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Ligue des champions : Jurgen Klopp est-il arrivé au bout du chemin avec Liverpool ?

Cette fois, Jürgen Klopp ne peut pas se cacher derrière un calendrier démentiel. Le coach de Liverpool, qui n’a jamais hésité par le passé à dire tout le mal qu’il pensait des cadences infernales imposées par l’UEFA et les ligues, a bénéficié toute la deuxième quinzaine de septembre d’une fenêtre de travail inédite en cours de saison. Mais après cette pause de 17 jours due au décès de la reine Elisabeth II et à la trêve internationale, son équipe s’est encore pris les pieds dans le tapis face à Brighton, samedi. Deux buts encaissés après 17 minutes de jeu, et le reste passé à ramer pour finalement s’en sortir avec un foutraque match nul 3-3 à la maison, ça fait tache.

« Le niveau de confiance n’est pas extraordinairement élevé maintenant », a relevé l’ancien du Borussia après la rencontre avec une certaine expertise dans la litote. Liverpool est à la rue en ce début de saison, à 11 points du leader Arsenal en Premier League (avec un match de moins), fessé à Naples en Ligue des champions après « le pire match depuis que je suis là », comme l’a qualifié Klopp himself. Quelques mois seulement après être passés tout près d’un quadruplé historique (C1, championnat, Cup, Coupe de la Ligue), les Reds sont tombés bien bas.

Mané t’es où, pas là ?

« C’est difficile à comprendre, estimait Arsène Wenger ce week-end sur beIN Sports. Ils ont le même noyau de joueurs, le même schéma de jeu. Ils sont moins efficaces pour récupérer le ballon qu’avant. Ils ont perdu Mané, qui était un joueur de gros calibre, qui avait quelque chose [en lui], une attitude agressive et de la détermination. C’est difficile de mesurer l’impact de son départ, en tout cas il leur manque quelque chose qu’ils avaient avant. »

Le départ du Sénégalais, que personne ne souhaitait à Liverpool, est forcément un coup dur. D’autant que Darwin Nunez, son remplaçant acheté 100 millions d’euros, est seulement en cours d’évolution. Mais ça ne suffit pas à expliquer pourquoi Liverpool patauge, avec des cadres comme Salah, Fabinho, Van Dijk ou Alexander Arnold bien loin de leurs standards. Est-ce que le discours et les méthodes de Klopp, qui entame sa huitième saison sur le banc, passent toujours ? La question est posée en Angleterre.

La responsabilité de Klopp engagée

Commentaire glacial du Liverpool Echo samedi, après Brighton : « On ne peut plus dire que c’est simplement une mauvaise entame. Cette équipe est confrontée à une myriade de problèmes tactiques, techniques et mentaux, avec une incapacité à commencer les matchs avec la bonne mentalité. » La responsabilité de l’Allemand est engagée, notamment sa réticence à proposer autre chose que son immuable 4-3-3, qui a bien sûr fait ses preuves mais que tout le monde connaît maintenant par cœur.

« Pour moi, il y a deux problèmes », nous dit Salim. Le jeune homme de 27 ans, fan des Reds depuis qu’il en a 12, ne rate (quasiment) rien des matchs et l’actu de son équipe fétiche. Il alimente depuis 2018 le compte Twitter Liverpool actu France. Il détaille : « La saison dernière a été épuisante pour lui, avec 63 matchs, le quadruplé qui se profilait et au final il rate les deux titres les plus importants (Ligue des champions et Premier League). Ça n’est pas facile de se remettre de ça. L’autre chose, c’est qu’il n’a pas de plan B. Il l’a reconnu après Naples, "il est temps qu’on se réinvente". Oui, c’est l’heure, même si personnellement je pense que ça fait depuis 2020 qu’il faudrait changer des choses. »

"Personne ici ne nie le fait que nous avons eu un début de saison loin d'être idéal mais en même temps, nous voyons tous l'opportunité qui est devant nous.

Entre maintenant et la pause du Mondial nous avons que des matchs : nous devons relever ce défi."

Jürgen Klopp. pic.twitter.com/7hQwJtkSJN

— Liverpool actu France (@LiverpoolActuFR) October 1, 2022

Observateur attentif, Salim a bien vu que le coach allemand avait tenté quelques coups ces deux dernières saisons, en 4-2-3-1 ou 4-2-4, mais toujours en cours de match, et sans jamais les mettre en place sur la durée. « Le problème, c’est qu’il faut les joueurs qui vont avec et avoir le temps. Il n’a ni l’un ni l’autre », pose-t-il. Excuses à moitié recevables. Les matchs tous les trois jours n’invitent pas à la révolution générale, certes, mais n’empêchent pas de nombreux coachs de procéder à des ajustements et réfléchir à la manière de devenir moins lisible.

