNews is not responsible for the content of the platform.

Fillette battue à mort dans l’Eure : Que sait-on de l'affaire ?

Une enfant de trois ans, « couverte de bleus », est morte dans la nuit de samedi à dimanche. Le décès de la petite Lisa a entraîné la mise en examen et l’incarcération de sa mère et de son beau-père, soupçonnés de violences. De nombreuses questions se posent aussi sur la chaîne de signalements alors que l’enfant était absente de l’école depuis une semaine. 20 Minutes fait le point pour vous sur ce drame.

Que s’est-il passé ?

Dans la nuit de samedi à dimanche, les parents de Lisa ont appelé les pompiers et le Samu qui se sont rendus à leur domicile. « L’enfant était en arrêt cardiorespiratoire » et « couverte de bleus », a expliqué le procureur de la République d’Évreux, Rémi Coutin. La fillette de trois ans est décédée au CHU de Rouen à 1h53 du matin, malgré l’intervention des secours au domicile familial à Conches-sur-Ouche. Les soignants ont contacté les services de gendarmerie.

Car l’enfant portait de multiples hématomes d’âges différents sur « le visage, les quatre membres, le thorax, le dos, le pubis », selon le procureur. « Il ressort des auditions du couple que la fillette était manifestement victime de violences fréquentes, répétées au moins depuis plusieurs mois, de la part des deux parents », a expliqué Rémi Coutin. Le rapport de l’autopsie de la petite fille, réalisée mardi matin, n’a pas encore été communiqué.

Dans quel climat familial l’enfant vivait-elle ?

Le procureur Rémi Coutin a raconté comment « dans un mécanisme assez abject mais classique de ce type de violences, le couple, négatif à l’alcool et aux stupéfiants, a commencé par expliquer que la fillette se blessait toute seule lors de crises de colère et de chutes ». Le beau-père de 29 ans, sans profession, a par la suite reconnu s’être déjà livré par le passé à « des bousculades, des étranglements jusqu’à convulsion et plusieurs pertes de connaissance de l’enfant », toujours selon le parquet.

Ces violences ont débuté « à l’hiver 2022/23, deux ou trois mois après la mise en ménage et le décès de son propre père [le père du mis en cause] », a décrit le procureur. La mère, 27 ans, également sans emploi, a pour sa part admis avoir donné « des gifles » à sa fille, dont le père vit dans l’Eure et bénéficiait d’un droit de visite tous les 15 jours.

Le soir du crime, la maison où vivait le couple se trouvait « dans le plus grand désordre et le frère aîné, âgé de six ans, présent sur place, présentait également des traces de violences », d’après Rémi Coutin. Le garçonnet a été confié aux services de l’aide sociale à l’enfance. « On est dans un drame de l’isolement, du mal-logement, de l’addiction. Ils vivaient dans le dénuement le plus total », a déclaré Jérôme Pasco, maire de cette commune normande de 5.000 habitants.

Quelles suites judiciaires ?

Mis en examen pour meurtre sur mineur de 15 ans et violences, le couple, placé en détention provisoire, encourt la réclusion criminelle à perpétuité. La mère est également poursuivie pour privation de soins et non dénonciation. Le couple était connu de la justice : elle a été condamnée en 2020 pour une affaire de stupéfiants et son compagnon était connu pour des infractions routières mais aussi rébellion et dégradations, d’après nos confrères du Parisien.

Est-ce qu’il y a eu des négligences ?

« Le juge d’instruction va s’interroger sur le fait que la situation de cette petite fille, victime de violences régulières, n’a pas été signalée », explique le procureur. Sur le volet judiciaire, l’enquête a été confiée à la gendarmerie, pour éclaircir les responsabilités respectives de la mère et du beau-père mais aussi des tiers qui auraient pu avoir connaissance des violences sans les dénoncer.

« Ni la gendarmerie, ni la justice, ni les services de l’aide sociale à l’enfance n’avaient été informés » des « violences difficilement soutenables » subies par la petite fille, d’après le procureur. Une amie du couple avait notamment « vu l’enfant plusieurs jours avant les faits et a souhaité faire un signalement au 119 » mais « cet appel n’aurait pas abouti » faute d’opérateurs, a déclaré le procureur lors d’une conférence de presse.

Pourquoi l’école de la fillette est-elle prise dans la tourmente ?

D’après le procureur, l’enfant « n’aurait pas été scolarisée la semaine précédent le drame ». La directrice de l’école maternelle, où la fillette était scolarisée en moyenne section, a été suspendue « à titre conservatoire », a annoncé mardi le rectorat de l’académie de Normandie.

Le rectorat a précisé « diligenter une enquête administrative afin de faire la lumière sur la chaîne de signalement des faits par les services de l’Éducation nationale ». Dans un communiqué intitulé « L’Opprobre », le Syndicat des directrices et des directeurs d’école de l’Education nationale (S2dé), regrette ce mercredi que le directeur ou la directrice d’école soit « le fusible idéal pour endosser toutes les responsabilités, tous les maux de notre pays ».

« L’enquête nous établira certes la vérité et les responsabilités de chacun mais tout le monde devrait être coupable : les voisins qui entendaient les nombreuses disputes selon leurs propres déclarations, la mairie de Conches-en-Ouche où habitait cette famille, les commerçants où ils faisaient leurs achats, la personne qui aurait appelé le 119 et l’interlocuteur qui aurait dit de rappeler… », liste le syndicat, qui dit avoir écrit au ministère de l’Education nationale pour demander « en urgence une entrevue ». « Hier, nous avons été bouleversés, aujourd’hui, nous sommes écœurés par cet opprobre », conclut le communiqué.

Une cellule d’écoute psychologique a été mise à la disposition des élèves et des adultes de l’école. « Face à ce terrible drame, la rectrice Christine Gavini exprime sa très grande émotion et fait part de son immense tristesse », a ajouté le rectorat.