France
This article was added by the user . TheWorldNews is not responsible for the content of the platform.

« L’action publique, qu’elle soit budgétaire ou monétaire, a profité aux activités climaticides »

Anne-Laure Delatte

Economiste

L’économiste Anne-Laure Delatte montre, dans une tribune au « Monde », que la dépense publique tend de plus en plus à soutenir les entreprises plutôt que les services publics.

Temps de Lecture 3 min.

Article réservé aux abonnés

L’Etat qu’ont connu les Français pendant l’après-guerre n’est plus. Et l’Etat que connaîtront les Français en 2050 ne ressemblera probablement pas à celui d’aujourd’hui. Sera-t-il plus ou moins présent ? Généreux ? Planificateur ? Depuis quarante ans, l’Etat n’a pas disparu ; au contraire, les dépenses publiques n’ont cessé de croître, passant de 35 % du produit intérieur brut (PIB) en 1960 à 45 % en 1980 et à 60 % en 2021. Les prélèvements pèsent plus lourd sur le revenu des Français qu’à la fin des « trente glorieuses », pourtant marquées par le développement des services publics et de la protection sociale.

Lire aussi Article réservé à nos abonnés

A quoi ont été consacrés ces impôts ? A qui a profité l’action publique ? Depuis trente ans, l’Etat s’est tourné de plus en plus vers les entreprises. Il s’est mis au service du marché en accordant des subventions, des réductions et crédits d‘impôts aux entreprises et des exonérations de cotisations employeurs dans des proportions inégalées. Ces aides publiques aux entreprises ont représenté 200 milliards d’euros par an en moyenne depuis 2010 (8,8 % du PIB) contre 90 milliards entre 1995 et 2010 (5,2 %).

Ce nouveau type d’action publique n’est pas évident à mesurer car la comptabilité nationale reporte les dépenses et les recettes publiques, mais pas le manque à gagner de recettes. Il a fallu reconstituer les niches fiscales et sociales distribuées depuis quarante ans pour détecter et mesurer ce nouveau mode d’intervention publique, qui a de fait appauvri l’Etat et le système de protection sociale en les privant de recettes (L’Etat droit dans le mur, Anne-Laure Delatte, Fayard, à paraître en avril). Il pourrait d’ailleurs bien être à l’origine du conflit politique sur la réforme des retraites : le gouvernement la justifie au nom d’un problème de dépenses, tandis que les opposants dénoncent un problème de recettes.

Forte empreinte carbone

Mais au-delà des conflits sociaux de distribution, ce nouveau mode d’action publique pourrait aussi avoir contribué à la crise climatique. En se tournant davantage vers le marché, l’Etat a de fait soutenu des activités à forte empreinte carbone. Les données disponibles sur les subventions publiques sont sans ambiguïté : au cours de la dernière décennie, un quart des secteurs d’activité ont reçu la moitié des aides, or il s’agit des secteurs qui ont produit en moyenne soixante fois plus d’émissions que les secteurs les plus propres. Autrement dit, quand les Français paient des impôts, ils creusent leur tombe climatique.

Lire aussi :

On retrouve cette tendance dans une autre branche de l’Etat, plus discrète mais clé depuis une décennie : l’action publique monétaire menée par la banque centrale. Si la Banque de France est indépendante de Bercy depuis 1993 et applique une politique décidée à Francfort à la Banque centrale européenne (BCE), elle n’en reste pas moins un acteur public. Or ses interventions sont plus importantes depuis 2010 qu’elles ne l’étaient pendant les « trente glorieuses », époque où la Banque de France finançait la planification économique sous la tutelle de Bercy.

Il vous reste 47.22% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Vous pouvez lire Le Monde sur un seul appareil à la fois

Ce message s’affichera sur l’autre appareil.

Découvrir les offres multicomptes
  • Parce qu’une autre personne (ou vous) est en train de lire Le Monde avec ce compte sur un autre appareil.

    Vous ne pouvez lire Le Monde que sur un seul appareil à la fois (ordinateur, téléphone ou tablette).

  • Comment ne plus voir ce message ?

    En cliquant sur «  » et en vous assurant que vous êtes la seule personne à consulter Le Monde avec ce compte.

  • Que se passera-t-il si vous continuez à lire ici ?

    Ce message s’affichera sur l’autre appareil. Ce dernier restera connecté avec ce compte.

  • Y a-t-il d’autres limites ?

    Non. Vous pouvez vous connecter avec votre compte sur autant d’appareils que vous le souhaitez, mais en les utilisant à des moments différents.

  • Vous ignorez qui est l’autre personne ?

    Nous vous conseillons de modifier votre mot de passe.

Lecture restreinte

Votre abonnement n’autorise pas la lecture de cet article

Pour plus d’informations, merci de contacter notre service commercial.