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Le prix du carburant à la pompe suit-il vraiment le prix du pétrole ?

« Pourquoi l’essence augmente ? Parce que le brut de pétrole augmente ». Le diagnostic est signé d’Emmanuel Macron, lors de son interview télévisée de dimanche soir. Le président de la République entendait souligner que « la raison de l’augmentation, ce ne sont pas les taxes ». À l’heure d’une nouvelle hausse forte des prix du carburant, cette question de la cause de l’augmentation revient. Et, avec elle, la question de savoir si les hausses et les baisses de ce prix du pétrole se répercutent bien de façon aussi rapide et systématique à la pompe. Prix du plein et prix du pétrole sont-ils vraiment liés ?

Oui, le pétrole plus cher se répercute sur le prix du litre…

La hausse actuelle du prix est effectivement liée en grande partie à une hausse du prix du baril de pétrole en Europe. Entre juin et août, celui-ci est passé de 69 à 79 euros, soit une hausse d’environ 15 %. En parallèle, le prix du litre de gazole hors taxes a suivi la même trajectoire, avec une hausse équivalente.

De manière générale, comme le montre le graphique ci-dessus, la tendance d’évolution du prix du litre de gazole hors taxes suit globalement celle du cours du pétrole. D’après une analyse publiée en octobre 2021 par des chercheurs de la Banque de France, une variation du coût de la matière première est presque intégralement répercutée sur le prix « par toutes les stations en une dizaine de jours ouvrés ».

…mais pas dans des proportions égales

Sauf que le prix payé au moment de remplir son réservoir n’est pas celui-ci. S’y ajoutent les fameuses taxes gouvernementales, celle sur les produits énergétiques (TICPE) et celles sur la valeur ajoutée (TVA). En les prenant en compte, l’augmentation du prix du gazole entre juin et août a été moins forte que le prix du baril de pétrole brut : le litre de gazole payé à la pompe est passé de 1,68 à 1,82 € en moyenne, soit 8 % de hausse.

La nature de ces taxes permet de le comprendre : contrairement à la TVA, qui correspond à un pourcentage, la TICPE est une somme fixe déterminée chaque année. Son montant ne suit donc pas les variations de la matière première. Le poids élevé de cette fiscalité, qui pèse pour 50 à 60 % du prix du carburant, ajoute de l’inertie au prix par rapport au coût des matières premières.

Un prix à la baisse se répercute aussi

Et les baisses ? Entre avril et mai dernier, le prix du baril est passé de 77 à 70 €, soit 9 % de moins. Le prix du litre de gazole non taxé a enregistré une baisse de 10 % et celui du litre à la pompe a baissé de 6 %. Autre exemple entre juin et septembre 2022, sur fond de remise carburant financée par le gouvernement : 22 % de baisse sur le Brent, 27 % sur le litre de gazole, 17 % sur le prix payé par les consommateurs. « La réponse des stations à une baisse du coût d’achat de la matière première est similaire à la réponse à une hausse de coût », soulignaient les chercheurs de la Banque de France dans leur analyse.

La réponse des stations à une baisse du coût d’achat de la matière première est similaire à la réponse à une hausse de coût

Pourtant, quelques exemples ont de quoi interpeller. Entre octobre et décembre 2021, le baril de Brent a baissé de 72 à 66 €, soit de 8 %. Le litre de gazole non taxé, en revanche, n’est passé que de 67 à 66 centimes : moins de 2 %. Preuve que les baisses ne sont pas répercutées comme les hausses ? En réalité, la tendance longue montre surtout que le prix du baril ne se répercute pas au centime près dans le prix de vente hors taxe pratiqué, qu’il soit plus cher ou moins cher.

Le prix du baril n’est pas la cause unique des variations

Plusieurs éléments l’expliquent. D’abord, le prix du baril n’est pas le seul élément qui joue dans le coût de la matière première. Les coûts de raffinage et de transport et distribution peuvent engendrer une variation même avec un prix du baril fixe. Actuellement, ces coûts du raffinage en forte hausse pèsent d’ailleurs dans l’augmentation à la pompe. Le taux de change compte également : un baril vendu aujourd’hui au même prix en dollars peut nous coûter plus cher en euros qu’il y a quelques années. La demande mondiale pour un carburant peut aussi jouer sur les différences de prix entre prix du gazole et l’essence, par ailleurs davantage taxée.

Ensuite, comme le soulignent les chercheurs de la Banque de France, les prix des carburants « ne changent pas tous les jours, alors que c’est le cas du prix de la matière première ». Un prix affiché à la station reste fixe pendant environ 5 jours, tandis que le coût du pétrole évolue d’un jour à l’autre. Ce temps de latence explique que les variations du prix de vente soient plus « lisses ». Le choix des distributeurs peut s’y ajouter : une augmentation peut être anticipée ou répercutée plus rapidement que la baisse pour conserver des marges sur le prix de vente. Emmanuel Macron souhaite justement demander des prix coûtants sur les prochaines semaines.

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Reste à ne pas oublier, non plus, notre psychologie. Nous nous rendons plus facilement compte d’un prix à la pompe qui augmente que d’autres coûts du quotidien et nous remarquons davantage les hausses de coût subies que les baisses dont on bénéficie.