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[Retraites agricoles] Le ministère lève le voile sur la loi des "25 meilleures années"

À l’Assemblée nationale, l’examen du projet de loi sur la réforme des retraites se déroule dans une ambiance électrique, après la mobilisation dans les rues d’au moins 1,2 million de personnes, les 19 et 31 janvier 2023, et les nouveaux appels à manifester le 7 et le 11 février. Parmi les syndicats contestataires, la Confédération paysanne et le Modef.

Pendant ce temps, du côté des agriculteurs, on s’interroge aussi sur les conséquences de la proposition de loi sur les retraites agricoles, portée par le député Julien Dive (LR) et adoptée définitivement le 1er février. Son objectif : calculer les pensions des exploitants sur leurs 25 meilleures années et non plus sur l'ensemble de leur carrière. Toutefois, rien n’est dit dans ce texte quant aux nouvelles modalités de calcul des retraites agricoles. De celles-ci dépendront les gains que les agriculteurs peuvent espérer. Le gouvernement doit les présenter dans un rapport dans trois mois.

Alors que le gouvernement doit rendre un rapport dans trois mois sur les mesures opérationnelles de la loi sur "les 25 meilleures années", le ministère de l’Agriculture nous livre ses premières pistes de réflexion. Marc Fesneau a répondu par écrit aux questions de La France Agricole.

Comment seront déterminées les 25 meilleures années ?

Il y a plusieurs modalités à examiner permettant de mettre en œuvre une telle évolution, comme un alignement sur les règles existantes pour le régime des salariés et des indépendants non agricoles. Mais il y a également d'autres modalités envisageables au regard, notamment, de l'architecture du régime de retraite des non-salariés agricoles et de ses spécificités. Ce sera tout l'enjeu du rapport prévu par cette PPL (proposition de loi) que d'examiner ces différentes modalités et de regarder les avantages, les inconvénients, les capacités opérationnelles à les mettre en œuvre, et les effets sur les différentes situations individuelles rencontrées.

Qui seront les premiers agriculteurs concernés par ce nouveau mode de calcul ? Tous les statuts (chef d’exploitation, conjoint, aide familial) seront-ils pris en compte ? Quelles règles de calcul s’appliqueront aux polypensionnés ?

Le rapport évoquera ces éléments et notamment l'année de mise en œuvre d'une telle évolution, en particulier au regard des capacités opérationnelles. En effet, si on part sur les 25 meilleures années de revenus, il faudra surmonter une difficulté technique dans la mesure où la MSA ne conserve que 8 années de revenus au maximum et qu’il faudra transformer, par un calcul à rebours, les points acquis en revenus.

Tout dépend donc du schéma cible qui sera retenu : une carrière agricole, comme dans tous les autres secteurs, n'est pas linéaire. Bien souvent un exploitant a eu des carrières de salarié, de membres de famille ou dans d'autres régimes avant d'être chef d'exploitation. Cette réforme, si elle est mise en œuvre, devra à mon sens concerner tous les statuts de non-salariés agricoles, c'est-à-dire les périodes de chefs et les périodes de conjoints collaborateurs. Il faudra également s'interroger sur l'articulation avec les autres régimes puisque les non-salariés agricoles ont des carrières de polyactifs (actuellement, les trois quarts des retraités sont polypensionnés).

Quel gain de retraite les agriculteurs peuvent-ils espérer ?

Tout dépendra du schéma retenu. C'est bien trop tôt pour le dire, et encore plus pour le chiffrer.

Envisagez-vous de maintenir le régime par points ? Faut-il supprimer le palier des 30 points ?

Encore une fois, c'est trop tôt pour le dire. Le maintien du régime par points a des avantages puisqu'il permet d'éviter de devoir transformer les revenus, mais, dans le même temps, il est un peu original d'envisager un régime en points qui ne retiendrait que les 25 meilleures années. Cela doit se regarder dans le détail.  Le palier des 30 points n'est pas dû au hasard et a une certaine pertinence. Il doit être lu en conjonction avec l'existence d'une retraite forfaitaire et l'objectif d'octroyer un taux de remplacement équivalent au taux de remplacement de 50 % dans les régimes alignés avant application de la PMR (pension majorée de référence).

Ce barème de la retraite forfaitaire, avec les paliers, a des composantes permettant d'assurer une certaine redistributivité interne au régime, et c'est un des éléments forts du régime de vieillesse des non-salariés agricoles. Ce principe de redistributivité, et la solidarité qu'il manifeste, me semble un élément important qu'il ne faut pas forcément remettre en cause.  

Envisagez-vous de simplifier le système de retraite agricole de base ? Par exemple en fusionnant la retraite forfaitaire et proportionnelle ?

Le régime de retraite agricole souffre d'un certain manque de lisibilité. Et il me semble important, dès que l'on peut, d'essayer de le rendre plus lisible. J'observe cependant qu'aucun régime des retraites n'est vraiment parfaitement lisible puisque, par essence, les droits créés sont liés à la carrière de l'assuré et ces carrières ne sont jamais linéaires et uniformes. Donc, oui, nous essaierons si nous le pouvons de rendre le régime plus lisible. C'est d'ailleurs un des objectifs affichés dans la proposition de loi et le rapport devra prendre en compte cet objectif. 

Quel sera le coût global de ce nouveau mode de calcul ? Comment sera-t-il financé ? Les cotisations des actifs risquent-elles d’augmenter ?

Cela dépendra du schéma retenu in fine, mais il est clair que toute évolution du régime doit prendre en compte l'effort contributif des assurés, d'autant que le régime actuel dépend majoritairement de la solidarité nationale. J’ai compris que certaines organisations professionnelles étaient prêtes à regarder ce sujet.