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La France redevient importatrice nette d’électricité

Il s’agit d’une inflexion majeure dans la politique énergétique, qui pourrait durer encore quelques années. La France sera «très importatrice d’électricité cet hiver » a prévenu, jeudi 1er décembre, Xavier Piechaczyk, le président de RTE, le gestionnaire du réseau de transport d’électricité, interrogé par Franceinfo.

Les défaillances du parc nucléaire

Selon lui, elle devrait même être « très légèrement importatrice sur l’ensemble de l’année ». Cela ne s’était pas vu depuis 1980, au moment de la fin de la construction du parc nucléaire. En 2021, le solde net d’exportation s’élevait encore à 43 TWh, faisant même de l’Hexagone le premier pays européen exportateur net d’électricité, essentiellement vers l’Italie et la Grande-Bretagne. En 2016, la balance était même positive de près de 72 TWh.

Mais les difficultés enregistrées depuis sur le parc nucléaire ont enrayé cette belle mécanique. C’est la première raison. La crise sanitaire a en effet durablement bouleversé le calendrier de maintenance des réacteurs, dont une partie atteint aujourd’hui 40 ans. Ils doivent subir des « visites décennales » (des révisions complètes) pour être prolongés de dix ans. Avec les différents confinements, ces chantiers complexes étalés sur plusieurs mois avec plusieurs milliers de personnes ont dû être décalés.

La moitié des réacteurs à l’arrêt

EDF, qui a aussi perdu beaucoup de compétences au fil des années, ne s’en est toujours pas remis. D’autant que se sont ajoutés l’an dernier des problèmes de corrosion sous contrainte sur des tuyauteries. Selon EDF, 16 réacteurs (sur 56) pourraient être concernés. Il faut découper les parties endommagées et en souder de nouvelles, notamment avec des professionnels venus d’Amérique du Nord. Tout cela prend beaucoup de temps.

Résultat, 20 réacteurs sont à l’arrêt et seulement 35 GW de capacités (sur 61 GW) sont actuellement disponibles. « L’objectif, c’est d’atteindre 40-41 GW au 1er janvier, et de finir le mois de janvier autour de 43 GW », a expliqué Xavier Piechaczyk, en se disant « assez confiant » sur la capacité d’EDF à tenir cette trajectoire.

Préparer l’opinion à des coupures

Mais en cas d’hiver très froid, des coupures ciblées ne sont pas exclues. « Il y a un risque de quelques jours d’Ecowatt rouge sur l’ensemble de l’hiver. Mais ça dépend essentiellement de la météo », a expliqué le patron de RTE.

La cellule interministérielle de crise qui planche sur le sujet travaille ainsi sur l’hypothèse selon laquelle six à dix délestages seront nécessaires cet hiver. Le service de Matignon a rendu publique, jeudi 1er décembre, une circulaire adressée aux préfets pour qu’ils anticipent et préparent la population, les entreprises et les administrations à ces coupures afin d’en limiter les inconvénients.

La fermeture précipitée des centrales thermiques

Mais si la France manque aujourd’hui de courant, c’est aussi parce qu’elle a arrêté une partie de son parc de centrales thermiques (charbon et fioul) au nom de la lutte contre le réchauffement climatique. Sans oublier la fermeture en 2020 des deux réacteurs nucléaires de Fessenheim, à la demande des écologistes mais aussi de l’Allemagne.

« En dix ans, la France a perdu 12 GW de puissance électrique pilotable garantie », rappelle la CGT en pointant du doigt « la sous-estimation dramatique de la demande en électricité » par les experts de l’époque.

En 2011, les centrales au charbon et au fioul avaient produit 21 TWh, contre seulement 5,7 TWh l’an dernier. À première vue, c’est plutôt une bonne nouvelle pour la planète, d’autant que les renouvelables ont fortement progressé durant la période. Entre 2011 et 2021, les productions éolienne et solaire sont passées de 13,7 TWh à 51,1 TWh.

Mais en raison de l’intermittence de ces énergies renouvelables, la France a accru ses importations d’Allemagne, où l’électricité reste majoritairement d’origine fossile, particulièrement à la pointe – augmentant donc les émissions de CO2 de l’autre côté du Rhin !

L’an dernier, durant 61 % du temps, la France a ainsi acheté de l’électricité en provenance de la zone dite d’Europe de l’Est et centrale. Dès que les températures baissent, comme c’est le cas en ce moment, le même scénario se répète. Les importations en provenance d’Allemagne grimpent en flèche. En milieu de journée, jeudi 1er décembre, elles représentaient par exemple 9 GW, sur 12 GW de capacités venant de l’étranger.