Nous avons suivi le communiqué de la CEDEAO sur la Guinée, après la réunion des chefs d’Etats le 4 décembre 2022 à Abuja. De ce texte, on retient essentiellement l’appel à un dialogue inclusif, qui pourrait se tenir – éventuellement – hors de la Guinée. Nous donnons ci-après, la position de notre parti sur le Dialogue et sur d’autres questions politiques relatives à la Transition.
1. SUR LE DIALOGUE INTER-GUINEEN
Depuis le 5 septembre 2021, nous n’avons cessé d’appeler à une concertation large, inclusive entre toutes les forces vives du pays, dans l’engagement patriotique, la fraternité et la franchise, pour enfin sortir notre pays de cette faillite, institutionnelle, économique et sociale, résultat de 64 ans de régimes politico-ethnicistes, dictatoriaux, criminels et prédateurs. C’est la seule voie du changement pacifique, dans la concorde, pour éradiquer durablement les maux séculaires qui ont détruit notre pays. Nous n’avons posé qu’une seule condition principale à notre participation à un tel dialogue : que les assises soient dirigées par la CEDEAO. Ce sera un gage de sérieux et d’objectivité des travaux qui ne peuvent pas être pilotés directement ou indirectement par une des parties, en l’occurrence le CNRD. Nous ne posons aucun autre préalable. A cet égard, il faut dire que nous avons bien suivi les récriminations de participants au présent dialogue, se plaignant que les textes fondamentaux entrain d’être écrits, le sont sous la dictée d’envoyés musclés du CNRD…
Au plan politique, apparemment, le CNRD ne veut traiter qu’avec des coalitions de partis. Or, nous n’appartenons actuellement à aucune coalition. L’amère expérience vécue montre qu’en Guinée, les coalitions politiques ne sont que des rassemblements hétéroclites, éphémères, faites de manipulations politicardes et d’incessantes guerres de positionnement pour le partage du gâteau.
Dans la mesure où aucun texte de loi n’oblige un parti à être membre d’une coalition pour avoir son mot à dire sur les affaires du pays, le MATAD doit trouver la formule permettant aux partis politiques légaux, non membres de coalitions qui le souhaitent, de participer au Dialogue dit « inclusif ». Nous avons participé au dialogue politique de 2009, avec le CNDD, en tant qu’acteur de premier plan, auprès du Coordonnateur, Feu Jean-Marie Doré.
Nous sommes présents dans l’arène politique, sans interruption depuis la Loi Fondamentale de 1990 et apportons notre modeste contribution à l’éclosion de la démocratie en Guinée, que ce soit au Parlement ou en dehors de celui-ci. Nous considérons que le fait de nous empêcher indirectement de participer à un dialogue sur la Transition ne peut pas être fortuit. Beaucoup dans le système politico-ethnique qui a dominé la vie politique de la Guinée jusque-là, n’ont aucune envie d’avoir autour de la table, face à eux, des gens qui soulèvent des questions dérangeantes, surtout avec des arguments auxquels ils ne peuvent pas répondre. Mais la sortie définitive de la crise multiforme et profonde de la Guinée ne se fera pas à coup de faux-semblants et de textes qui resteront lettre morte.
En ce qui concerne le lieu où devrait se tenir le Dialogue, il est important de souligner que le fait que ces assises se tiennent hors de la Guinée n’est pas un gage de sérieux et d’efficacité. Nous avons participé au Dialogue inter-guinéen en 2009 à Abuja puis à Ouagadougou, sous l’égide de la CEDEAO, justement après les événements du 28 septembre 2009 de triste mémoire. Des milliards avaient été dépensés en pure perte ! Le tout s’est terminé par un feuillet de deux pages, signé par trois putschistes, sous l’égide du Groupe International de Contact, piloté par un ministre français qui travaillait pour un candidat. Le texte d’Accord Politique Global Inter-Guinéen que nous avions adopté aux Forces Vives n’a jamais été signé et pour cause : les dirigeants en vue étaient contre, mais n’osaient pas le dire ouvertement, car ne voulant à aucun prix arriver aux affaires, avec des textes contraignants ! La suite est connue, avec la transition bâclée qui s’est terminée par des élections truquées, sur fond de clivages communautaires. Si les présentes assises se déportent à l’étranger, uniquement pour permettre à des dirigeants politiques exilés de participer aux travaux, la bonne solution est de créer toutes les conditions pour qu’ils puissent rentrer chez eux, avec toutes les garanties nécessaires de sécurité et de respect de leurs droits. Sinon, on n’aura fait que déplacer le problème, sans le résoudre.
2. SUR LA SITUATION POLITIQUE DE LA TRANSITION
Il ne fait aucun doute que le CNRD a engagé des réformes fondamentales qui vont dans la bonne direction. Beaucoup de ces mesures très courageuses, inédites et positives pour l’assainissement de l’appareil d’Etat et de la lutte contre la corruption, l’enrichissement illicite et les détournements de deniers publics, sont salutaires et conformes à nos revendications, inlassablement répétées depuis l’agrément de notre parti en avril 1992. Les mesures allant dans le sens de la réduction du train de vie de l’Etat, l’assainissement du système éducatif, la redynamisation de l’Administration territoriale pour en faire un accompagnateur de la paix et du développement local, la remise en ordre du secteur minier, l’assainissement de la gestion des finances publiques, l’indépendance de la justice, etc., doivent être approfondies et soutenues par tout patriote conséquent.
Mais la question fondamentale qui se pose est celle de la pérennité des réformes engagées. Qu’est ce qui nous garantit qu’on n’est pas dans de simples mesures démagogiques sans lendemain, avec la simple recherche de l’effet d’annonce, pour plaire à la population éprouvée ? Pour l’instant, hélas pas grand-chose. En particulier, le refus obstiné du CNRD de généraliser la déclaration de patrimoine des gestionnaires et décideurs à tous les niveaux, sonne comme un démenti aux proclamations de foi sur la refondation de l’Etat. A cet égard, il est important de souligner que la déclaration des biens est une mesure constitutionnelle qui, pour être conforme à la loi, ne peut s’arrêter à un simple document sous-seing privé, entre copains. Elle doit être publiée au Journal Officiel, pour que nul n’en ignore. Tout le reste n’est que tromperie et manœuvres dilatoires. La confiance ne se décrète pas ; elle s’acquière par des actes concrets et non par des discours ou des jurons sur des livres censés être sacrés.
Tue, 06 Dec 22 13:16:23 +0000
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