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Salaires des profs : « Il faut valoriser les enseignants en milieu de carrière », estime Eric Charbonnier de l'OCDE

Une étude qui sera particulièrement scrutée. Alors que le ministère de l’Education démarre ce lundi sa concertation avec les syndicats enseignants au sujet des augmentations des enseignants, l’OCDE sort son étude Regards sur l’éducation. Celle-ci montre que les salaires des enseignants français en milieu de carrière (ayant 15 ans d’expérience) sont inférieurs à la moyenne de ceux de leurs collègues des pays de l’OCDE. Une situation que décrypte pour 20 Minutes Éric Charbonnier, spécialiste de l’éducation à l’OCDE.

Votre étude montre que les enseignants français du secondaire en milieu de carrière gagnent 16 % de moins que leurs confrères des autres pays de l’OCDE. Comment l’expliquez-vous ?

La France a choisi d’avoir une progression de carrière lente pour ses enseignants, à l’instar du Portugal. Dans notre pays, il faut 35 ans d’expérience aux enseignants pour passer du salaire de départ au salaire le plus élevé, contre 26 ans en moyenne dans les pays de l’OCDE. A contrario, au Royaume-Uni, les salaires des enseignants progressent très vite, mais ils arrivent aussi rapidement au plafond.

Cela est notamment dû au système très administratif de notre fonction publique, où les salaires évoluent d’après un barème de points, où les évolutions de salaires sont mécaniques et où les agents sont peu évalués. Il faut rappeler que les enseignants n’ont en tout et pour tout que trois entretiens de carrière, alors que dans d’autres pays de l’OCDE, ils sont évalués chaque année.

Vous montrez pourtant que les gouvernements précédents ont fait quelques efforts pour les revaloriser…

Il y a eu une volonté de faire mieux depuis deux quinquennats, ce qui a permis aux salaires des profs de milieu de carrière de progresser de 4 % entre 2015 et 2021. Mais sachant que les salaires des profs avaient peu progressé les 30 dernières années, cela n’a pas réellement changé la donne : on vit moins bien en France en étant prof aujourd’hui qu’il y a trente ans. Aussi bien en début de carrière qu’au milieu.

Pourquoi les enseignants en élémentaire ayant 15 ans d’expérience sont-ils encore moins bien lotis ?

En 2020-2021, ils gagnaient 19 % de moins que la moyenne de leurs confrères de l’OCDE. Leurs collègues de collèges et lycées touchent des primes (notamment pour être prof principal, pour assurer les séances de devoirs faits…), ce qui n’est pas leur cas. Par ailleurs, ils font moins d’heures supplémentaires que leurs camarades du secondaire.

Cette situation peut-elle expliquer l’augmentation des démissions dans l’Education nationale ces dernières années ?

Pour une part, oui, car les salaires ne sont pas très attractifs et certains profs préfèrent changer de métier pour mieux gagner leur vie. Mais les démissions sont aussi dues aux mauvaises conditions de travail de certains enseignants.

Un phénomène que l’on voit aussi en Allemagne, où certains démissionnent car ils estiment que les exigences à leur égard sont trop fortes. D’où l’importance aussi, pour le gouvernement français, de travailler sur le bien-être enseignant.

Les négociations entre les partenaires sociaux démarrent ce lundi concernant les augmentations. Les syndicats ont-ils raison de croire que les profs en milieu de carrière seront les dindons de la farce ?

A partir du moment où le ministère déclare que plus aucun enseignant ne démarrera à moins de 2.000 euros nets en 2023, on a de bonnes raisons de croire que l’augmentation sera plus forte en pourcentage pour les profs débutants que pour ceux en milieu de carrière. C’est déjà un premier pas pour restaurer l’attractivité du métier. Les enseignants en milieu de carrière toucheront aussi des augmentations liées aux nouvelles missions. Mais cela ne veut pas dire qu’ils ne seront pas davantage augmentés au cours du quinquennat. Il faut les valoriser et leur permettre des évolutions de carrière.