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Le train léger autonome de Taxirail s’engage sur la bonne voie

« L'Etat doit envoyer un signal clair, en ne consacrant plus aucun crédit aux lignes dont l'intérêt socio-économique n'est pas démontré ». En 2018, le rapport Jean-Cyril Spinetta sur l'avenir du transport ferroviaire jetait un pavé dans la mare. L'ancien PDG d'Air France y invitait le gouvernement à ne plus injecter un kopeck dans les petites lignes de desserte fine du territoire au motif de leur caractère ultra-déficitaire. Quatre ans et plusieurs COP plus tard, rares sont ceux qui oseraient encore entonner ce requiem.

« D'une certaine manière, le rapport Spinetta nous a rendu un fier service en braquant les projecteurs sur des alternatives comme la nôtre », constate Régis Coat, président et fondateur de  la startup Taxirail, dont le concept de train léger suscite de plus en plus d'intérêt. Épaulée par un consortium d'industriels du ferroviaire, elle est la première à avoir développé un prototype conçu précisément pour rouler sur ces lignes à faible trafic mais à fort impact, moyennant des coûts d'exploitation « environ cinq fois inférieurs » à ceux des trains classiques.

120 passagers à 60 km/h

Propulsé à l'hydrogène, l'engin sans conducteur est en réalité plus proche dans sa conception d'un ascenseur horizontal que du bon vieux Corail de grand-papa. Il se présente sous la forme d'une cabine de six mètres de long pour trois de large et est capable de transporter 40 personnes dont 16 assises à une vitesse moyenne de 60 km/h (100 en pointe). En heures pleines, trois modules peuvent être alignés au départ pour une capacité maximale de 120 passagers, tandis qu'en heures creuses, il peut se muer en transport à la demande.

« Ce que nous proposons, c'est un système adaptable et neutre en carbone qui pourra desservir des zones peu denses en équilibrant financièrement des liaisons courtes distances inférieures à 80 kilomètres », résume son concepteur.

Le projet a manifestement convaincu l'Ademe qui vient d'allouer à Taxirail la coquette somme de 13 millions d'euros, soit un peu plus de la moitié des 25 millions que l'entreprise cherche à lever pour amorcer l'industrialisation de son train léger. Une caution en argent massif pour Régis Coat. « C'est un sésame pour une startup industrielle, sachant que le retour sur investissement y est moins rapide que celui d'une appli pour vendre des pizzas » commente t-il.

« Un modèle abouti »

En attendant, la société est déjà assurée de bénéficier du soutien actif de la riche agglomération Caux Seine, proche du Havre, seule collectivité à avoir intégré le consortium réuni autour du projet. « De tous les modèles de trains légers que nous avons étudié, celui-ci est le plus abouti et le plus ambitieux. Il est incontestablement au-dessus du lot », affirme Kamel Belgachem, son vice-président en charge des mobilités. Dès l'an prochain, l'agglo mettra à la disposition de Taxirail une voie ferroviaire désaffectée d'environ 2 kilomètres pour y faire rouler le premier démonstrateur en vraie grandeur.

Objectif : éprouver la robustesse du concept avant de le déployer sur une voie ferrée de 18 kilomètres qui relie la gare de Bréauté (située sur la ligne Paris-Le Havre) à l'énorme complexe industriel de Port-Jérôme. « C'est une voie en bon état et largement sous-employée, sur laquelle ne passe qu'un ou deux trains de marchandises par jour », fait valoir le service mobilité de la collectivité. De quoi envisager y faire circuler un mini train de passagers « toutes les demi-heures voire tous les quarts d'heure », rêve tout haut Virginie Carolo, présidente de l'agglomération.

« Ce service permettrait aux nombreux salariés résidant dans les zones rurales de l'agglomération de rejoindre leur lieu de travail tout en connectant la zone industrielle à un axe ferroviaire stratégique », insiste t-elle.

Si le projet arrive à son terme, le train léger à hydrogène trouvera sur son chemin l'usine de production de H2 décarboné (Normand'Hy) dont Air Liquide vient de lancer la construction sur la commune de Saint-Jean-de-Folleville... à quelques kilomètres du futur terminus du Taxirail. « Les planètes sont alignées », en conclut Kamel Belgachem. De fait.