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Les producteurs de kiwi particulièrement touchés par le changement climatique

Trop d'eau l'hiver puis, surtout, pas assez l'été. Les producteurs de kiwis, dont les trois-quarts des volumes sont produits dans le Sud-Ouest, du Lot-et-Garonne aux Pyrénées-Atlantiques en passant par l'Occitanie, souffrent particulièrement des effets du changement climatique. Cela se matérialise par la succession de pluies diluviennes l'hiver dernier et d'une sécheresse extrême et de la grêle cet été. "J'ai de la chance, mon exploitation est située sur les coteaux, donc elle n'a pas été inondée", admet Olivier Dupuy, producteur à Sault-de-Navailles (Pyrénées-Atlantiques). Ce n'est pas le cas de ses pairs situés sur les terres fertiles de la Nive et de l'Adour, deux fleuves se jetant dans la mer à Bayonne et ayant débordé en décembre dernier, tout comme déjà en décembre 2020.

"Le niveau du lac n'a jamais été aussi bas..."

Mais ces derniers mois, c'est donc l'inverse et le manque d'eau est devenu criant :

"La grêle, on sait vivre avec. Elle avait détruit ma première récolte et d'autres depuis, j'ai à chaque fois replanté. Mais en 42 ans, le niveau du lac n'a jamais été aussi bas...", s'inquiète Olivier Dupuy.

Il faut dire que le kiwi est particulièrement gourmand en eau : "il pousse sur des lianes, qui, contrairement à des arbres fruitiers, ne peuvent réguler leurs besoins. Il ne supporte ni trop ni trop peu d'eau", explique ce spécialiste. De plus, à l'irrigation pendant l'été, qui se fait certes de plus en plus précisément, s'ajoute l'utilisation, l'hiver, de l'eau comme protection antigel. C'est pour ces raisons, "même si le kiwi demande moins de travail et est moins sensible aux maladies et agresseurs", que ce producteur a déjà réduit le nombre de plantes de ce fruit poilu de huit à deux hectares. Il songe aussi à abandonner son projet de démarrer la culture du kiwi jaune, au succès pourtant grandissant depuis son introduction il y a une quinzaine d'années.

"En plus de mes cinq hectares de pommes et cinq de poires, je vais plutôt continuer à agrandir la surface pour les abricots, pêches et nectarines, habitués au climat chaud", détaille Olivier Dupuy, avec une pointe de regret. Car il était parmi les "pionniers" du kiwi, ceux qui ont à partir de 1965 introduit le fruit poilu en France et plus particulièrement dans la vallée de l'Adour grâce à Henri Pedelucq, dont le fils en cultive toujours à Saint-Etienne-d'Orthe (Landes) et en vend à travers la société internationale de kiwi des gaves (SIKIG). Ce dernier a œuvré à l'obtention du Label Rouge ainsi que de l'IGP (indication géographique protégée), Kiwi de l'Adour, pour que le kiwi français soit synonyme de qualité pour les consommateurs (4,6 kilos consommés par ménage par an) et d'une meilleure rémunération pour les producteurs.

"Les plantations ont repris depuis deux ans"

Depuis toujours, l'équilibre de la filière dépend aussi des volumes produits dans d'autres pays. Aujourd'hui, 1.500 producteurs récoltent ce fruit entre octobre et novembre sur un total de 3.777 hectares dans l'Hexagone, d'après le Bureau national Interprofessionnel du Kiwi (BIK), faisant de la France le sixième producteur mondial et le troisième européen. Originaire de Chine, le kiwi a été popularisé par le pépiniériste néo-zélandais Hayward Wright, qui a donné son nom à la variété la plus cultivée à ce jour. La Nouvelle-Zélande est toujours le premier pays de production mondial de ce fruit apte à supporter des semaines entières de transport maritime. De plus, l'entreprise locale Zespri, numéro un mondial, fait produire sous licence dans d'autres pays, dont la France mais aussi plus récemment le Chili et le Portugal.

Le changement des conditions climatiques rend l'équation encore plus complexe pour les kiwiculteurs, alors que la création de retenues pour stocker l'eau pluviale n'est pas toujours vue d'un bon œil en France. La culture du kiwi dans le Sud-Ouest est-elle pour autant menacée à court terme ? "Elle intéresse des nouveaux producteurs", signale le BIK. Parmi eux des producteurs de foie gras, pour qui le kiwi représente une diversification bienvenue. "Les plantations ont repris depuis deux ans, mais elles ne produiront qu'à partir de leur cinquième année", ajoute l'interprofession, qui craint toutefois que l'élan soit freiné non seulement par le manque d'eau, mais aussi de "terres suffisamment qualitatives".

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