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« Je ne veux pas me cantonner au déjà-vu »

Syndrome [E], TF1, 21 h 10

Laure de Butler Réalisatrice

Dans les rues de Casablanca, on suit un mystérieux van dans lequel des enfants disparaissent. À Paris, le lieutenant de police Lucie Henebelle (Jennifer Decker), en pleine découverte d’une scène de crime particulièrement sanglante, se met à pleurer des larmes de sang et tire sur son coéquipier. Pour démêler cette affaire, on sort de sa réserve le commandant Sharko (Vincent Elbaz), aussi brillant qu’instable. Un cocktail explosif quand on entre dans le monde des neurosciences et de la manipulation mentale…

Cette série de TF1 est une adaptation à laquelle ont travaillé le scénariste Mathieu Missoffe et l’auteur du roman originel, le Syndrome [E], Franck Thilliez. En 6 épisodes de 52 minutes, la série explore le côté le plus sombre de l’âme humaine : rapt d’enfants, expériences physiques et psychiques… Le découpage « se prête mieux à l’adaptation de romans complexes. (…) On peut prendre du temps avec les personnages », explique Franck Thilliez dans un entretien à TF1. Selon l’auteur, Mathieu Missoffe a notamment eu « la très bonne idée d’impliquer personnellement Lucie Henebelle dans l’enquête. Ce qui produit beaucoup d’empathie ». Laure de Butler, la réalisatrice de la série, nous en dit plus sur son travail avec ce casting « cinq étoiles ».

Y a-t-il un cahier des charges à respecter quand on fait une adaptation d’une œuvre de Franck Thilliez, spécialement quand il l’a coadaptée ?

Pour tout vous dire, je ne connaissais pas l’univers de Franck et je n’ai lu le livre que pendant la postproduction. Mais je savais que Mathieu (Missoffe – NDLR) en avait fait une adaptation relativement libre. Ma bible, c’était ce scénario. Je me suis complètement plongée dedans.

Est-ce que ça enlève une pression de ne pas devoir se calquer sur la vision de l’auteur ?

C’est une adaptation, mais ça reste un regard, celui de Mathieu. Après, je dois apporter le mien sur ce scénario, mais ma référence, ma base de travail restent celle-là, pas l’œuvre originelle.

Le fait d’être diffusé à une heure de grande écoute sur TF1 vous a-t-il bridée ? Y a-t-il des choses qu’on ne peut pas filmer ?

Il y a des images qu’on est obligé de montrer pour le bien de l’histoire. Mais j’ai un naturel très pudique, je ne voulais pas aller dans l’ultraviolence. Il suffit de choquer une fois. Après, j’ai fait le choix de suggérer. À cet égard, j’aime assez la puissance d’évocation du hors-champ.

On a dit du casting qu’il était « cinq étoiles ». Vincent Elbaz, Emmanuelle Béart, Richard Bohringer... C’est intimidant de travailler avec ce type d’acteurs ?

On peut être intimidé par la notoriété, la réputation de certains, mais très vite les nécessités du travail prennent le dessus. On est face à des acteurs qui, malgré leur curriculum vitae, savent se mettre au service d’un metteur en scène, d’une histoire. Ils ont une vraie générosité dans le travail.

Avez-vous adapté votre manière d’appréhender les personnages aux personnalités des acteurs ?

Avec Mathieu, nous avons eu beaucoup de lectures individuelles : nous lisions les scènes, nous retracions la trajectoire des personnages, et eux posaient des questions, apportaient leur vision du rôle. Nous nous sommes aussi adaptés à la perception des rôles par les acteurs.

Peut-il arriver de bousculer la psychologie d’un personnage, ses attitudes en fonction de ce travail ?

Ça évolue en écriture au cours de la préparation. Sur le plateau, on est dans l’affinage : là on va travailler telle émotion plus profondément, ici retenir l’expression d’un sentiment… Mais plus on a pris de temps de réflexion avant le tournage, plus les acteurs ont compris leur personnage, digéré leur psychologie, mieux on peut rebondir, réagir à la magie du moment. C’est la structuration qui permet cette liberté.

On voit dans Syndrome [E] des acteurs à contre-emploi, Emmanuelle Béart, Bérengère Krief…

Ce serait bête de cantonner les acteurs à ce qu’ils savent faire naturellement. Ils sont souvent tristes qu’on leur propose toujours les mêmes rôles. Le propre d’un comédien, c’est de vivre des situations différentes, alors le défi que représente ce genre de proposition est bien vécu. En tant que réalisatrice, j’ai des envies de travailler avec telle ou tel… Je pars du principe qu’il faut toujours proposer, j’essaie de ne pas me cantonner au déjà-vu, c’est plus excitant.

Mathieu Missoffe a commencé à défricher d’autres histoires à faire vivre à Sharko et Henebelle. Vous êtes prête à continuer l’aventure ?

C’était une expérience extrêmement dense et riche. Il ne faut jamais dire jamais.