France
This article was added by the user . TheWorldNews is not responsible for the content of the platform.

Italie : Cinq questions après l’élection de la coalition d’extrême droite menée par Giorgia Meloni

Probable future Première ministre de l’Italie, Giorgia Meloni, présidente du parti Fratelli d’Italia (FDI), incarne un mouvement à l’ADN post-fasciste qu’elle a réussi à « dédiaboliser » pour arriver au pouvoir. Sous la houlette de cette Romaine de 45 ans, FDI est devenu le premier parti du pays en raflant plus d’un quart des voix.

Aux législatives de 2018, FDI avait dû se contenter d’un maigre 4 % des voix, mais Giorgia Meloni est parvenue, depuis, à rassembler sous son nom les mécontentements et frustrations de nombreux Italiens excédés par les « diktats » de Bruxelles, la vie chère et l’avenir bouché des jeunes.

Qui est Giorgia Meloni ?

Giorgia Meloni ne s’en est jamais caché : elle admire Mussolini depuis longtemps. Née à Rome le 15 janvier 1977, elle milite depuis ses 15 ans dans les associations étudiantes classées très à droite, tout en travaillant comme babysitter ou serveuse. En 2006, elle devient députée et vice-présidente de la chambre. Deux ans plus tard, elle est nommée ministre de la Jeunesse dans le gouvernement de Silvio Berlusconi. Il s’agit là de sa seule expérience gouvernementale. Sa jeunesse, sa témérité, ses formules, font d’elle un bon client pour les médias. Giorgia Meloni, qui vit en concubinage avec un journaliste TV, a une fille, née en 2016, année où elle a échoué à conquérir la mairie de Rome.

Aujourd’hui, si elle reconnaît au Duce d’avoir « beaucoup accompli », elle ne l’exonère pas de ses « erreurs » : les lois antijuives et l’entrée en guerre. Pas de question sur ces sujets dans son parti, assure-t-elle : « il n’y a pas de place pour les nostalgiques du fascisme, ni pour le racisme et l’antisémitisme ».

Quel est le programme de la coalition ?

Meloni a tenu à rassurer dimanche soir, après le vote, dans une courte allocution à la presse où elle a multiplié les appels à l’apaisement et à la concorde nationale. « Nous gouvernerons pour tous les Italiens… Nous le ferons dans l’objectif d’unir le peuple », a-t-elle assuré.

Son programme durant la campagne électorale s’appuyait en politique étrangère sur le respect des engagements pris dans le cadre de l’Alliance atlantique. Contrairement à nombre de membres de l’extrême droite, en France notamment, elle a apporté son soutien à l’Ukraine face à l’invasion russe. Elle promet aussi de respecter l’adhésion au processus d’intégration européenne, avec la perspective d’une Union européenne plus politique et moins bureaucratique. Mais elle souhaite la révision des règles du Pacte de stabilité et de la gouvernance économique, et que l’UE promeuve ses racines et identités historiques et culturelles judéo-chrétiennes.

En matière de politique intérieure, le programme de Meloni est libéral, avec une réduction de la pression fiscale pour les familles, les entreprises et les travailleurs indépendants, la suppression annoncée du revenu universel minimum et en parallèle la revalorisation des minima retraite, sociaux et invalidité. Elle veut aussi soutenir la natalité, avec notamment des crèches gratuites.

Un grand volet de son programme porte sur la lutte contre l’immigration irrégulière et la gestion ordonnée des flux légaux de l’immigration. Elle envisage le blocage des bateaux pour empêcher, en accord avec les autorités nord-africaines, la traite des êtres humains, ainsi que la création de hot-spot sur les territoires extra-européens, gérés par l’Union européenne, pour examiner les demandes d’asile.

Enfin, en matière d’environnement, Meloni ne sera pas sur une ligne très clivante : elle milite pour l’augmentation de la production des énergies renouvelables, et promet de respecter les engagements internationaux pris par l’Italie pour lutter contre le changement climatique.

