France
This article was added by the user . TheWorldNews is not responsible for the content of the platform.

Flambée des prix de l’énergie : les patrons d’ETI broient du noir

Selon une enquête, la moitié des dirigeants des entreprises de taille intermédiaire anticipent un doublement de leur facture énergétique l’an prochain.

Par François Miguet
Contrairement aux particuliers, les entreprises ne beneficient pas du bouclier tarifaire gouvernemental sur les prix de l'electricite et du gaz.
Contrairement aux particuliers, les entreprises ne bénéficient pas du bouclier tarifaire gouvernemental sur les prix de l’électricité et du gaz.  © JONATHAN RAA / NurPhoto via AFP
Publié le 29/09/2022 à 22h00

Temps de lecture : 4 min

Et dire que début 2022, au sortir de l'orage pandémique, la plupart des patrons de petites et moyennes entreprises françaises se croyaient tirés d'affaire… « Je vais pouvoir commencer à tranquillement rembourser mon prêt garanti par l'État », se disaient-ils in petto. Avec l'enthousiasme de celui qui voit enfin la lumière au bout du tunnel, nombre d'entre eux avaient repris les investissements, voire les recrutements. Hourra, la crise est derrière nous !

Et puis patatras. La faute à Vladimir Poutine, bien sûr, qui, le 24 février dernier, a trouvé bon d'envahir l'Ukraine et de replonger ainsi l'Europe dans la tourmente. Sept mois plus tard, « l'opération spéciale » russe – une guerre sanglante, en vérité – est toujours en cours. Nul ne sait quand elle se terminera. Les prix du gaz, et avec eux ceux de l'électricité, sont au zénith. En outre, le robinet à dollars ouvert par le président américain Joe Biden s'est retourné contre lui, provoquant une inflation immaîtrisable. Last but not least, la folle politique « zéro Covid » du leader chinois Xi Jinping a fortement grippé la deuxième économie mondiale.

Ralentir les investissements

Résultat de tous ces « chocs exogènes », comme disent les économistes : la plupart des patrons des entreprises intermédiaires de France – entre 250 et 4 999 salariés, avec un chiffre d'affaires compris entre 50 millions et 1,5 milliard d'euros, selon la définition de l'Insee – ont le moral dans les chaussettes. C'est du moins l'enseignement d'un sondage, auprès de 1 200 d'entre eux, issus de l'industrie à 59,3 %, commandé par le Mouvement des entreprises de taille intermédiaire (Meti), les clubs des ETI régionaux et la Banque Palatine, que Le Point s'est procuré.

« Les tensions sur l'offre (hausse des prix, pénuries, manque de main-d'œuvre) concernent plus de neuf ETI sur dix et ont un impact fort ou modéré sur leur activité, leur trésorerie et leur rentabilité », relève le mouvement patronal. Sept entreprises interrogées sur dix indiquent, toujours selon cette étude, que « ces difficultés auront un impact sur leurs projets d'investissements ».

Seulement 9 % des ETI disent pouvoir répercuter la hausse sur leurs prix

Ce qui angoisse le plus les dirigeants de ces sociétés grandement pourvoyeuses d'emplois sur le territoire national, c'est, sans surprise, l'évolution de la dépense énergétique. La moitié d'entre eux anticipent une augmentation de leur facture de 100 % en 2023 par rapport à 2021. Autrement dit, un doublement. En effet, contrairement aux particuliers, les entreprises ne bénéficient pas du bouclier tarifaire gouvernemental sur les prix de l'électricité et du gaz.

Toujours selon ce coup de sonde, réalisé du 7 au 15 septembre, seulement 9 % des ETI concernées se disent en capacité de répercuter totalement cette majoration sur leurs prix de vente. « Dans le cas où les hausses persisteraient, voire s'amplifieraient, 53,5 % des ETI risquent de devoir diminuer leur activité et 7 %, de devoir l'arrêter », précisent les auteurs de l'enquête. « L'année 2023 s'apparente aujourd'hui à un vrai mur énergétique », commente Frédéric Coirier, coprésident du Meti et PDG du groupe Poujoulat, un fabricant de systèmes métalliques d'évacuation de fumée, basé à Niort, dans les Deux-Sèvres.

À LIRE AUSSIÉlectricité : le gouvernement sonne la mobilisation générale

Tout cela arrive dans un contexte déjà tendu. « Plus de quatre ETI sur dix ont connu une dégradation de leur trésorerie sur un an, soit quinze points de plus qu'en juin dernier », s'inquiètent les commanditaires de l'étude. Dans ces conditions, certaines d'entre elles se demandent comment elles vont pouvoir rembourser leur prêt garanti par l'État. Ces fameux PGE vus – à raison – comme des bouées de sauvetage pendant la crise du Covid et qui se transforment maintenant en boulets.

L'épée de Damoclès des prêts garantis par l'État

Depuis ce printemps, une majorité des 700 000 souscripteurs de ces prêts ont commencé à les rembourser, rappelait récemment Les Échos. Et ils ont désormais quatre ans pour y parvenir. ​​Mais, selon la Cour des comptes, qui a dressé un état des lieux fin juillet, les mensualités peuvent représenter jusqu'à 9 % du chiffre d'affaires lorsqu'elles se cumulent aux dettes Urssaf à rembourser.

Quelques notes de couleur dans ce noir tableau ? D'abord, près de 40 % des ETI n'ont pas utilisé leur PGE, rapporte l'étude. Ensuite, le projet de loi de finances pour l'année prochaine, récemment présenté par le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, prévoit une enveloppe de 3 milliards d'euros pour aider les sociétés qui en auront besoin (et qui répondront aux critères, non encore définis). « En retour, nous voulons que les grandes entreprises industrielles poursuivent leur mouvement » de relocalisation et d'implantation de sites dans le pays, a toutefois nuancé le ministre à l'attention des bénéficiaires.

Enfin, les investissements résistent. « ​​Les deux tiers des ETI ont au moins un projet de croissance organique, qu'elles financent avec leurs ressources propres pour 57 % d'entre elles », poursuivent les auteurs de l'enquête. Et plus de 55 % ont au moins « un projet de croissance externe ». En clair, le projet de racheter une autre société. Les malheurs des uns font parfois le bonheur des autres.

Vous lisez actuellement : Flambée des prix de l’énergie : les patrons d’ETI broient du noir

100 %