L’ancien président de la République est mort mercredi des suites du Covid-19. Beaucoup se souviendront de son engagement en faveur de l’Europe, de ses réformes sociétales, ainsi que de son style unique.
Plus jeune président de la Ve République lorsqu’il est élu en 1974, Valéry Giscard d’Estaing, âgé de 94 ans, est mort, mercredi 2 décembre des suites du Covid-19, « entouré de sa famille » dans sa propriété d’Authon dans le Loir-et-Cher. Son décès a suscité une vague d’hommages au sein de la classe politique française et européenne, ainsi que des messages nostalgiques. Pour beaucoup, il restera une figure de la vie politique française, un fondateur de l’Europe et l’incarnation d’un nouveau style présidentiel.
Un Européen convaincu
Le négociateur en chef pour les Européens, Michel Barnier, a rappelé sur Twitter l’engagement européen de l’ancien président, pour qui « l’Europe devait être une ambition française et la France une nation moderne ».
Lire aussiL’ancien président a, en effet, œuvré pour la construction européenne durant son septennat, avant de revenir sur le devant de la scène 20 ans plus tard, à la tête de la convention chargée d’élaborer un projet de constitution de l’Union européenne. Le « non » des Français à ce texte lors du référendum de mai 2005 fut pour lui une immense déception, et il préféra l’imputer à un rejet de la politique intérieure française plutôt qu’au projet lui-même.
Dans ses mémoires, Le Pouvoir et la vie, Valéry Giscard d’Estaing affirme que les deux personnages de la vie politique nationale et internationale qui lui ont fait la plus grande impression sont Charles de Gaulle et Jean Monnet, l’un des pères fondateurs de l’Europe.
L’ancien chef de l’Etat, Nicolas Sarkozy, a fait part de sa « grande tristesse » mercredi après la mort de Valéry Giscard d’Estaing, saluant « un homme qui a (…) toute sa vie œuvré au renforcement des liens entre les nations européennes, cherché et réussi à moderniser la vie politique et consacré sa grande intelligence à l’analyse des problématiques internationales les plus complexes ».
La France « perd un homme d’Etat qui a fait le choix de l’ouverture au monde », a déclaré l’ancien président François Hollande, saluant un homme « résolument européen » mais qui n’a « pas toujours été compris ». Il a rappelé les réformes menées par M. Giscard d’Estaing qui a aussi « contribué au renforcement du couple franco-allemand, à la mise en place de l’union monétaire et à l’ouverture du Marché commun ».
Un engagement européen également relevé par Rachida Dati, ancienne ministre de la justice et maire Les Républicains (LR) du 7e arrondissement de Paris. « L’idéal européen perd l’un de ses fondateurs, la France, un Président qui lui a apporté modernité et audaces », abonde le président de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand.
Un homme de réformes
Droit à l’avortement, vote à 18 ans, indépendance énergétique nucléaire ou encore instauration du divorce par consentement mutuel : autant de ses réformes sociétales qui ont été mises en avant par Jean-Christophe Lagarde, le président de l’Union des démocrates et indépendants (UDI), Xavier Bertrand, président de la région Hauts-de-France, Yannick Jadot, député européen EELV, et Matthieu Orphelin, député ex-La République en marche (LRM).
A l’instar de Roselyne Bachelot, ministre de la culture, qui a salué au Sénat « l’auteur de nombreuses réformes novatrices qui marquent encore aujourd’hui la société française ».
« Les jeunes et les femmes ont trouvé avec lui une place nouvelle dans la République », insiste Jean-Pierre Raffarin, ancien premier ministre (2002-2005), sur Twitter.
Rachid Temal, vice-président du groupe Parti socialiste (PS), rappelle également que c’est « celui qui lança le programme Ariane et Musée d’Orsay ».
Article réservé à nos abonnés Lire aussiUn président moderne
Giscard a également su imposer un style nouveau, allégeant la pompe présidentielle lorsqu’il s’invite à dîner chez les Français ou joue de l’accordéon. Il se voulait l’incarnation d’une modernité triomphante, issue du centre droit libéral et démocrate-chrétien qui a bâti l’Europe d’après-guerre.
Dans les messages d’hommage, sa modernité revient souvent. Ainsi, Damien Abad, patron des députés LR, évoque un président « qui a fait entrer la France dans l’ère moderne » sur Twitter, quand Christian Estrosi, maire LR de Nice, parle de celui qui « a contribué à façonner la Ve République ».
Interrogé par l’Agence France-Presse (AFP), François Bayrou, le président du MoDem, rend hommage à un homme qui « dominait par la vivacité de son intelligence et la force de ses intuitions ». « Pour des générations entières, notamment pour ceux qui se sont engagés auprès de lui dans leur jeunesse, il a fait souffler un grand vent de modernité sur la société française et fait naître un immense espoir de dépassement et de rassemblement. »
« Sa défaite en 1981 a marqué pour la France un tournant vers le déclin », va jusqu’à écrire Eric Ciotti, député LR des Alpes-maritimes.
Article réservé à nos abonnés Lire aussiPour Marine Le Pen, présidente du Rassemblement national, « il fut l’artisan de nouvelles libertés publiques et un ardent soutien du progrès technologique ».
Valéry Giscard d’Estaing en quelques dates
2 février 1926 Naissance à Coblence (Allemagne)
1944-1945 A 18 ans, il s’engage dans la première armée française du général de Lattre de Tassigny et est décoré de la croix de guerre
1946-1948 Elève de l’Ecole polytechnique
1949-1951 Ecole nationale d’administration
1952 Epouse Anne-Aymone Sauvage de Brantes
1er janvier 1954 Inspecteur des finances
1955 Directeur adjoint du cabinet du président du Conseil, Edgar Faure
1956 Elu député du Puy-de-Dôme
1959 Secrétaire d’Etat aux finances
1962 Ministre des finances de Georges Pompidou
1966 Elu à la tête de la Fédération nationale des républicains indépendants
1967 Elu maire de Chamalières dans le Puy-de-Dôme
1969 Ministre de l’économie et des finances de Jacques Chaban-Delmas
1972 Ministre de l’économie et des finances de Pierre Messmer
1974 Elu président de la République
1974 Nomme Jacques Chirac à Matignon
1975 La loi Veil autorise l’interruption volontaire de grossesse
1976 Raymond Barre, premier ministre après la démission de Jacques Chirac
1978 Création de l’Union pour la démocratie française (UDF)
1979 Le Canard enchaîné révèle l’affaire des diamants offerts par l’empereur Bokassa
1981 Battu par François Mitterrand au second tour de l’élection présidentielle
24 septembre 1984 Redevient député du Puy-de-Dôme
21 mars 1986 Elu président du conseil régional d’Auvergne
30 juin 1988 Président de l’Union pour la démocratie française (UDF)
1988 Sortie du premier tome de ses mémoires « Le Pouvoir et la Vie »
1989 Elu député européen.
2001-2003 Préside la Convention sur l’avenir de l’Europe
11 décembre 2003 Elu à l’Académie française
2 décembre 2020 Mort à l’âge de 94 ans à Authon dans le Loir-et-Cher
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