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Quand le pouvoir se pousse du col roulé [Le point de vue de CL]

Quand le pouvoir se pousse du col roulé [Le point de vue de CL]

Par Maurice BONTINCK - m.bontinck@charentelibre.fr, publié le 28 septembre 2022 à 21h55, modifié à21h55.

Retrouvez notre éditorial du jeudi 29 septembre.

C’est un détail pour nous mais pour eux ça semble dire beaucoup. Voir Bruno Le Maire se mettre en scène en col roulé, Elisabeth Borne parader en doudoune et même un député de la majorité - Gilles Le Gendre - expliquer qu’il arrête le sèche-linge pour étendre ses vêtements...

C’est un détail pour nous mais pour eux ça semble dire beaucoup. Voir Bruno Le Maire se mettre en scène en col roulé, Elisabeth Borne parader en doudoune et même un député de la majorité - Gilles Le Gendre - expliquer qu’il arrête le sèche-linge pour étendre ses vêtements laisse pantois. On pourrait s’arrêter là, dépité face à cette grosse ficelle infantilisante pour expliquer comment économiser de l’énergie. Mais la colère est mauvaise conseillère. Alors on essaie de comprendre cette façon de nous prendre par la main en se montrant exemplaire.

Aussi dérisoire que cela puisse paraître, ces artifices sont le symbole d’un choix politique : éviter la mise en place de contraintes. Tant pis pour le ridicule parce que l’idée est de démontrer que l’addition des comportements individuels évitera que l’on passe à la caisse. La première limite est le sentiment d’inéquité qui renforce le ressentiment de déconnexion des « élites ». Tout comme Agnès Pannier-Runacher, la ministre de la Transition énergétique qui demandait en mai d’envoyer moins de « mails un peu rigolos aux amis avec une pièce jointe » , cette communication paternaliste contraste avec les réserves de ces mêmes ministres quand la question leur est posée sur des sujets moins anecdotiques. Cette même ministre balaie d’un revers la limitation des jets privés. De la même façon, taxer les superprofits des entreprises ayant bénéficié des crises est écarté par Bruno Le Maire. Avec le même argument dans les deux cas : cela ne serait pas « efficace ». Ce serait même « à côté de la plaque » pour la ministre. Mais pourquoi faire passer le message qu’un col roulé est exemplaire sans prendre en considération ces sujets, alors que même le chef économiste de la Banque centrale européenne suggère de taxer hauts revenus et superprofits pour financer les aides aux plus démunis face à l’inflation et donc le choc énergétique ?

Ces « écogestes » gouvernementaux ne peuvent être compris et acceptés que si le gouvernement montre sa réelle volonté de voir les efforts partagés par tous selon ses moyens. Ce n’est pas le cas aujourd’hui, les « écogestes » de Total à la pompe lui suffisent. Cette communication au mieux maladroite a un autre effet plus pervers. Malgré les discours sur l’indispensable prise en compte du réchauffement climatique et de la crise énergétique, ces mises en scène font croire que seuls les individus changeront les choses. Que le système doit s’adapter et pas se transformer. Et que si vous ne mettez pas votre col roulé dans votre maison non chauffée, c’est vous qui allez en payer les conséquences.