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« Sans filtre » : la lutte des classes et des genres selon le réalisateur Ruben Ostlund

Palme d’or à Cannes en mai, la nouvelle satire du cinéaste suédois ouvre grand les vannes du nihilisme clinquant.

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Pour Ruben Ostlund, il ne faut plus attendre grand-chose de nos contemporains : le capitalisme a liquidé les dernières parcelles d’humanité, ne restent plus que des marionnettes dans un monde coupé en deux, les unes courbant l’échine, les autres triomphant dans le commerce, jusqu’à vendre « de la merde », comme l’assume ce vacancier milliardaire à bord d’un yacht, qui a fait fortune dans les mines antipersonnel.

Il n’y a plus qu’à tirer la chasse, nous dit en substance – et en images – le réalisateur dans un clin d’œil appuyé à La Grande Bouffe (1973), de Marco Ferreri. Mais ce qui apparaissait comme subversif dans les années 1970 n’est plus qu’un énième débordement en 2022. Avec Sans filtre (Triangle of Sadness), Ruben Ostlund a reçu une nouvelle fois la Palme d’or à Cannes en mai, des mains du président du jury, Vincent Lindon, après l’avoir obtenue en 2017 avec The Square, satire au vitriol de l’art contemporain.

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Durant deux heures trente, le film prend son temps pour faire rendre gorge à ses personnages, dans un divertissement en trois tableaux, mêlant lutte des classes et des genres (le matriarcat en prend aussi pour son grade). Les acteurs sont très bons, mais la fâcheuse tendance du réalisateur à nous expliquer la vie en long et en large (dès la première scène) est un poil arrogante, pour ne pas dire superflue. Car ce qu’il nous dit n’est pas si nouveau. L’acte I nous plonge dans le milieu de la mode et des mannequins, où l’on découvre, en plein shooting, un jeune modèle mélancolique, Carl (Harris Dickinson), les sourcils continuellement froncés – tel est le « triangle de tristesse » qui donne au film son titre international.

En pilote automatique, devant les photographes, Carl sait parfaitement sourire pour les marques bon marché, ou jouer le dur pour la haute couture. Sa fiancée, le top model Yaya – Charlbi Dean, actrice et mannequin, morte il y a quelques semaines, lundi 29 août, à l’âge de 32 ans –, passe son temps à « poster » sa vie de rêve sur les réseaux sociaux. Sa beauté lui permet de se faire inviter, avec Carl, sur une croisière de luxe (acte II), où le petit personnel a appris à dire oui à tout. Le moment venu, le capitaine du yacht (Woody Harrelson), défaillant, livrera quelques moments d’hilarité.

Aucune vision politique

La croisière, sa mouise : il faudra une tempête et un naufrage pour réinitialiser les rapports de classe. Le groupe de rescapés sur une île déserte va se retrouver sous la coupe d’une employée subalterne du yacht, celle-ci reprenant le pouvoir sur un mode bête et méchant (acte III). Salauds de pauvres ! A certains endroits, la comédie de Ruben Ostlund respire le nihilisme basique. Peut-être est-ce pour cette raison que le réalisateur a pu observer que « la presse de gauche » n’aimait pas son film. Sans filtre ne s’embarrasse d’aucune vision politique, celle-là même qui habitait un autre huis clos sur les riches et les pauvres, le virtuose et glaçant Parasite (2019), du Sud-Coréen Bong Joon-ho, lui-même auréolé de la Palme d’or.

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