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Violences conjugales : les victimes bientôt exemptées de commissariat

Il s’agit d’une « mesure essentielle qui est une révolution », selon le président Renaissance de la commission des lois, Sacha Houlié. Le 25 novembre, l’élu évoquait dans le Journal du Dimanche la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi), qui doit passer ces jours-ci en commission mixte paritaire. L’un des points de ce texte concerne les violences conjugales.

Désormais, une victime pourra « déposer une plainte au siège de l’association qui l’accompagne, à domicile, ou au sein de l’hôpital où elle se rend pour faire constater les violences », énumérait l’élu. Des brigades vont aussi être créées à titre expérimental pour cinq ans, afin d’aller à la rencontre des femmes en milieu rural.

Cela va-t-il permettre d’améliorer le taux de plaintes, qui est jusqu’à présent une faiblesse du système français ? En effet, selon les données du ministère de la justice, seule une victime de viol sur dix porte plainte, et 80 % des plaintes sont classées sans suite.

Un réel soulagement

Les associations le pensent. « Cela va permettre à la victime de préparer et de déposer sa plainte dans les meilleures conditions possibles, dans un lieu adapté, qui garantit la confidentialité », avance Clémence Pajot, présidente de la Fédération nationale des centres d’information sur les droits des femmes et des familles (FNCIDFF). L’avocate spécialisée Emmanuelle Rivier renchérit : pour des victimes en état de choc, ne plus avoir à pousser la porte d’un commissariat constitue un réel soulagement : « Sortir de chez soi pour déposer plainte était rédhibitoire, tout simplement parce qu’elles ont peur. »

Surtout, ce nouveau système pourrait assurer que les plaintes soient mieux prises « par des agents formés et que les victimes pourront être assistées par une association ou un avocat », poursuit la juriste. Car aujourd’hui, « l’aléa joue encore beaucoup. Selon l’heure et l’endroit, il arrive encore de tomber sur des membres des forces de l’ordre qui renvoient les victimes chez elles, considérant qu’il s’agit d’une simple dispute privée, ou parce qu’ils ne constatent ni bleus ni traces de coup », raconte Emmanuelle Rivier.

Rompre l’isolement

Autre point bénéfique : le cas des femmes isolées en milieu rural sera mieux pris en compte. C’est le point de vue du capitaine Pierre Dubos, chef de la police municipale de Luçon (Vendée) : « Jusqu’à présent, certaines victimes ne pouvaient pas porter plainte. Comment auraient-elles pu se rendre en commissariat ou en gendarmerie à 50 km de chez elles, quand elles n’ont pas de voiture ? » Le fait que les forces de l’ordre puissent aller à leur rencontre, afin de rompre leur isolement, avait été identifié comme une priorité par la sénatrice Annick Billon (UDI, Vendée), dans son rapport de 2021 « pour lutter contre les zones blanches de l’égalité ».

Ce nouveau dispositif représente donc une avancée et consacre aussi une évolution déjà menée ces dernières années, au sein de la gendarmerie notamment. « Grâce à cette loi nous allons pouvoir monter en puissance, mais nous avons déjà déployé des dispositifs pour aller vers les victimes depuis deux ou trois ans », expose la lieutenante-colonelle Dorothée Cloître, référente nationale en matière de violences intrafamiliales.

« Cela nous permet de travailler en synergie avec les associations, les services sociaux, les médecins, ce qui est fondamental. On ne peut pas lutter contre les violences conjugales uniquement dans nos bureaux, en agissant seulement sur le plan du suivi judiciaire. Il faut aussi mobiliser tout un tas de dispositifs d’accompagnement social de la victime si l’on veut qu’elle quitte son compagnon violent », conclut la gendarme.