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Une journée internationale sans téléphone pour «faire réfléchir sur l'usage du portable»

RÉCIT - Phil Marso, un libraire français, a créé la journée internationale sans téléphone en 2001. Depuis, elle se tient chaque année le 6 février, jour de la Saint Gaston, en référence à la chanson de Nino Ferrer.

Une journée sans toucher son téléphone portable. C'est le pari fait par Phil Marso, un ex-auteur français de polars, en 2001, alors que cet accessoire ne servait encore qu'à téléphoner. Aujourd'hui, ce défi paraît insurmontable tant l'objet est ancré dans chacune de nos tâches quotidiennes. Pourtant, cette journée est devenue avec le temps un véritable rendez-vous, célébré chaque année en France comme à l'étranger.

C'est en prenant les transports en commun que l'idée d'une journée sans portable est venue à Phil Marso : «Je me suis rendu compte que le téléphone prenait de l'importance alors que peu de gens en possédaient un en 1999.» L'écrivain avait déjà étudié son usage dans son «polar humoristique», Tueur de portable sans mobile apparent, publié en janvier 1999. Mais il ne voulait pas «s'arrêter là.»

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En créant cette journée internationale sans téléphone, l'auteur aujourd'hui âgé de 60 ans, a souhaité «proposer un débat autour de cet outil qui était sur le point de bouleverser nos vies. Afin que les gens s'en rendent compte.» Celui qui possède toujours «un fixe» chez lui et dans sa librairie du 13e arrondissement de Paris assure ne pas être «contre la technologie.» «Je possède un smartphone», assure-t-il en riant, mais seulement pour «appeler, envoyer des SMS, prendre des photos et encaisser mes clients.»

Engouement international

Pour le choix de la date de cet événement mondial, il a «tout de suite pensé à la chanson de Nino Ferrer» pour son célèbre refrain : «Gaston, y a l' téléfon qui son, et y a jamais person qui y répond.» La Saint Gaston étant le 6 février, «j'ai décrété dans mon coin que ce serait aussi la journée internationale sans téléphone.»

Phil Marso, à l'occasion de la Fête du Livre à Bray-Dunes en 2022. Fête du Livre à Bray-Dunes en 2022

Mais comment faire passer le message ? À partir d'octobre 2000, soit quatre mois avant la première édition, Phil Marso a envoyé tous les jours un communiqué de presse aux journalistes pour annoncer l'événement. «Mon but est de lancer un appel chaque année» et «que les médias en parlent», précise-t-il. Un pari réussi puisque dès janvier 2001, Phil Marso est invité sur le plateau de l'émission On a tout essayé diffusée sur France 2 et présentée par Laurent Ruquier. Il a également participé à la matinale de France Inter «aux retentissements importants», notamment à l'échelle internationale.

«À ma grande surprise, c'est le Canada qui a réagi en premier», au mois de décembre 2000, se souvient-il. Les interviews se sont enchaînées rapidement à la radio et dans la presse. Il a même participé à un duplex en direct le soir du 6 février sur une chaîne de télévision nationale : «J'étais plus médiatisé à l'étranger qu'en France». Au fil des années, l'Espagne, le Sénégal et le Maroc ont repris l'événement en créant une journée «Téléphone Mobile Muet» pour protester contre les hausses des tarifs.

Défis sans smartphone

Pour favoriser une «réflexion autour d’usage du téléphone» et ne pas être «éclipsé par les grosses actualités», Phil Marso a décidé en 2004 d'étendre cette journée internationale à trois jours : du 6 au 8 février. Au programme, diverses activités réalisées par le créateur. En 2003, il avait par exemple suggéré «trois tranches horaires de coupures pour sensibiliser les automobilistes», alors que le thème de l'année était la sécurité routière.

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Phil Marso a également «imaginé un questionnaire» destiné aux enseignants pour «débattre des différents aspects du téléphone avec leurs élèves.» Cette année, un débat est ouvert sur «le smartphone sauve-t-il des vies ?» En 2017, il lance les «six défis sans smartphone» : sortir dans la rue, se photographier devant une fontaine, acheter et envoyer une carte postale... Le tout sans son téléphone. Si aucune audience autour de cette journée n'est connue, ce retour dans le passé est apprécié par un petit nombre. «J'ai déjà reçu quelques cartes postales», se réjouit-il.

Un rendez-vous ancré

Phil Marso se félicite de voir que son «initiative a été dépassée ces trois, quatre dernières années.» «Les médias, les pompiers et les gendarmeries s'emparent de cette journée», notamment pour «faire de la prévention.» Cependant, il regrette que les associations et institutions, telles que la Sécurité routière et l'Éducation nationale, utilisent l'événement sans le contacter.

«Je trouve ça hallucinant, j'ai dû déposer une marque car une association avait tenté de piquer mon idée en 2003», évoque le libraire. «Les associations ne veulent pas travailler avec moi car elles pensent que je fais tout ça pour vendre mon livre, explique-t-il. Et l'Éducation nationale ne me laisse pas intervenir dans les écoles pour faire des conférences car je ne suis pas une association.»

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Déçu, Phil Marso avait décidé de ne pas communiquer l'événement aux médias cette année. Une première depuis sa création, en 2001. «Je ne voulais rien faire en 2023, mais une invitation par une école belge m'a relancé, s'enthousiasme-t-il. Ça prouve que le rendez-vous est ancré dans le calendrier.»