France
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« Nos frangins » : autopsie d’une double bavure policière

Le cinéaste Rachid Bouchareb poursuit son travail de mémoire avec son film qui rappelle les deux morts tragiques de Malik Oussekine et d’Abdel Benyahia, la nuit du 5 au 6 décembre 1986.

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Deux jeunes vies arrachées, à quelques heures d’intervalle. Celle d’Abdel Benyahia, 19 ans, tué par balles devant un café de Pantin (Seine-Saint-Denis), par un policier alcoolisé, armé bien que relevé de son service. Et celle de Malik Oussekine, 22 ans, massacré à coups de pied et de matraque par trois CRS, dans le hall d’un immeuble du 6e arrondissement de Paris. Ces deux morts tragiques, injustifiables, survenues dans la nuit du 5 au 6 décembre 1986, dissimulées aux familles aussi longtemps qu’il fut possible, au nom de la raison d’Etat, sont aujourd’hui rappelées à notre mémoire par Nos frangins, de Rachid Bouchareb.

Le film arrive en salle quelques mois après sa présentation en avant-première à Cannes, et la diffusion sur la plate-forme Disney+ de la série en quatre épisodes Oussekine, d’Antoine Chevrollier. Un format long qui a permis d’étendre le récit sur plusieurs années. A l’inverse, le dixième long-métrage de Rachid Bouchareb resserre le sien sur quelques jours seulement, tranche dans le vif, découpe les événements à la lame d’un couteau, touche à l’os la douleur des familles. Le réalisateur ne s’embarrasse pas d’ostentation, ne tient pas de discours et ne cherche aucunement à nous tirer les larmes. Les images d’archives, dont use abondamment le film, s’en chargent. Elles constituent la matière première – et irréfutable – du scénario, servent de point d’ancrage à la part fictionnelle de Nos frangins, et à ses personnages réels ou inventés. Par elles s’ouvre le film.

Début décembre 1986, la France va mal, agitée depuis des semaines par des manifestations étudiantes protestant contre le projet de loi Devaquet. Au journal d’Antenne 2, le présentateur Bernard Rapp annonce l’intervention « en ce moment même » du premier ministre, Jacques Chirac, sur les sujets qui préoccupent les Français : l’université, les grands projets sur la santé, le code de la nationalité, la cohabitation… Des reportages de terrain montrent des scènes d’affrontement entre étudiants et forces de l’ordre, des jeunes confiant leur « ras-le-bol », Charles Pasqua, ministre de l’intérieur, les qualifiant de « professionnels de la déstabilisation, gauchistes et anarchistes de tout poil et de toutes nationalités ». Ces actualités datent de plus de trente ans. D’emblée pourtant, elles nous apparaissent familières, proches, quasi identiques à celles de notre époque. Nous voilà renvoyés à cette évidence que rien n’a vraiment changé.

Maquiller les faits

Ce qui suit nous y conforte de manière plus sensible et bouleversante par le basculement du collectif à l’individuel. Nous sommes à l’institut médico-légal, où le corps d’Abdel Benyahia vient d’être déposé. Sur place, l’inspecteur de l’IGS Daniel Mattei (Raphaël Personnaz) recueille les premiers éléments de l’enquête. Le jeune homme, dont la famille habite La Courneuve, a été abattu à Pantin par un policier chez qui a été détecté 1,86 gramme d’alcool dans le sang. Le père (Samir Guesmi) et le frère (Lais Salameh) de la victime attendent dans une pièce à côté.

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