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La BD française fait la peau aux clichés sur le Far West et les Amérindiens

Les auteurs franco-belges revisitent depuis quelques années les mythes du western et de l'Amérique du Nord afin de redonner toute leur place et leur authenticité aux peuples autochtones.

Les Peaux-Rouges tiennent leur revanche. Si la bande dessinée franco-belge s'est toujours passionnée pour le western, ses auteurs aujourd'hui tâchent de sortir des clichés sur les Amérindiens, qu'ils ne veulent plus présenter comme des personnages secondaires.

Dans le Far West de Lucky Luke, du Belge Morris, les autochtones étaient des faire-valoir. Le Suisse Derib fut l'un des premiers à se passionner pour ces civilisations, créant un personnage enfantin, Yakari, et un autre, adulte, un trappeur qui se fond dans cette culture, Buddy Longway. La série Blueberry traita aussi des «guerres indiennes», entre autres sujets.

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Mais «le western, en BD, reste trop souvent centré sur les colons, les cow-boys, en oubliant le point de vue de ceux qui habitaient le continent bien avant», explique à l'AFP l'auteur de BD Tiburce Oger. La conquête de l'Ouest était le sujet de Go West Young Man, album de 2021 pour lequel le scénariste avait réuni 15 dessinateurs. Adoptant un autre regard, Indians! L'Ombre noir de l'homme blanc est paru en novembre aux éditions de Grand Angle. «C'est le cri que poussent les colons dans les films de John Wayne, dans les scènes où ils sont attaqués. On a voulu montrer l'envers du décor», précise Tiburce Oger.

Ce qui m'intéresse, c'est de donner envie d'approfondir cette histoire qui reste largement méconnue.

Tiburce Oger

Seize dessinateurs ont leur nom sur la couverture, dont Derib qui illustre l'année 1869. Les autres histoires s'étalent de 1540 à 1922. «Ces formats courts pourraient donner lieu chacun à 50 pages d'album. Ce qui m'intéresse, c'est de donner envie d'approfondir cette histoire qui reste largement méconnue», indique Tiburce Oger.

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C'est le parti aussi d'un auteur, Patrick Prugne, qui a sorti en octobre le sixième tome de ses «sagas indiennes» : Pocahontas (éditions Daniel Maghen). Cette princesse de la tribu des Powhatans, dans l'actuelle Virginie, est passée à la postérité grâce aux récits d'un colon anglais, John Smith. Leur véracité est douteuse mais ils ont alimenté un mythe, jusqu'au célèbre film d'animation de Disney sorti en 1995.

Lui tente de revenir à une histoire plus plausible de cette héroïne, tout en reconnaissant sa dette à ceux qui l'ont transmise depuis quatre siècles, même déformée. «C'est peut-être un bien, car sans ce coup de projecteur sur une histoire d'amour exotique, nos regards ne se seraient pas autant attardés sur cette colonisation brutale de l'Amérique du Nord», écrit l'auteur dans une postface à l'album.

Loin de la civilisation

Face à cet artiste reconnu pour la qualité de ses aquarelles, c'est un autre style qu'adopte le jeune Neyef. Lui a une esthétique plus proche du manga. Mais même objectif : mettre en lumière l'histoire des Amérindiens dans sa fiction Hoka Hey! (éditions rue de Sèvres, Label 619), sortie fin octobre. Elle raconte l'histoire d'un garçon Lakota, assimilé par un pasteur, qui part à travers l'Ouest.

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«Le western, c'est un genre qui m'a toujours intéressé, mais où j'ai toujours préféré les natifs aux cow-boys, affirme l'auteur. Je me suis documenté et j'ai été marqué par une biographie de Sitting Bull, par Farid Ameur. Je ne voulais pas travestir la culture des Lakotas».

Le scénario laisse une grande place à une violence qui est le fait de tous, dans ces grandes plaines où peu sont venus faire régner l'ordre. «On est, là, très loin de la civilisation, souligne Neyef. Tout ce qui restait aux natifs, quand ils avaient respecté les règles et les traités que les colons finissaient par piétiner, c'était de se rebeller».