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Pauvreté, pensions de retraite et magouilles ministérielles

 Depuis trois mois les négociations annuelles entre les enseignes de la grande distribution et leurs fournisseurs se déroulent sous tension. Elles portent sur les volumes commandés et les prix payés aux fournisseurs qui livreront des produits alimentaires entre mars 2023 et février 2024. Dans un communiqué publié le 2 février, la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL) de la FNSEA faisait le constat suivant concernant les produits laitiers: « Six ans après le discours de Rungis d’Emmanuel Macron, l’aval de la filière ne semble toujours pas avoir compris le sens de la construction du prix en marche avant. Si la loi EGAlim 1 a permis quelques avancées, la loi EGAlim 2, entrée en vigueur l’année dernière, peine à donner tous les effets escomptés en ces temps d’inflation destructrice pour les trésoreries. La matière première agricole n’est pourtant plus négociable. Les échos que nous recevons des boxes de négociations indiquent que sous couvert de défense du pouvoir d’achat, prétexte habituel, certaines enseignes refusent les hausses au titre de la matière première industrielle qui n’est, elle, pas sacralisée. Les laiteries mettant par conséquent le pression sur les organisations de producteurs, par exemple en dénonçant les contrats-cadres pour chercher à faire signer en direct des producteurs sous la menace d’un arrêt de collecte. Le FNPL dénonce avec la plus grande des fermetés ces pratiques qui tentent d’affaiblir les organisations de producteurs dont le rôle est crucial dans la juste rémunération des éleveurs ».Le coup tordu annoncé par Bruno Le Maire 

Les négociations entre les distributeurs et leurs fournisseurs sont devenues plus difficiles depuis que Bruno Le Maire a déclaré, le 16 en janvier, que la ministre déléguée aux PME Olivia Grégoire discutait avec la grande distribution pour établir une liste d’une vingtaine de produits sur lesquels les distributeurs s’engageraient à avoir « les prix les plus bas possibles, en ciblant les produits de première nécessité ». Il se dit que cette liste de produits ne sera pas connue avant la mi-mars , ce qui laisse entendre que le gouvernement attend la fin du marathon entre les enseignes et leurs fournisseurs pour faire la faire connaître. En attendant, le ministre de l’Economie et des Finances a délivré, sans doute de manière intentionnelle, un message d’encouragement aux distributeurs pour arracher des rabais à leurs fournisseurs. La FNPL fait savoir que son réseau est déjà en action pour dénoncer cette manière de peser sur la négociation sur la fixation annuelle des prix depuis la promesse du « panier anti-inflation de Bruno Le Maire ». Notons à ce propos que le ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté Alimentaire est demeuré muet sur le sujet. 

Quand Marc Fesneau évoque « les lois dites CHASSAIGNE »

Mais dans une note aux rédactions publiée ce même 2 février, les journalistes étaient informés d’une « visite officielle de M.Olivier Dussopt , ministre du Travail, du Plein emploi et de l’Insertion , et de Marc Fesneau ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté Alimentaire, dans le Tarn vendredi 3 février(…) Dans un premier temps, Olivier Dussopt et Marc Fesneau se rendront sur une exploitation à Saint-Jean-Du-Puy, spécialisée dans la production de céréales et d’ail rose de Lautrec (IGP). Après une visite du site, ils échangeront avec les retraités agricoles ayant bénéficié des effets des lois dites »CHASSAIGNE« , visant à rehausser les pensions des chefs d’exploitations et de leurs conjoints et évoqueront les textes actuellement discutés au Parlement sur ce thème ».En mission pour défendre le projet de loi du gouvernement sur la réforme des retraites centré sur un recul de l’âge donnant droit à une pension complète, les deux ministres entendaient aussi utiliser au profit du gouvernement les avancées obtenues par André Chassaigne, député communiste du Puy-de-Dôme et président du groupe de la Gauche démocratique et sociale (GDR) à l’Assemblée nationale . Pour faire passer ces deux texte en 2020 et 2021, André Chassaigne a mené une longue bataille. Ce fut pour améliorer les pensions des chefs d’exploitation à travers le premier texte, des conjoints collaborateurs et des aides familiaux avec le second. Un paysan retraité des Côtes d’Armor qui fut aide familial pendant dix ans, puis chef d’exploitation pendant 31 ans sur une ferme de 36 hectares a vu sa pension mensuelle passer de 858€ à 1034€, suite à l’adoption des deux lois Chassaigne.

Les lois Chaissaigne sont des avancées, la loi Borne et un recul 

Il s’agit donc d’avancées réelles pour des centaines de milliers d’agriculteurs et de leurs épouses qui furent surtout des conjoints collaborateurs. Certes, la portée des deux textes qu’André Chassaigne a réussi à faire passer via la procédure des « niches parlementaires » a été atténuée par les amendements des députés majoritaires fidèles au président Macron. Néanmoins, ces lois améliorent sensiblement les retraites agricoles. La démarche commune d’Olivier Dussopt et de Marc Fesneau dans le Tarn cherchait à donner l’illusion que l’actuel projet du gouvernement est aussi favorable au monde du travail en général, que furent les lois « CHASSAIGNE » pour les paysans, les conjoints collaborateurs et les aides familiaux.  Ainsi, pendant que les distributeurs s’opposent à l’application des deux lois EGAlim, le ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté Alimentaire se tait sur le sujet. Mais il a trouvé le temps d’accompagner le ministre Dussopt, désormais rattrapé par une affaire(1), pour pour défendre une réforme injuste. 

(1) Voir l’Humanité de ce 6 février en page 4