Quant à l’effectif, ce n’est pas si simple. Klopp n’a pas la latitude de Guardiola à City (ou de Tuchel à Chelsea avant d’être viré), c’est certain. Les propriétaires américains de Fenway Sports Group (FSG) ne sont pas du genre à gaspiller, mais ne mettent pas leur veto à quelques achats ciblés qui claquent (Van Dijk, Alisson, Salah, Keita il y a quelques années, Nunez, Jota ou Konaté plus récemment). « C’est vrai, mais il faudrait sûrement renouveler plus en profondeur l’effectif. Le nouveau cycle est engagé, mais par petites touches, en douceur. Peut-être un peu trop, juge Salim. Il manque de banc à des postes clé. »

Le changement selon Guardiola

Architecte en chef du Liverpool qui gagne des dernières saisons – et de cette politique de recrutement assez stricte –, le directeur sportif Michael Edwards est parti l’été dernier. Mais a priori, aucun grand bouleversement n’est à attendre. C’est son ancien assistant, Julian Ward, qui a pris la relève. Klopp ne s’est jamais plaint publiquement de ce manque de marge de manœuvre. Voilà ce qu’il disait à l’hiver 2021, alors qu’il n’avait pas eu les renforts réclamés : « Je ne suis plus un enfant de cinq ans, qui pleure s’il n’obtient pas ce qu’il veut. Ce que nous devons faire, c’est nous améliorer dans les domaines que l’on a en charge, et ne pas rester immobile, déçu ou frustré par certaines décisions. » Des mots toujours valables aujourd’hui.

Or, pour durer dans les hautes sphères, il faut du changement. Pep Guardiola l’expliquait dans un entretien avec Rio Ferdinand pour BT Sport, l’année dernière. « Tu avais la même équipe lors de ton premier titre et de ton sixième titre ?, demandait-il à l’ancien défenseur de Manchester United. Non. Tu dois changer des choses. Avec les mêmes gars, pour moi c’est impossible. Au début, ils acceptent des choses. Mais quand tu as gagné, ensuite ils acceptent moins. Vous devez faire ce processus [de changement]. »

this went wrong pic.twitter.com/Xne5amWaJM

— Gerrard (@TheGerrardWay) October 2, 2022

Klopp est-il capable de donner un nouveau souffle à Liverpool ? On en vient là à la question qui fâche. Car ce qu’a réussi l’Allemand est historique. Il faut se souvenir où étaient les Reds avant qu’il ne débarque et offre une Ligue des champions, le premier titre de champion depuis trente ans, une Supercoupe d’Europe, un Mondial des clubs et deux coupes nationales à des supporteurs qui n’y croyaient plus. Avec un entraîneur comme ça, aussi installé, éminemment respecté par tout le monde, on ne sait jamais bien quand il est temps de dire stop.

« Si ça devait s’arrêter, ça viendrait de Klopp lui-même »

Pour Salim, les dirigeants n’oseront jamais le toucher. « Il a leur soutien total, car malgré les contraintes, il les a toujours protégés publiquement, n’a jamais mis la faute sur eux, rappelle-t-il. Si ça devait s’arrêter, ça viendrait de Klopp lui-même, du fait qu’il sente qu’il ne peut plus rien apporter. » Or, contre toute attente, le double champion d’Allemagne a décidé en avril dernier de prolonger son contrat de deux ans, jusqu’en 2026, alors qu’il avait souvent dit que son aventure dans le Merseyside n’irait pas plus loin que 2024. C’est bien qu’il doit avoir une idée derrière la tête pour éviter au vieux couple qu’il forme avec Liverpool de se vautrer dans une routine mortifère.

« Même si là c’est compliqué, j’ai confiance en lui. Pas mal de fans pensent que c’est la fin, moi non », assène Salim. On sera de toute façon assez vite fixés. Après les Rangers ce mardi soir en Ligue des champions, Liverpool va affronter le leader Arsenal puis son dauphin Manchester City en Premier League en l’espace d’une semaine. S’il faut relancer la machine, c’est maintenant ou jamais.