La signification du mot jalle est aussi méconnue que sa fonction. Elle est pourtant cruciale pour assurer la pérennité des activités au nord de Bordeaux Métropole. La jalle est une appellation gasconne pour désigner des cours d'eau capables de réguler et d'alimenter le cycle des zones humides ou submersibles. L'envasement progressif de ces 15 canaux drainants aménagés au 17e siècle, pour une longueur totale de 50 kilomètres aujourd'hui, constituait une menace accrue pour la presqu'île d'Ambès où sont implantés bourgs, vignobles et industries.
« Sans les jalles, la plupart de la presqu'île serait une zone de marais », explique Adrien Maufrangeas, chargé de mission Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations pour Bordeaux Métropole. « L'envasement est naturel mais il est deux à trois fois plus rapide si l'ouvrage ne fonctionne pas. » Le chantier, dont un des lots a été attribué à Vinci et Artelia, vise ainsi à libérer les jalles de la vase et de la végétation qui empêchent l'écoulement de l'eau vers les fleuves. Les canaux sont également élargis et leurs ouvrages d'évacuation réhabilités.
Le climat submerge les activités industrielles de l'estuaire de la Gironde (1/4)
L'opération débutée en 2016 va se poursuivre jusqu'en 2026 pour un montant total de 16 millions d'euros. La contribution métropolitaine, qui s'élève à 60 % de l'enveloppe, est principalement abondée par la taxe Gemapi (gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations), appliquée depuis cette année sur le foncier bâti. Elle s'élève entre 5 et 8 euros par unité foncière. Les 40 % restants sont financés par l'État.
La réhabilitation s'effectue par creusement de la jalle et renforcement des berges. (crédits : MG / La Tribune)
Maintient des activités pour le moment
Mais ces aménagements se montreront certainement insuffisants dans un contexte de montée du niveau des eaux et d'intensification des phénomènes climatiques extrêmes. Les élus anticipent ainsi un renforcement du système de digue de la presqu'île sans pour autant envisager leur rehaussement dans l'immédiat. Selon eux, les nombreuses activités industrielles implantées sur ce bout de terre n'ont pas à envisager un repli stratégique. Dépôt pétrolier, complexe portuaire, fabricants de produits chimiques ou sites logistique sont exposés directement aux aléas de l'estuaire de la Gironde.
« Toutes les installations industrielles prennent en compte le Plan de prévention du risque inondation, il y a des rehausses des sites d'activités, parfois protégées par des systèmes d'endiguement. Mais il n'y a pas d'industrie qui nous dit : "La marée monte, on s'en va !" On n'en est pas là », recadre Alexandre Rubio, maire (PS) de Bassens. « Il n'en demeure pas moins qu'il faudra qu'on ait une réflexion dans le cadre de la stratégie par grands territoires sur ceux qui ont plutôt vocation à être sanctuarisés parce qu'ils sont soumis à un risque important. Tout en déterminant quels sont les moyens qui nous permettront de nous adapter sur les autres. »
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