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Pierre Goldman et Georges Kiejman, deux hommes face à la machine judiciaire

Pour éclairer ce film exceptionnel, il nous fallait une interview exceptionnelle. Dans le Procès Goldman, le réalisateur Cédric Kahn nous invite à juger de l’innocence ou la culpabilité de Pierre Goldman, condamné en 1974 en première instance à la réclusion criminelle à perpétuité pour quatre braquages à main armée, dont le dernier a entraîné la mort de deux pharmaciennes et pour lequel il clame son innocence. On juge un militant d’extrême gauche, écrivain, mais on juge surtout un juif. C’est comme cela que Goldman, qui deviendra journaliste à Libération, le voit, du moins à cette époque de sa vie, avec en étendard son autobiographie retentissante écrite en prison, Souvenirs obscurs d’un juif polonais né en France. A ses côtés un jeune avocat, conseiller des éditions Gallimard et inconnu au pénal : le regretté Georges Kiejman, qui va s’imposer comme redoutable ténor du barreau, futur ministre de la Justice.

En obtenant en 1976 l’acquittement de ce ténébreux client, il tiendra sa première grande victoire. A l’été 2015, il nous avait accordé un long entretien sur ce procès mythique, acceptant de se replonger quarante ans en arrière pour raconter un des moments les plus marquants de sa carrière, avec son flegme mémorable mais où l’émotion affleure. C’est cet entretien inédit que nous publions aujourd’hui, avec l’accord de sa famille. «Il y a eu plusieurs coups de tonnerre» dans ce procès, nous dit-il, mais si le Procès Goldman se nourrit des autres moments de l’audience, c’est parce qu’«aux assises, la vraie plaidoirie arrive toujours trop tard. Ce qui compte, c’est ce qui est acquis au cours des débats». Nous y voilà : le cinéma français a connu nombre de chefs-d’œuvre grâce au processus judiciaire, de l’Affaire Dreyfus de Georges Méliès (1899) à Anatomie d’une chute de Justine Triet (2023). Et si le Procès Goldman rejoint cette liste prestigieuse, c’est parce que ce n’est pas un juif que les spectateurs doivent juger, mais bel et bien le système judiciaire lui-même.