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Retraites : la troisième journée de mobilisation en trois reportages

Pour le mouvement contre la réforme des retraites, c’est un premier reflux. Dans la rue pour la troisième fois mardi, les opposants au report à 64 ans de l’âge légal de fin d’activité étaient 757 000 selon le ministère de l’Intérieur, près de 2 millions selon la CGT. Deux estimations inférieures à celles des mêmes sources le 31 janvier : avec 1,27 million de participants selon le ministère et 2,8 millions selon la CGT, la mobilisation avait été la plus importantes des dernières décennies. Dans la fonction publique ce mardi, le taux de grévistes était de 11,4 %, contre 28 % le 19 janvier et 19,4 % le 31.

Pas alarmés, les organisateurs ont mis en cause le début des vacances d’hiver dans la zone A (comprenant notamment Lyon et Bordeaux) et l’approche d’une autre journée de marche à la date plus favorable, samedi. Et alors que l’Assemblée a entamé lundi l’examen de la réforme en séance publique, plusieurs syndicats appellent à durcir le mouvement. Le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez a menacé le gouvernement de grèves «plus dures, plus nombreuses, plus massives et reconductibles». Le président de la CFTC Cyril Chabanier a lui aussi évoqué de possibles «grèves reconductibles et des blocages». Le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, a préféré appeler à «amplifier» le mouvement qu’à le «durcir».

Depuis le début de la mobilisation, derrière l’opposition à la réforme, c’est le rapport des Français au travail et à ses effets qui se fait jour dans les témoignages recueillis par les reporters de Libération. Comme pour Corentin, libraire à Vincennes (Val-de-Marne) : «Contrairement à ce que l’on pourrait penser, on ne fait pas que de la lecture. Nous avons beaucoup de manutention, c’est un travail très physique.» A seulement 30 ans, le jeune homme souffre déjà «d’une hernie et de problèmes de dos. C’est courant. Alors travailler à plus de 60 ans, ce n’est juste pas possible».

Le sujet n’a pas échappé au gouvernement qui, depuis quelques jours, le remet ostensiblement à l’agenda. Le ministre des Comptes publics Gabriel Attal et le porte-parole du gouvernement Olivier Véran ont ainsi évoqué des «réflexions» sur la semaine de quatre jours (à temps de travail constant). Et le ministre du Travail Olivier Dussopt a consacré de longues tirades au sujet lundi, en ouverture des débats en séance publique à l’Assemblée. «Cette réforme est une première étape, une condition pour pouvoir penser sereinement notre rapport au travail», a-t-il lancé, annonçant un projet de loi dédié au printemps. Ce mardi, à Paris, Marseille, Valenciennes et ailleurs, il en aurait fallu bien davantage pour convaincre les manifestants.

A Paris, «aucun collègue ne s’imagine pouvoir continuer à travailler jusqu’à 67 ans»

Dans les rues de Paris, ce mardi. (Boby/Libération)

Pierre porte une veste cirée marine, des lunettes de soleil et une pancarte sur laquelle il est écrit : «La macronie, c’est fini !» Il est assis seul sur les marches de l’Opéra Garnier à Paris et contemple la foule. C’est sa toute première manifestation contre la réforme des retraites, sa toute première mobilisation tout court. Agé de 37 ans, il bosse dans une grosse agence de communication. «Je suis le stéréotype de la start-up nation, se présente-t-il d’emblée. Je suis de ces gens qui n’avaient pas vraiment d’opinions politiques ou d’idéaux, et qui ont voté Macron deux fois par pur égoïsme et logique de classe socio-économique. Mais aujourd’hui je suis là, parce que je ne suis plus un mouton.» Lire notre reportage à Paris.

A Marseille, «je ne vous dis pas dans quel état je suis déjà»

140 000 personnes ont manifesté à Marseille selon la CGT. (Patrick Gherdoussi/Libération)

Lundi soir, à la va-vite, Rose a scotché de l’adhésif sur son gilet jaune pour y écrire «Atsem en colère». Ce mardi matin, c’est la troisième fois qu’elle rejoint la mobilisation marseillaise avec sa collègue Isabelle, elle aussi Atsem (agente territoriale spécialisée des écoles maternelles) dans un établissement de Pertuis, près d’Aix. Rose a 47 ans et n’officie comme Atsem que depuis trois ans. Mais déjà, malgré la «passion», la fatigue lui parle. Lire notre reportage à Marseille.

A Valenciennes, «qu’ils viennent donc monter 400 voitures en une seule journée !»

A Valenciennes, ce mardi. (Hugo Clarence Janody/Libération)

«Toutes les 57 secondes, on fait un véhicule» : Abderrahim, 50 ans, est chef d’équipe chez Toyota, syndiqué à FO. Il ne voit pas comment les salariés de l’usine automobile d’Onnaing pourraient tenir au travail jusqu’à 64 ans. «Malgré tous les efforts que fait Toyota pour ajouter des assistances où il y a du lourd porté de façon répétitive, cela reste du travail à la chaîne.» Il décrit sa charge physique et mentale, la constante adaptation qu’exigent les crises successives. Lire notre reportage à Valenciennes.