4 886 demandes contre 3 446 en 2019
« Il y a actuellement 4 886 demandes de logements auprès de l’ensemble des bailleurs sociaux », cite Tatiana Tourbier, directrice clientèle de Noalis....
4 886 demandes contre 3 446 en 2019
« Il y a actuellement 4 886 demandes de logements auprès de l’ensemble des bailleurs sociaux », cite Tatiana Tourbier, directrice clientèle de Noalis. Fin 2019, le nombre de dossiers en cours s’élevait à 3 446 selon le ministère du Logement. Ces chiffres comprennent environ 30 % de vœux de déménagement d’un HLM vers un autre. Mais même en excluant ces mouvements internes, la tendance reste identique. « Je travaille depuis 1999 à Logélia et je n’ai jamais connu une telle progression constante », s’alarme Sabrina Larwa, directrice de l’agence de l’Angoumois.
Confinements, crises économique et énergétique ont accru la précarité des ménages. Les nouveaux pauvres se tournent vers le parc de logement social. « Je remarque de plus en plus de demandes de gens qui travaillent », illustre Hélène Dorange, responsable du service de gestion locative à l’OPH de l’Angoumois. En parallèle, les locataires historiques s’accrochent à leur HLM. « Le taux de rotation diminue », confirme Sébastien Garat, directeur général adjoint de Noalis. Dans son parc, chaque année, 8,5 habitations sur 100 se libèrent contre 11 auparavant. « C’est 300 logements en moins », lâche Tatiana Tourbier.
Treize mois d’attente en moyenne
Facteur aggravant, le marché privé fait aussi grise mine. Pénurie de logements, hausse des loyers et de l’immobilier, difficulté d’accès aux prêts… « La tension se reporte sur le marché social », estime Sébastien Garat. La situation pourrait vite empirer. La loi climat et résilience interdit la location de logements classés en DPE (diagnostic de performance énergétique) G à partir de 2025, les « F » en 2028 et les « E » en 2034. « Des logements mal isolés vont être retirés du marché », anticipe Julie Koch, directrice des relations clients à Logélia.
En bout de piste, les délais d’attribution s’allongent. Selon le site web officiel « demandedelogement16 », le délai moyen d’attente s’élève à 13 mois. Mais « chaque dossier est différent en fonction de la situation des demandeurs, de ce qu’ils recherchent », justifie Sabrina Larwa, de Logélia. « Depuis le covid, tout le monde veut une maison avec jardin mais ce n’est pas ce que nous avons le plus et c’est ce qui se libère le moins », renchérit Hélène Dorange. Les organismes n’ont plus de marges de manœuvre. La vacance des logements a été réduite au maximum. Moins d’1 % chez Logélia. « Aussitôt libéré aussitôt loué », résume Julie Koch.
On en est à prioriser des situations prioritaires.
Résultat : « On en est à prioriser des situations prioritaires », déplore Julie Koch. Tatiana Tourbier abonde : « Le dossier d’une femme battue, à la rue, sera pris en compte en quelques semaines. » Pour les cas moins urgents, les délais s’étalent sur des semestres.
Les bailleurs ont-ils manqué de clairvoyance ? « Qui aurait pu imaginer ces crises successives et leurs conséquences ? se défend Sébastien Garat. Les bailleurs sociaux sont agiles et ont toujours répondu présents. » Mais pour l’heure, ils écopent une vague qui ne semble jamais refluer.
Les coûts brident les constructions
Pour résorber l’embolie, les bailleurs disposent d’un seul levier : livrer de nouveaux programmes. Entre 2021 et 2023, Noalis a ouvert à la location 110 nouveaux logements et prévoit d’en inaugurer 400 de plus d’ici 2027. À l’échelle de la Charente, Logélia a mis sur le marché 87 logements neufs en 2021, 115 en 2022. L’OPH suit la même dynamique : 53 livraisons en 2021, 125 en 2022, 110 prévus en 2024. Des constructions destinées pour certaines à accueillir les relogés de l’opération de renouvellement urbain de Bel-Air/Grand-Font.Problème : les budgets sont de plus en plus limités. L’embouteillage s’allonge. « On n’a pas de baguette magique, les coûts de construction ont augmenté et les taux d’emprunt aussi », prévient Julie Koch. Les taux d’intérêt des prêts accordés aux bailleurs sociaux sont indexés sur le taux de rémunération du livret A. Or celui-ci est passé de 0,5 % en janvier 2022 à 3 % en février 2023. L’Union sociale pour l’habitat, qui représente les bailleurs, calcule le surcoût à « 3,75 milliards d’euros en année pleine ». Un pactole qui ne sera pas investi dans de nouveaux foyers.