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France: face à la suppression du corps diplomatique, appel à la grève inédit des diplomates

C'est d'habitude un univers feutré, mais qui sort de sa réserve. Le corps diplomatique français n'est pas content, et le fait savoir. Ce sera une journée de grève historique prévue pour ce jeudi 2 juin. Les langues se délient sur les réseaux sociaux notamment, avec un mot clé : #diplo2métier.

C’est un mouvement qui couvait depuis des mois, voire des années, cristallisé par une réforme entrée en vigueur en pleine élection présidentielle : la publication au Journal Officiel d'un décret actant la suppression du corps diplomatique français.

Pour résumer les choses, jusqu'alors, les hauts fonctionnaires rattachés au ministère des Affaires étrangères y menaient toute leur carrière. C'est désormais fini : ils rejoindront à partir de 2023 le « pot commun » des administrateurs de l'État et pourront être affectés à d'autres ministères.

►À lire aussi : La France officialise la suppression de son corps diplomatique

Ce sera la fin, craignent-ils, de la diplomatie de métier, qui aurait un effet néfaste sur l'action de la France dans le monde. C’est un fait rare : 500 de ces diplomates ont publié une tribune chez nos confrères du quotidien Le Monde pour dénoncer ce décret.

Le mot clé #diplo2métier

Depuis, les langues se délient, avec ce mot clef sur les réseaux sociaux : #diplo2métier. Ce sont des centaines de témoignages de diplomates et même parfois d'ambassadeurs en poste. La teneur des messages est souvent la même : soutien à la grève de demain, un rappel que la diplomatie est un métier, comme l'indique le cri de ralliement du mouvement. Il s’agit d’un rappel pour dire que les postes ne sont donc pas interchangeables, notamment parce qu'ils touchent des domaines très variés.

Je ferai grève le 2 juin, contre la suppression du corps diplomatique français. On ne s’improvise pas diplomate, on le devient. Le Quai d’Orsay n’est pas le Programme ERASMUS. #diplo2metier

— Brice Fodda (@Brice_Fodda) May 27, 2022

Les exemples tirés de l'actualité récente se multiplient : guerre en Ukraine évidemment, évacuation en Afghanistan après la prise de pouvoir par les Talibans, rapatriement de Français au début de la pandémie. Mais plus proche de nous : tout le personnel consulaire en charge du quotidien des Français de l'étranger.

Derrière ce mot clé, tous les professionnels de la diplomatie lèvent un voile sur leur métier d'habitude si secret, avant le mouvement social prévu pour ce jeudi 2 juin, un mouvement inédit.  Les diplomates reçoivent d'ailleurs le soutien de personnalités, comme l'ancien ministre des Affaires étrangères, Dominique de Villepin, qui dénonçait sur Twitter la suppression du corps diplomatique et y voyait une faute historique. Hier, il réclamait encore la suppression du projet.

Des assises de la diplomatie ?

Quelle peut donc être la suite après ce mouvement de grève ? Les grévistes appellent à la tenue d'assises de la diplomatie au plus vite, pour renouer un dialogue avec l'exécutif. Reste à voir si ce dernier saisira la balle au bond. La nomination récente de Catherine Colonna pourrait en tout cas favoriser cette issue. Diplomate de carrière, son arrivée à la tête du ministère des Affaires étrangères est vue par certains comme un message à destination des personnels du Quai d'Orsay, le signe d'une volonté de renouer le dialogue.

Le chantier s'annonce énorme. Ce décret mettant fin au corps diplomatique n'est en fait que la dernière étincelle qui a permis au brasier de s'allumer. Cela fait des années que les agents déplorent une réduction continue de leurs moyens, qu'ils soient humains ou financiers. Le premier mandat d'Emmanuel Macron n'a pas non plus arrangé les choses, la diplomatie étant une des prérogatives du président.

Cela a particulièrement été marqué les cinq dernières années.  Le chef de l'État s'est même permis de tancer les diplomates en dénonçant il y a trois ans, devant eux, l'existence d'un état profond au quai d'Orsay. Le torchon brûle et la diplomatie française en pâtit, depuis l'adoption de l'Accord de Paris sur le climat en 2015. « Quels ont été les grands succès ? » demande un ambassadeur qui fait partie du mouvement.