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Assemblée nationale : «pas fatigués», les députés réclament quand même «de nouvelles règles du jeu»

Un Palais-Bourbon en surchauffe ? Cinq mois après les élections législatives, les effets de la nouvelle configuration politique à l’Assemblée nationale se font concrètement ressentir. Et pas vraiment pour le meilleur. La reparlementarisation de la vie politique a en effet entraîné avec elle son lot de dysfonctionnements, récemment soulevés par les élus. Plus qu’une simple fatigue due au marathon budgétaire de l’automne, où les séances dans l’hémicycle se sont étirées jusqu’au milieu de la nuit, les oppositions se plaignent d’un manque général de considération. Et cherchent toujours la «nouvelle méthode» de gouvernement prônée par l’exécutif.

La fin de l’examen de la niche parlementaire LFI, jeudi 24 novembre, a illustré la confusion ambiante. Alors que les députés débattaient de la réintégration des soignants non vaccinés, la majorité a tremblé à l’idée de se faire battre par des oppositions coalisées. Tactiquement, elle a donc multiplié les amendements pour ralentir l’examen de la proposition de loi avant la fin du sablier – le soir même à minuit. Dans une Assemblée bouillante, les invectives ont volé, les oppositions dénonçant l’entrave orchestrée par le gouvernement.

«Travailler mieux, pas moins»

«L’obstruction, c’est la négation même du débat», a critiqué vendredi la présidente de l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet, dans la Voix du Nord. Le président du groupe LR, Olivier Marleix, a dénoncé ce mardi un «exercice inédit d’obstruction gouvernementale». «C’est la première fois sous la Ve République qu’on voit un gouvernement se prêter à ce jeu», a pointé le député d’Eure-et-Loir. «Ce n’est pas acceptable», a également dénoncé le député communiste de Seine-Maritime Sébastien Jumel. Face à cette protestation collective, la présidente du Palais-Bourbon a convié ce mardi les différents présidents de groupe à une réunion consacrée au fonctionnement du travail parlementaire. «Ce n’est pas qu’une réunion sur le rythme, mais aussi sur l’organisation, explique-t-on dans l’entourage de l’élue des Yvelines. L’idée est de voir comment travailler mieux, pas moins. De permettre le travail en circonscription et d’améliorer le travail entre les commissions et hémicycle.»

A entendre le refrain de parlementaires épuisés, plusieurs d’entre eux s’agacent. «Que le gouvernement essaie de beaucoup nous occuper, c’est une réalité, pointe Pierre Dharréville, député communiste des Bouches-du-Rhône. Mais on ne se plaint pas, nous ne sommes pas fatigués !» Les plus expérimentés de l’Assemblée estiment en effet que le rythme n’a pas changé. Que les séances nocturnes existaient déjà sous la précédente législature. «Pour faire fonctionner cette Assemblée, nous n’avons pas besoin d’heures de sommeil en plus, assure Boris Vallaud, député (PS) des Landes et président du groupe socialiste à l’Assemblée. L’essentiel, ce sont de nouvelles règles du jeu.» Dans le bureau de la présidente de l’Assemblée, chaque groupe est donc venu avec ses pistes de travail. Les députés réclament notamment plus de visibilité sur le calendrier parlementaire du gouvernement. Un moyen de travailler en amont les textes, notamment en réalisant davantage de missions d’information parlementaires. «On ne légifère bien que si nous sommes ancrés sur le terrain et si nous prenons le temps de maturer», estimait Braun-Pivet elle-même vendredi.

«Une réflexion ancienne»

Autre revendication, mieux découper l’agenda des élus, entre la présence dans l’hémicycle, en commissions et en circonscription. Dans un contexte de majorité relative, où des votes peuvent se jouer à quelques voix près, «il y a une nécessité de présence. Il faut être présent sur tous les ballons, toutes les actions», explique le député (LFI) Alexis Corbière. L’idée de semaines exclusivement réservées à l’Assemblée ou au terrain a ainsi été évoquée. «Cette réflexion est ancienne, dit Sylvain Maillard, député (Renaissance) de Paris. Mais on s’aperçoit que certains députés ne savent plus où ils doivent être.» Concernant les séances de nuit, la présidente de l’Assemblée a appelé au respect de la règle actuelle : l’arrêt des débats à minuit pile. L’idée d’élargir les délégations de vote fait également son chemin. Pour l’heure, le parlementaire ne peut en recevoir qu’une seule. Le nombre de texte présent dans les niches parlementaires pourrait également être limité à huit.

Dans les rangs des députés, la cuisine parlementaire, comme le dépôt de centaines d’amendements pour freiner les débats – la fameuse obstruction – pose également problème. Tout comme les motions de rejets préalables des insoumis, déposées sur chaque texte du gouvernement, ou l’usage à répétition du 49.3 par l’exécutif. Ainsi, «il faut organiser le compromis non pas comme un résultat, mais comme un processus, défend Boris Vallaud. Si nous voulons offrir de la stabilité législative, il faut travailler davantage de concert.»