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Vers Jupiter et ses lunes glacées

La communauté scientifique en parle comme du plus grand événement de 2023. En avril prochain, l’Agence spatiale européenne (ESA) lancera la mission « Juice » (Jupiter Icy Moons Explorer), chargée notamment d’explorer, comme son nom britannique l’indique, les trois lunes glacées de Jupiter : Ganymède, Europe et Callisto. Avec Io, quatrième satellite, le seul à ne pas être recouvert de glace mais de feu et de volcans, elles constituent les quatre lunes « galiléennes », découvertes en 1610 par Galilée, auquel rend hommage une plaque fixée sur la sonde qui va filer vers la géante gazeuse.

Juice est la première mission du vaste programme de l’ESA « Vision cosmique 2015-2025 », qui doit répondre à quatre problématiques : quelles sont les conditions d’émergence de la vie et de la formation des planètes ? Comment fonctionne le Système solaire ? Quelles lois fondamentales régissent l’Univers ? Comment est-il né et de quoi est-il constitué ? Pour éclairer ces deux premières interrogations, la sonde va observer en continu le système de Jupiter et son champ magnétique, sorte de Système solaire en miniature. « On va explorer la planète géante, les trois lunes glacées, les autres petites lunes, Io, les anneaux de poussière… L’accent sera mis notamment sur Ganymède, la plus grosse lune du Système solaire (plus grosse que Mercure), précise Olivier Witasse, planétologue et responsable scientifique de la mission Juice à l’ESA . On pense que ces trois lunes possèdent un océan d’eau liquide sous leur surface, et, qui dit eau liquide, dit peut-être la vie. »

Construite à Toulouse par Airbus, la sonde va être lancée depuis Kourou en Guyane par une fusée Ariane 5, dont ce sera l’ultime décollage avant de céder sa place à Ariane 6. Une fenêtre de tir est prévue entre le 5 et le 30 avril prochain. Le périple interplanétaire de Juice devrait durer une douzaine d’années, le temps de parcourir quelque 2 milliards de kilomètres.

Plus d’eau salée que sur terre ?

La sonde ne va pas foncer directement vers Jupiter : elle va arpenter pendant plusieurs années le Système solaire. « Juice va voyager entre avril 2023 et juillet 2031, précise Olivier Witasse. On appelle cette phase la “croisière”, mais elle ne sera pas de tout repos. On va faire une vérification des instruments tous les six mois. » L’engin spatial fera une révolution autour du Soleil avant de survoler la Terre en 2024, puis Vénus, et à nouveau deux fois la Terre. Pourquoi ces détours ? Pour utiliser au mieux les nombreuses « assistances gravitationnelles », l’attraction des différents corps célestes permettant de modifier, en direction et en vitesse, la trajectoire de l’engin spatial. « On ne peut pas aller tout droit vers Jupiter en raison de la masse élevée du satellite Juice – 6 tonnes, explique Olivier Witasse . On va donc gagner de l’énergie en tournoyant autour d’autres astres avant de se lancer.  »

L’étape scientifique de Juice dans le système jovien doit démarrer en juillet 2031. La sonde spatiale survolera durant au moins trois ans, et à plusieurs reprises, les lunes glacées de Jupiter, où la présence d’eau liquide est possible sous la surface gelée, et potentiellement celle de formes de vie extraterrestre. Puis, elle se placera, en 2034, en orbite autour de Ganymède, point final de sa mission, pour étudier sa surface et sa structure interne dans laquelle un immense océan d’eau salée serait prisonnier. Un volume liquide peut-être supérieur à celui sur Terre ! Ganymède possède aussi son propre champ magnétique, phénomène très rare pour un satellite et surtout indispensable pour maintenir la vie et la protéger des rayonnements venant de l’espace. Juice tournera ensuite autour durant une année, jusqu’à fin 2035, puis elle sera écrasée à sa surface. Au total, l’ESA envisage plus de 30 survols des lunes de Jupiter.

Olivier Witasse se félicite que de nombreux Français soient présents dans toutes les équipes scientifiques, afin de préparer la mission en amont et récolter la moisson de données. La France est un gros contributeur de la mission Juice. « Elle fournit notamment un spectromètre imageur dans les longueurs d’ondes visibles et infrarouges, détaille le chercheur . Cet instrument va être utilisé dans l’analyse des surfaces des lunes glacées de Jupiter, de leurs atmosphères très fines et aussi de l’atmosphère de Jupiter. »

Pour célébrer le lancement de la sonde spatiale, l’ESA invite le public à réaliser un « Space Juice », un cocktail évoquant un des éléments scientifiques de la mission, ou Jupiter et ses satellites, et à le poster sur un réseau social avec le hashtag #SpaceJuice… Évidemment, on the rocks !