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«A chaque réforme des retraites, les femmes sont plus lésées que les hommes»

Muriel 61 ans

Salariée dans une entreprise sous-traitante de l’industrie automobile spécialisée dans les plastiques

«Pour espérer une retraite à taux plein, je devais déjà attendre l’âge de 67 ans, car je n’ai commencé à travailler qu’à 27 ans. Je pouvais partir à 62 ans avec une décote, la réforme me rajoute trois mois. J’avais de toute manière prévu de partir à 65 ans, ces trois mois supplémentaires ne changeront pas grand-chose. Mais j’espère garder mon poste, j’ai déjà échappé à trois plans de départ. Je ne veux pas partir. Jamais je ne retrouverai le même salaire, on n’embauche pas les vieux. On n’embauche que les jeunes, pas chers. Voir son poste supprimé dans un plan, ça donne une claque pour se battre, on se rend soudain compte que l’on n’est plus indispensable à l’entreprise. Trouver un sens au travail devient de plus en plus difficile.»

(Boby/Libération)

Anne Leclerc 65 ans

Educatrice à la protection judiciaire de la jeunesse, retraitée

«Les propos du gouvernement sur cette réforme qui serait juste pour les femmes, c’est à s’étrangler. C’est complètement hors-sol, et même méprisant de se servir ainsi des inégalités salariales. A chaque réforme des retraites, les femmes, par leur situation d’emploi et dans la vie, sont plus lésées que les hommes. Je suis l’une des fondatrices du collectif pour la grève féministe, en 2019, avec cette idée de “quand les femmes s’arrêtent, tout s’arrête“. On a l’impression de toujours répéter la même chose sans que la situation ne progresse suffisamment. Le Covid a mis en lumière les métiers dits essentiels, ce sont les oubliées aujourd’hui de la revalorisation. Et puis personne ne parle de la manière dont pourraient être prises en compte les conséquences des violences au travail, du harcèlement, du stress au travail dans la pénibilité.»

(Boby/Libération)

Laurence 54 ans, avocate en droit social, avec sa fille Elena 19 ans, étudiante à Sciences-Po

«Dans certains métiers, comme les travaux publics ou le nettoyage, les gens à 50 ans, ils sont cassés. Je le vois, je les défends tous les jours. Quant aux cadres sup, à 55 ans, on les vire. Avec le manque de financement de la médecine du travail, les gens sont aussi moins surveillés médicalement. Les disparités entre hommes et femmes sont importantes. Des sacrifices consentis par les femmes, qui ont renoncé à leur carrière pour que leur mari puisse prendre des postes importants et qui le paient au moment de la retraite, on n’en parle pas. Des femmes qui sont seules à s’occuper de leurs enfants non plus. Pour elles, rallonger la durée de carrière est impossible. Et puis quand on parle de reconnaissance de la pénibilité, le harcèlement sexuel ou le burn-out ne sont jamais pris en compte.»