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Séisme en Turquie : comment les secours français vont tenter de sauver des vies dans les prochaines heures

Le bilan humain ne cesse de s’alourdir depuis lundi, après le séisme de magnitude 7.8 et ses répliques qui ont fait plusieurs milliers de morts en Turquie et en Syrie. Une course contre la montre est engagée pour retrouver des survivants, avec désormais l'appui précieux sur le terrain de secouristes français. Explications avec le colonel Arnaud Wilm, porte-parole de la Sécurité civile française, au ministère de l’Intérieur.

La France se mobilise, comme d’autres pays, pour venir en aide aux victimes des séismes. Quelles sont les unités déjà envoyées sur place ?

Depuis le début du séisme, dans la nuit de dimanche à lundi, à 2 h 16 heure de Paris (4 h 16 à Ankara), la Turquie a sollicité rapidement l'aide internationale et le mécanisme de protection civile de l'Union européenne a été déclenché. 45 pays sont mobilisés actuellement, plus des associations humanitaires.

La France a répondu à cet appel en envoyant en Turquie deux détachements de sauveteurs spécialistes des techniques de sauvetage : 70 sapeurs sauveteurs, des militaires de la sécurité civile et 70 sapeurs-pompiers de la région Ile-de-France, assistés de dix chiens formés à la recherche de personnes dans les milieux effondrés. Ils partent avec 42 tonnes de matériel.

Une première équipe est arrivée sur place, elle a été affectée sur le secteur de Hatay (zone située dans le sud de la Turquie, limitrophe de la Syrie), la seconde est partie mardi, à 14 h 15 de Roissy et rejoint Gaziantep, l'épicentre.

La France a un savoir-faire particulier dans ce type de situations de crise ?

Oui, ses méthodes de sauvetage sont nées dans les bombardements de la Seconde guerre mondiale. Elles se sont largement développées, depuis, avec l'appui de nouveaux outils techniques. Nous avons aujourd'hui une expertise reconnue dans le monde entier.

Ces équipes Husar (Heavy urban search and rescue), des unités lourdes de recherche et sauvetage en milieu urbain effondré, vont travailler ainsi en totale autonomie. Elles vont installer leur camp de base, avec leur propre eau, nourriture, on ne demande rien au pays qui nous accueille, et elles vont travailler 24h/24 pendant dix jours pour aller chercher des victimes.

Quelle sera leur mission ?

On va commencer par une phase de ratissage, une reconnaissance à pied, avec des chiens, on va marquer les premières victimes et va débuter la recherche et le sauvetage des personnes facilement accessibles, en enlevant les décombres sélectionnés avec minutie.

Puis va intervenir une phase plus critique, d'ici 48 heures, la recherche de victimes dans des endroits plus difficilement accessibles, avec des techniques d'intervention plus lourdes.

On va utiliser des appareils d'écoutes pour localiser les victimes. On va mobiliser nos chiens qui peuvent marquer des personnes assez profondément en fonction des effluves et se faufiler dans des endroits inaccessibles à l'homme. On va avoir aussi recours à des flexicams, des caméras sur des tiges télescopiques flexibles qui permettent d'aller en profondeur pour identifier d'éventuelles zones de refuge.

Nous pourrons ensuite procéder à des percements de dalles de béton, le dégagement des décombres, des levages de charge pour créer des tunnels, extraire des victimes et les transporter vers des centres médicaux.

La dernière phase, au bout de quelques jours, quand l'urgence est éteinte, parce qu'il n'y a plus d'espérance de vie, c'est une phase de déblai généralisé, une phase sanitaire, où on recherche des corps.

Le colonel Arnaud Wilm, porte-parole de la Sécurité civile en France.
Le colonel Arnaud Wilm, porte-parole de la Sécurité civile en France.

Pendant combien de temps pouvez-vous avoir l’espoir de trouver des survivants ?

Pendant les 48 à 72 premières heures, les chances sont fortes. Au-delà, cela va dépendre des endroits et de l'état de la victime. Vous avez des effondrements à plat, en millefeuilles, avec toutes les dalles qui se superposent, là il n'y a quasiment aucune chance de vie.

Mais il y a aussi des effondrements obliques, ou en V qui créent des niches, des zones refuge avec de l'oxygène. Si des personnes ont de l'eau avec elles, voire un peu d'alimentation, on a des chances de les retrouver vivantes même au bout d'une semaine.

Le froid, la pluie, la neige compliquent la situation...

Oui, le froid rend la situation très compliquée pour les victimes qui sont en hypothermie, mais aussi pour les sauveteurs français. Même s'ils ont la chance d'être bien équipés, ce sont des situations de vie très rustique sous tente, où on mange des rations, et les conditions de recherche sont très éprouvantes. Il ne pleut pas pour l'instant, mais des pluies peuvent venir aggraver le danger avec des glissements de terrain. Comme conditions d'intervention, c'est difficile de faire plus compliqué.

Ce qui fait la difficulté de cette intervention, c'est aussi l'ampleur de la catastrophe sur un périmètre très vaste, avec énormément de victimes.

Tout cela nous rappelle que les tremblements de terre sont les catastrophes naturelles les plus dévastatrices : 56% des victimes de catastrophes naturelles le sont par les tremblements de terre qui ne représentent, pourtant, que 8% des catastrophes naturelles.

D'autres équipes françaises vont partir sur place ?

Une équipe associative, Pompiers de l'urgence internationale, s'est mobilisée, mais elle ne dépend pas du canal gouvernemental.

L'envoi de renforts gardois avec la création d'un hôpital de campagne (L'Escrim, pour Elément de Sécurité civile rapide d’intervention médicale) est par ailleurs à l'étude (le Sdis du Gard envoie pour cela une équipe de cinq personnes en reconnaissance en Turquie pour étudier les conditions de son implantation, NDLR).