Quelles sont les réactions en Europe à sa victoire ?

La réaction la plus virulente est venue de Madrid. « Les populismes finissent toujours en catastrophe », a mis en garde lundi le ministre espagnol des Affaires Etrangères après la victoire du parti post-fasciste de Giorgia Meloni dimanche aux législatives en Italie. « C’est un moment d’incertitude et dans les moments d’incertitude, les populismes gagnent toujours en importance et ils finissent toujours de la même manière : en catastrophe » car « leur réponse est toujours la même : fermons-nous sur nous-mêmes et revenons au passé, a déclaré José Manuel Albarés. Ils apportent toujours des réponses simples à court terme à des problèmes qui sont très complexes. »

La tonalité est bien plus mesurée dans les autres capitales. A Bruxelles la Commission, via son porte-parole, a dit espérer « une coopération constructive » avec le prochain gouvernement italien.

L’Allemagne attend de l’Italie qu’elle reste « très favorable à l’Europe » malgré la victoire du parti post-fasciste de Giorgia Meloni aux législatives, a indiqué lundi un porte-parole du gouvernement.

En France, Elisabeth Borne s’est voulue très prudente, refusant de « commenter le choix démocratique du peuple italien ». Interrogée afin de savoir si le gouvernement était prêt à travailler avec Giorgia Meloni, la présidente des Frères d’Italie, un parti d’extrême droite, elle a refusé de se prononcer. « Il ne faut pas brûler les étapes. Je ne vais pas commenter le choix démocratique du peuple italien. Il appartient au président de la République [italien] de désigner le président ou la présidente du Conseil. »

Tout le monde n’est pas sur cette ligne toutefois. Le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki a salué ce lundi la « grande victoire » de l’extrême droite italienne aux élections législatives remportées par le parti Frères d’Italie de Giorgia Meloni. « Grande victoire ! Félicitations ! », s’est exclamé Morawiecki sur Facebook, utilisant des émojis pour souligner que les deux pays seraient forts ensemble.

Quels indicateurs économiques après cette élection ?

L’Italie, qui croule sous une dette représentant 150 % du PIB, le ratio le plus élevé de la zone euro derrière la Grèce, connaît une inflation de plus de 9 % avec des factures de gaz et d’électricité qui mettent en difficultés de millions de personnes.

La Bourse de Milan était en hausse ce lundi matin, la victoire de l’extrême droite ayant été largement anticipée par les marchés. Vendredi, la place italienne avait chuté de 3,36 %, subissant le plus fort recul parmi les grandes Bourses européennes.

Signe des inquiétudes persistantes des investisseurs sur la dette de l’Italie, le « spread », c’est-à-dire l’écart très surveillé entre le taux d’emprunt à 10 ans allemand qui fait référence et celui de l’Italie à dix ans, a grimpé à 235 points lundi, en hausse de 6,68 %.

Quand sera-t-elle nommée ?

A l’issue de la victoire de la coalition d’extrême droite emmenée par Giorgia Meloni aux législatives de dimanche, un nouveau gouvernement sera nommé, mais en Italie le chemin entre les deux peut s’avérer tortueux et traîner en longueur. Dans le passé, ce processus a pris entre un peu moins de quatre et douze semaines. Il est acquis que l’Italie sera représentée par le Premier ministre démissionnaire Mario Draghi lors du sommet informel des chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE à Prague le 7 octobre.

Les nouveaux élus du Sénat et de la Chambre des députés doivent, selon la Constitution, se réunir dans un délai de vingt jours après la tenue des élections, soit le 15 octobre au plus tard. La tradition politique veut que le président de la République entame les consultations sur la nomination du nouveau chef du gouvernement par les présidents des deux chambres, suivis par les chefs des principaux partis et éventuellement les chefs des groupes parlementaires, après quoi le chef d’Etat donne mandat à une personnalité pour former un nouveau gouvernement.