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Angoulême : une conférence et un film sur la dignité au travail et la régulation des multinationales

Il y a des produits certifiés bios qui violent les droits humains.

Elle animera, ce lundi à 20h au Mégarama à Garat (6€ adultes, 4,5€ moins de 16 ans), un débat sur le sujet après la projection d’un film inspiré d’une histoire vraie sur la naissance d’un syndicat d’ouvrières du textile au Bangladesh.

Le nombre de décès sur les chantiers du Mondial au Qatar a remis les conditions de travail des ouvriers sur le devant de l’actualité. Votre objectif est de pas laisser le soufflet retomber pour poursuivre le combat ?

Cette situation au Qatar est d’autant plus dramatique qu’elle était prévisible grâce aux nombreuses alertes d’Amnesty International. Toutes les conditions étaient réunies pour que des violations des droits fondamentaux des travailleurs se produisent. Effectivement, ça a attiré le grand public, ce qui est habituellement compliqué à faire. Notre rôle est de rendre visible des personnes vivant à l’autre bout du monde et de garantir leurs droits fondamentaux. Nous formons un lien entre elles, les pouvoirs politiques et les entreprises. Nous sommes aussi très mobilisés pour la défense des femmes au travail et la prévention des agressions sexistes et sexuelles. Elles sont très présentes dans les chaînes de fabrication, notamment le textile. Des mécanismes d’alerte doivent être mis en place afin d’arrêter cette culture de l’impunité en leur donnant à toutes accès à la justice. Les femmes, de par leur genre, ne sont pas exposées aux mêmes problématiques que les hommes, c’est le cas en France mais aussi dans les pays moins développés.

Comment, à son échelle, un consommateur peut-il agir ?

L’étiquette d’un vêtement venant du Bangladesh ou de Chine, où le droit du travail n’a rien à voir avec le nôtre, doit être une première alerte. Le prix est également un bon indicateur : plus il est bas, plus il y a un coût payé par les ouvriers en bout de chaîne. Il est préférable d’éviter les « fast fashion », ces collections sans cesse renouvelées, et privilégier la seconde main.

Les labels de commerce équitable, mis en avant par certaines marques, sont-ils toujours fiables ?

Non c’est variable. La certification Fairtrade/Max Havelaar est reconnue mais d’autres ne sont que des effets d’affichage. Par le passé, Rainforest Alliance a labellisé des plantations au Brésil alors que les droits des salariés n’y étaient pas respectés. On peut aussi avoir des produits certifiés bios qui violent les droits humains. Pour que le consommateur s’y retrouve, on a publié une boussole de labels.

Une directive européenne sur le devoir de vigilance des multinationales est actuellement en débat, quels amendements souhaitez-vous lui apporter ?

En France, depuis 2017, une loi existe. Elle oblige les entreprises de plus de 5000 personnes à identifier les risques de violation des droits dans toute la chaîne d’approvisionnement jusqu’à la filiale, les sous-traitants et les fournisseurs. Ce cadre juridique nous a permis d’engager une action en justice contre Yves Rocher. Dans l’un de ses ateliers en Turquie, 130 salariés avaient été licenciés après avoir voulu monter un syndicat. Nous en avions alerté le groupe qui n’avait pas réagi. L’objectif de la directive est d’au moins produire les mêmes effets, voire plus, mais au niveau européen. Nous militons actuellement pour que le champ d’application - actuellement 0,2 % des multinationales européennes - soit élargi. Nous voulons obliger les grands groupes à mieux connaître toute leur chaîne de production. Ils ont les moyens de le faire mais ça demande de l’argent.