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Grève du 7 février : à Marseille, « on a besoin des jeunes »

REPORTAGE. Quelque 15 000 personnes ont manifesté mardi sur le Vieux-Port contre la réforme des retraites. Dans le cortège, lycéens et étudiants sont déterminés.

De notre correspondant à Marseille, François Tonneau
Mardi, dans le cortege marseillais contre la reforme des retraites.
Mardi, dans le cortège marseillais contre la réforme des retraites.   © CHRISTOPHE SIMON / AFP

Temps de lecture : 3 min

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Ils sont arrivés comme un feu d'artifice, étincelles joyeuses et désordonnées reliées par un mégaphone hurlant contre la réforme des retraites et lançant des « Aux armes ! » comme au stade Vélodrome. Étudiants, profs, lycéens s'étaient regroupés près des facultés de la gare Saint-Charles et devant le lycée Thiers, au cœur de La Canebière. Mardi 7 février, leur petit cortège a rejoint le gros de la manifestation dès 10 h 30 sur le Vieux-Port, se déhanchant sur les tubes de Jul et de Naps. C'est « la kiffance » chez des jeunes un peu plus nombreux que lors des précédentes mobilisations.

« On les voit de plus en plus dans les descentes aux flambeaux et dans les réunions intersyndicales », indique Virginie Akliouat, enseignante et déléguée FSU encadrant les jeunes manifestants. « On les sent déterminés, leur colère est profonde. Et je ne crois pas qu'ils craignent la longueur. » Quelques lycées avaient été bloqués tôt mardi matin, des réunions sont programmées cet après-midi dans les amphis. Jusque-là assez peu impliqués, les jeunes commencent à investir le mouvement social à Marseille.

« Cette réforme va nous toucher directement parce qu'on construit notre avenir, explique Loris, en première année de biologie à l'université de Luminy, dans le parc des Calanques. On n'a clairement pas envie de travailler plus longtemps, jusqu'à 64 ans. On sait très bien que le choix qui a été fait est celui de l'État. Il y a d'autres moyens pour payer les retraites. »

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À côté de Loris, certains griffonnent encore des pancartes, réfléchissent aux slogans. Radu est roumain. Étudiant en philosophie, il accompagne ses copines par « solidarité, parce que ce qui se passe ici, c'est de la lutte et qu'il ne faut pas abandonner ». Emmitouflées dans de grosses écharpes chahutées par un mistral capricieux, Sybille et Émilie sourient, heureuses d'être là. « On sent quelque chose de mauvais, ça ne sent pas bon, dit la première. Ça m'angoisse, mais c'est au-delà des retraites. C'est général. Il y a l'écologie, tout ce que se passe dans la société. On se bat pour tout ça. Je me dis qu'il n'y a pas de solution individuelle, que ça doit passer par le collectif. » Sybille se tourne vers Émilie. « Et puis ça fait du bien d'être là, on n'est pas seul, c'est motivant de voir tous ces gens autour. »

Deux générations

Un peu plus loin, les sonos de la CGT crachent les standards de Trust et de Gil Scott-Heron. Une autre génération. Le cortège vient passer devant la mairie de Marseille. En tête, l'intersyndicale imprime un rythme lent, entraînant un cortège d'environ quinze mille personnes sous le soleil. Moins que les semaines passées, mais avec l'idée que les rangs se gonfleront à nouveau samedi. Réunis en première ligne, les leaders syndicaux des Bouches-du-Rhône se chambrent gentiment. L'atmosphère est détendue, comme une marche de transition avant samedi, où on s'attend à un public différent.

La présence des jeunes est déterminante.

« On ira chercher ceux qui ne peuvent pas manifester aujourd'hui, parce que ça commence à faire beaucoup, mais qui sont toujours déterminés à faire plier le gouvernement, indique Franck Bergamini, secrétaire départemental de Force ouvrière. On compte aussi sur les jeunes. Ils sont une clé pour que le mouvement s'enracine. Ils sont comme le dentifrice. Une fois qu'ils sont sortis du tube, impossible de les faire rentrer. » À ses côtés, Olivier Mateu, le leader de la CGT, se marre. « On a besoin des jeunes, leur présence est déterminante, C'est un tout. De la même manière qu'on a besoin de se mobiliser dans la rue et de multiplier les grèves. »

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Sur le quai du port où les métallos agitent des fumigènes, les manifestants révisent leurs classiques et brandissent les pancartes. Le fond de la manifestation n'est pas encore parti de l'ombrière qui surplombe l'esplanade du Vieux-Port. Assis sur un bloc de béton, Philippe Avocat prend son temps. Lui dirige la centrale syndicale CGC-CFE d'Arcelor à Fos. « Plus on tire sur la ficelle de la réforme dite juste, plus on voit qu'elle est injuste et plus de gens se joignent à nous. On le voit avec les cadres qui n'osent pas trop faire grève, on le voit avec les retraités et les jeunes qui nous apportent de la fraîcheur et de l'envie. » Eux sont en marche, toujours à faire des zigzags en se tenant par l'épaule.