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RENCONTRE Shalva Sutiashvili, ex-joueur du SAXV: sa vie charentaise au goût de Géorgie

Jamais un mot plus haut que l’autre, même quand il faut surmotiver ses troupes dans le vestiaire en tant que joueur et désormais entraîneur à Barbezieux : il s’impose par son calme, sa discrétion et surtout son exemplarité. « Il vient d’une autre planète, celle où donner sa parole veut encore dire quelque chose », dit de lui, admiratif, son ancien président au SAXV, Didier Pitcho.« Il était à la Coupe du monde...

Jamais un mot plus haut que l’autre, même quand il faut surmotiver ses troupes dans le vestiaire en tant que joueur et désormais entraîneur à Barbezieux : il s’impose par son calme, sa discrétion et surtout son exemplarité. « Il vient d’une autre planète, celle où donner sa parole veut encore dire quelque chose », dit de lui, admiratif, son ancien président au SAXV, Didier Pitcho. « Il était à la Coupe du monde 2015, il allait être titulaire contre les Blacks quand je l’ai appelé pour le faire venir. ça s’est fait tout de suite, comme ça, au téléphone. »

Il vient d’une autre planète, celle où donner sa parole veut dire quelque chose.

Après le mondial, il quitte Massy et la région parisienne pour rejoindre le SAXV. Cela va bientôt faire neuf ans qu’il est installé en Charente. Malgré sa retraite sportive en 2022 et son attachement à son pays natal, « Suti » se voit mal quitter sa maison de Saint-Yrieix, « sur le parking de Nautilis » comme il dit, pour aller voir ailleurs si l’herbe est plus verte.

Le dernier de ses quatre enfants est né ici. Tout comme ses projets pour l’après-carrière. Parce que ce rugby pratiqué sur le tard à 17 ans n’est pas toute sa vie ; c’est surtout ce qui l’a construit en tant qu’homme. « Jamais je n’aurais pensé avoir cette vie-là quand j’ai commencé à travailler à Leroy Merlin en Géorgie, alors que j’’étais encore très jeune, ou quand j’étais agent de sécurité la nuit, avant d’aller à l’université le matin et à l’entraînement le soir, raconte-t-il, posé ce midi-là aux Halles d’Angoulême devant une bière et ses souvenirs. Je ne m’attendais pas à avoir autant de respect. Peut-être aussi parce que les gens ont beaucoup de respect pour les sportifs », s’interroge-t-il tout haut.

Une boisson « made in Géorgie »

Sa carrière touchant à sa fin, le rugbyman a commencé à endosser un nouveau maillot, celui d’entrepreneur. Avec un objectif précis en tête : mettre en valeur son pays et les produits issus de son agriculture. « Je voulais proposer des produits sains, 100 % naturels, tout en exportant notre patrimoine ».

En 2019, il lance « Suti Power », un bonbon énergétique traditionnel qu’il revisite pour en faire la nourriture de sportifs. Là encore, cela passe par la parole : « Je suis allé voir les magasins, les équipes, mes connaissances pour leur proposer ». Le produit plaît, se retrouve dans des clubs de rugby mais aussi au sein de l’armée géorgienne, son pays qui en a fait un héros national quand il était un joueur cadre des « Lelos ».

Depuis le début du mois, une boisson à base de fruits et légumes commence à être proposée à différents commerces en Charente. Les bouteilles « Bon et bien » dans le coffre de sa voiture, il part démarcher à travers la Charente ‘’à l’ancienne’’ comme on pourrait le dire d’un joueur de rugby qui met l’honnêteté, la franchise et la tape dans la main au sommet de ses valeurs et de son contrat social et humain.

Le nouveau coach de Barbezieux s’est lancé un nouveau défi entrepreneurial en lançant sa boisson « Bon et Bien ».
Le nouveau coach de Barbezieux s’est lancé un nouveau défi entrepreneurial en lançant sa boisson « Bon et Bien ».

C’est encore artisanal dans l’esprit mais la démarche est professionnelle tout comme la création au pays d’un produit qu’il aimerait aussi proposer aux Ehpad. « Ce n’est pas toujours facile avec les contraintes administratives mais j’y crois beaucoup, je me bats pour que ça fonctionne. » Ne rien lâcher, être toujours en activité, au four et au moulin. Comme sur le terrain.

Un Mondial regardé en solitaire

Il ne le dira pas - sa parole est aussi pudique - mais ce n’est pas un hasard s’il a commencé à lancer son produit au début de la Coupe du monde de rugby. Le premier Mondial sans lui depuis 2011, lui qui a participé aux trois dernières épreuves et même fait toute la préparation de 2007 avant de se blesser au dernier moment.

Se relancer dans les affaires tout en entraînant à Barbezieux, lui permet de ne pas trop gamberger. À quelques kilomètres de la Charente, la Géorgie a pourtant posé son camp d’entraînement sur l’île de Ré. Après avoir beaucoup réfléchi, il ne va pas aller voir une équipe et un staff qu’il connaît « à 95 % ». « Je ne veux pas les déranger », dit-il dans un premier temps.

La langue se délie quand on s’étonne que lui, « papa » de l’équipe pendant tant d’années avec 82 sélections au compteur, « papa » aussi de nombreux joueurs géorgiens venus en France et qu’il aide souvent à s’installer jusqu’à les héberger, préfère rester chez lui. « Quand tu vas les voir, il y a toujours du monde autour, il faut retenir les émotions. Je préfère rester chez moi, devant la télé tout seul, pour ne pas retenir ces émotions. »

À bientôt 40 ans, au détour d’une phrase, il glisse avoir pensé poursuivre sa carrière jusqu’à cette dernière coupe du monde. La réalité physique a fini par le rattraper, comme une forme de nostalgie. « Ce n’est pas de la jalousie de ne pas y être mais j’ai toujours beaucoup de stress à les regarder. » L’ex-capitaine finira par aller voir ses troupes. S’il hésite encore à les retrouver samedi contre les Fidjiens à Bordeaux, il ne manquera pas le dernier match à Nantes contre le Pays de Galles, le 7 octobre. Avec beaucoup d’émotion et une parole rare tant elle est précieuse pour « Suti ».

En dates

24 janvier 1984. Naissance à Tbilissi.
2005. Première de ses 82 sélections avec la Géorgie. Participe à trois coupes du monde (2011, 2015, 2019).
2015. Après la coupe du monde, il quitte le club de Massy et débarque en Charente, au SAXV. Il y jouera 95 matches jusqu’en 2022, date à laquelle il met fin à sa carrière de joueur.
2019. Il lance « Suti Power », en utilisant la recette typiquement géorgienne d’un « bonbon énergétique », produit 100 % naturel à base de jus de raisin et de fruits secs. Un produit encore utilisé aujourd’hui par de nombreux clubs sportifs mais aussi l’armée française ou géorgienne.
2023. Il devient l’entraîneur-adjoint de l’Union Barbezieux-Jonzac après avoir coaché les moins de 16 ans la saison précédente.
Septembre 2023. Il lance un nouveau produit « Bon et bien », fruits et légumes à boire, fabriqué en Géorgie et commercialisé en France.